A quelques jours de la fin de la première phase des assises de l’eau, la Fédération professionnelle des entreprises de l’eau revient sur ses priorités et détaille ses propositions concernant l’avenir de la gestion de l’eau et des réseaux et son financement.
« La guerre de tranchée public/privé est une guerre du XXème siècle », lance le nouveau président de la Fédération professionnelle des entreprises de l’eau (FP2E), Frédéric Van Heems. Pour lui, « il faut pacifier les relations pour inventer de nouvelles choses et mettre l’innovation au cœur de nos préoccupations ». Le mercredi 4 juillet dernier, rs d’une table ronde réunissant le président de la FP2E, le député LREM Adrien Morenas, et le président du comité de bassin Loire-Bretagne, Thierry Burlot, les trois acteurs ont pu revenir sur la première phase des assises de l’eau – qui se clôturera le 17 juillet prochain – et détailler leurs attentes pour la suite.
Si les professionnels de la FP2E saluent la tenue de ces assises dont ils sentent « qu’en sortiront des choses concrètes et positives », le président de la Fédération attire néanmoins l’attention sur un « sous-investissement chronique ». Pour lui en effet, « les 6 milliards d’euros investis par an sont insuffisants : il manque entre 1,5 et 2 milliards d’euros par an pour être au bon compte ».
Mettre le consommateur au cœur des enjeux
Pour Frédéric Van Heems, il faudrait « répartir l’effort de financement, sur un modèle de mix-financement », entre l’État, les services d’eau publics et privés, et les consommateurs. « Le rapport qualité prix de l’eau en France est exceptionnel », estime-t-il : « le consommateur paie 4 euros le mètre cube », rappelle-t-il. Et d’ajouter : « Une majorité de consommateurs est d’accord pour payer plus si la qualité de l’eau s’améliore et pour la protection des ressources, il s’agirait de passer à 4,40 euros le mètre cube d’ici à 10 ans ». Le président de la FP2E pense qu’il est important de « mettre le consommateur final au cœur des enjeux de l’eau ». Et pour renforcer leur confiance et mieux les impliquer, Adrien Morenas, député LREM qui a porté le rapport d’information sur la ressource en eau à l’Assemblée nationale, estime qu’il faut améliorer la communication concernant les aides disponibles, voire fusionner les chèques énergie et eau en un « chèque fluide ».
Au-delà des canalisations, une vision globale
Début juillet, la FNCCR soulignait sa déception quant à la priorité donnée par le gouvernement à l’entretien des canalisations, au détriment de la gestion des ressources et de la qualité de l’eau. Si la Fédération des collectivités concédantes et régies ne semble pas aussi enthousiaste que les entreprises de l’eau à l’idée de développer les relations public/privé, les deux se rassemblent cependant sur les priorités du secteur de l’eau. En effet, la FP2E explique qu’il faut « avoir une vision globale ». Pour les professionnels, la première priorité est la qualité de l’eau et les enjeux sanitaires qui en découlent, suivie par la pression exercée sur les ressources, notamment à cause du changement climatique. L’entretien des canalisations arrive seulement en troisième position.
La Fédération estime qu’il faut notamment travailler à résorber la fracture territoriale, maintenir la qualité de l’eau lors de son transport, atteindre les objectifs de la directive « eau potable », assurer la disponibilité des ressources pour chaque usage, assurer la continuité de service, atteindre les objectifs de préservation des ressources de Grenelle II, ou encore anticiper les effets du changement climatique. Concernant la gestion patrimoniale, les professionnels soulignent la nécessité de promouvoir un investissement responsable dans les territoires.
« L’eau paie presque l’eau »
D’autant que « la politique ne peut pas être la même selon les territoires, en tout cas pour le plan anti-fuites », estime Adrien Morenas. Il explique qu’on doit « avoir une réflexion territoriale en s’appuyant sur les agences de bassins ». Ce à quoi le président du comité de bassin Loire-Atlantique Thierry Burlot répond sur la défensive, en pointant du doigt la ponction sur le budget des agences de l’eau, votée dans le PLF 2018.
« Aujourd’hui on vient chercher les agences de l’eau pour atteindre les objectifs de la directive européenne sur le grand cycle et pour payer la biodiversité », s’agace-t-il. « Dans mon bassin, on est passés de 400 millions d’euros de budget par an, à 283 millions d’euros ! La dégradation de la qualité des eaux a des conséquences dramatiques sur l’attractivité de notre région », déplore-t-il. Thierry Burlot martèle que le système de « l’eau paie l’eau » est un « système vertueux et solidaire », qu’il s’agit de ne pas mettre à mal. Avec le financement par les agences d’une nouvelle contribution, à hauteur de 175 millions d’euros par an, pour la biodiversité, les forêts ou encore la chasse, « l’eau paie presque l’eau », reconnaît Adrien Morenas.
Deuxième phase des assises en août et septembre
La deuxième phase des assises de l’eau se tiendra en août et septembre prochain. Elle « traitera des aspects qualitatifs et quantitatifs des ressources en eau, afin d’aider les territoires à être plus résilients au changement climatique », expliquait le ministère de la transition écologique lors du lancement de la première étape en avril dernier.