À la fois déclencheur et outil de suivi de la transformation énergétique de l’offre d’une entreprise, l’analyse du cycle de vie (ACV) séduit de plus en plus de dirigeants. Ophélie Rey-Ricord, spécialiste dans la modélisation environnementale chez Segula technologies, décrypte dans cette tribune les avantages de cet outil pour mesurer, améliorer et communiquer l’empreinte environnementale de son activité.
Se lancer dans l’éco-conception. Comparer ses efforts à ceux de ses concurrents. Anticiper la réglementation. Répondre aux attentes des clients. S’orienter vers l’économie circulaire. En théorie, l’Analyse du Cycle de Vie (ACV) ne manque pas d’atouts pour séduire les entreprises, grands groupes comme ETI. En pratique, cet outil reste encore émergent dans de nombreux domaines d’activité. Apparu dans les années 60, il vise à quantifier - avec une approche multicritère - les impacts d’un produit ou d’un service sur l’ensemble de son cycle de vie. Si cette méthode d’évaluation a été normalisée dans les années 90 (ISO 14040 et ISO 14044) elle s’est véritablement diffusée comme un outil reconnu depuis 2000 avec la montée en puissance de la mobilisation internationale en faveur du climat et de la protection de la planète. Ces dernières années, l’ACV a dépassé le champ des simples spécialistes de l’environnement et de la RSE.
Identifier tous les impacts
De quoi parle-t-on au juste ? L’ACV consiste précisément à quantifier l’ensemble des impacts d’un produit ou d’un service sur les cinq phases clés de son existence : l’extraction de matières premières, la production, la distribution, l’usage et la fin de vie. Cette inspection à la loupe d’un produit répond à une méthodologie et une déontologie très précise qui est donc standardisée à l’échelle internationale par le biais de la norme ISO 14040-44. Elle peut être réalisée en interne par un collaborateur formé aux outils et à l’exploitation des bases de données ou par un prestataire extérieur. Dans les deux cas, elle permet de mieux mesurer les impacts déjà connus mais aussi souvent d’en découvrir de nouveaux, jusqu’ici ignorés. Toutefois, l’analyse du cycle de vie ne constitue pas l’aboutissement d’une stratégie de transformation mais plutôt un déclencheur d’un passage à l’action. Après avoir identifié l’ensemble des facteurs d’impact lors de l’ACV, l’organisation doit naturellement faire évoluer ses pratiques. Prudence toujours, avant de communiquer les résultats de son ACV en dehors de l’organisation, la certification ISO impose une revue critique du travail réalisé par un expert indépendant.
Une méthode qui implique toute l’entreprise
Rigoureuse et ambitieuse, la méthode de l’ACV apparaît parfois encore comme complexe à mener pour certains dirigeants. Il est vrai que certaines étapes de cette méthode peuvent s’avérer difficiles à franchir. Citons ici l’identification des différentes phases du cycle de vie, la récolte de données en interne et auprès de fournisseurs, le budget à mobiliser, le partage de ressources et d’informations entre services ou encore les précautions à prendre en matière de communication. Ces obstacles ne doivent néanmoins pas décourager les entreprises de sauter le pas et de s’emparer de cet outil si précieux pour réussir leur transformation énergétique. L’ACV s’adresse à tous les secteurs et à toutes les entreprises. Qu’elles commercialisent des biens ou des services. Elle se distingue par un accompagnement surmesure des équipes de l’entreprise désireuse de réaliser une ou plusieurs ACV. Parmi les secteurs ayant déjà démontré leur intérêt : l’automobile, les transports, l’énergie, mais aussi le sport. Une ambition qui impose de réaliser, avant toute chose, une quantification environnementale de l’ensemble de sa gamme.
Des bonnes pratiques à suivre pour réussir
Le succès d’une analyse de cycle de vie passe par le respect d’un certain nombre de bonnes pratiques. Tout d’abord, la nécessité de travailler avec un professionnel formé qui disposera du temps nécessaire pour réaliser sereinement son travail. Autre étape clé : établir une feuille de route claire et précise en début de projet. Elle doit non seulement lister les étapes de l’analyse, son calendrier, son budget, les informations à recueillir, mais aussi intégrer les objectifs d’amélioration pour l’après ACV. Il conviendra enfin d’être à la fois précautionneux et humble dans la communication des résultats de des progrès réalisés. Pour autant, l’ACV s’impose aujourd’hui comme un outil incontournable dont la diffusion devrait encore s’accélérer dans les prochaines années. De quoi favoriser une saine émulation entre entreprises en matière de transformation énergétique et environnementale. Convaincu par les bienfaits de l’analyse du cycle de vie pour votre entreprise ? En 2024, l’heure est venue de passer de la théorie à la pratique.