Performant au plan thermique, le béton de chanvre doit aussi convaincre sur le critère de la résistance au feu.
Il est acquis que le village des Jeux olympiques sera bâti en matériaux biosourcés : l’option est inscrite au plan d’action 2018-2020, issu de la stratégie nationale pour la bioéconomie adoptée début 2017. Au-delà de l’événement sportif de 2024, « le recours (…) à la paille et aux fibres de lin et chanvre dans les matériaux sera accru », projette le document.
En vue des appels d’offre prévus en 2020, la filière chanvre met en avant un matériau décarboné, dont le pouvoir isolant et la performance hygrothermique minimisent la consommation d’énergie du bâtiment occupé. Le village olympique comprendra 600 logements (voués à enrichir le parc social) où résideront les athlètes. Dans sa version alimentaire, le chanvre est par ailleurs prisé des sportifs pour ses protéines et minéraux. Rappelons que la plante cultivée en France présente un taux maximal de 0,2 % de THC (substance psychotrope), qui la distingue du cannabis. « Le mot "chanvre" peut constituer un problème marketing », admet Pascal Mortoire, directeur de la coopérative La Chanvrière.
Un surcout de construction inférieur à 3 %
Le cahier des charges imposera des matériaux préfabriqués. Une condition remplie depuis peu sur les « gros » chantiers. Une entreprise proche de Rennes a inauguré, début 2018, un bâtiment érigé avec 31 panneaux de béton de chanvre réalisés en atelier et assemblés en quinze jours sur une ossature bois. Une première pour un édifice tertiaire comportant 1 000 m 2 de murs extérieurs. Par rapport à un mode constructif conventionnel, l’opération présente « un prix de revient seulement 2,6 % plus élevé », selon la fédération Interchanvre. Si la très bonne résistance au feu est établie pour les bâtiments de six étages, elle reste à démontrer pour ceux de plus grande hauteur - sachant que le village, voulu compact, accueillera des immeubles R+8. L’actualisation des« règles professionnelles » établies par la filière en 2017, aboutira en 2019.
Le bâtiment ne représente que 14 % des usages de la chènevotte (matière ligneuse, 43 % du poids de la plante), avant tout utilisée pour la production de litière animale (50 %), devant le paillage horticole (22 %). « L’activité se répartit à égalité entre rénovation et construction », indique Quentin Pichon, chargé de mission à l’association Construire en chanvre. La France est néanmoins « leader mondial », poursuit l’architecte, confiant sur l’essor de la construction en béton de chanvre. La première réalisation remonte à 1986 (rénovation d’un bâtiment du XVIème siècle à Nogent-sur-Seine). Depuis les années 2000, se construisent des maisons individuelles et des logements collectifs, notamment dans l’habitat social parisien.
Plus de 1 400 producteurs cultivent 16 000 ha, soit la plus grande surface nationale en Europe (33 000 ha au total). L’Union européenne a mis fin en 2000 aux aides spécifiques à la culture de cette plante « bio par nature », qui croît sans engrais ni pesticides, piégeuse de nitrates et dont chaque élément (graine, bois, fibres) peut être valorisé.