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Les papeteries à l'heu re des économies

PUBLIÉ LE 1er NOVEMBRE 2009
LA RÉDACTION
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Le magazine des professionnels de l’eau et de l’assainissement.
L'industrie papetière est une grosse utilisatrice d'eau. La plupart des usines consomment plusieurs milliers de mètres cubes d'eau par jour : en moyenne, il faut 15 m3 d'eau pour produire une tonne de papier. Cet indicateur est très variable d'une usine à l'autre. Il dépend de la production : papier glacé, carton ondulé, papier journal à partir de papier recyclé... Le schéma de traitement des effluents, quant à lui, reste très souvent le même. La première étape, dont est équipé l'ensemble des quelque cent usines papetières de France, est une coagulation-floculation classique, suivie d'une flottation ou d'une décantation. Elle permet d'abattre les matières en suspension (MES) et la DCO. Environ 80 % des sites possèdent ensuite un traitement biologique afin de s'attaquer plus avant aux matières organiques. Cette seconde étape est, dans la plupart des cas, un système d'épuration par boues activées ; les autres sites recourent à la méthanisation ou au lagunage, « un écosystème vivant et efficace », souligne Grégorio Crini, chercheur à l'université de Franche-Comté. Les sites se contentent le plus souvent de ces deux étapes afin d'atteindre les normes de rejet inscrites dans leurs arrêtés préfectoraux d'autorisation. Ces derniers dépendent à la fois de l'arrêté ministériel de 2000 relatif à l'industrie papetière, et de l'état du milieu récepteur, qui peut exiger des dispositions plus sévères. Dans ce cas, des traitements supplémentaires peuvent être mis en place : la Papeterie du Doubs a ainsi installé en 2002 une rhizosphère en sortie de lagunage. Lorsque la situation économique est tendue, les objectifs de diminution des rejets conduisent généralement à une optimisation des équipements existants, sans construction d'installations supplémentaires. C'est ce que propose Veolia Water STI avec le procédé biologique MBBR (Moving Bed Biofilm Reactor). Il repose sur l'introduction dans la cuve d'éléments plastiques en mouvement, servant de support aux bactéries. Sur des installations existantes, une adaptation du pompage et de l'aération permet de mettre en oeuvre la technologie en ajoutant directement dans l'ouvrage les supports, d'où un investissement minimisé. UN ENJEU NOUVEAU Utilisé en anoxie, le MBBR permet entre autres avantages de traiter l'azote, « qui est avec le phosphore un enjeu nouveau pour les papeteries, surtout là où le milieu récepteur est sensible », explique Emmanuel Cronier, ingénieur d'études à la direction technique de Veolia Water STI. Malgré cette apparente similitude des traitements des effluents, les systèmes doivent cependant être adaptés aux caractéristiques des eaux, qui dépendent de la production. Ainsi, comme le précise Claude Delporte, expert procédés de Ondeo Industrial Solutions, le traitement dépendra beaucoup de la concentration des effluents en matière organique. S'ils sont concentrés, « il est possible de mettre en oeuvre une méthanisation. C'est pourquoi nous proposons un schéma de traitement comprenant un traitement physico-chimique de coagulation-floculation, suivi d'une méthanisation puis d'un traitement biologique par boues activées. La méthanisation permet de diminuer fortement la DCO et la production de boues et de produire du gaz valorisable ». C'est le cas des usines de fabrication de produits à base de papier-carton récupéré (PCR), dont les effluents contiennent 3 à 5 g/l de DCO, ou encore de certaines usines de fabrication à partir de pâte neuve : celles dont les effluents contiennent un minimum de 1,5 g/l de DCO. Comme ces effluents sortent chauds du process, leur méthanisation est possible malgré leur relative faible concentration en matière organique. Autre exemple : dans le cas où l'usine produit du carton à partir de PCR, la seconde étape de traitement (l'étape biologique) devrait être plutôt anaérobie, « car une grande partie de la pollution de l'effluent est composée d'amidon, bien dégradé par les bactéries anaérobies. À l'inverse, dans les sites produisant des effluents moins facilement biodégradables, les traitements aérobies sont privilégiés », rappelle Emmanuel Cronier. RECYCLAGE Au-delà de ces spécificités, les priorités des papetiers en matière de gestion de l'eau, des effluents et des boues sont aujourd'hui guidées par un mot-clé : économiser. Ils souhaitent tout d'abord économiser la ressource, donc diminuer leurs prélèvements ; cela pour diminuer leurs redevances aux agences de l'eau, mais aussi pour améliorer leur image. Ils espèrent aussi dépenser moins d'argent pour gérer leurs installations de traitement ou se débarrasser de leurs déchets. Pour répondre au premier objectif, ils s'attachent depuis de nombreuses années à recycler dans leur process l'eau prélevée au milieu naturel. « La plupart des usines ont déjà optimisé le recyclage des eaux de process. Les industriels désirent désormais aller plus loin en recyclant les effluents traités par la station d'épuration, et les appels d'offres qui nous parviennent aujourd'hui du secteur papetier concernent cette problématique de recyclage », détaille Thierry Legube, directeur commercial de Veolia Water STI. Les techniques pour recycler l'eau sont nombreuses : tout dépend de la qualité de l'eau souhaitée in fine. Ainsi, installé en traitement tertiaire l'Actiflo Turbo de Veolia Water STI (un système de coagulation-floculation-décantation avec décantation lestée) permet d'obtenir une eau clarifiée qui peut être réinjectée, par exemple, dans le pulpeur avec les papiers recyclés broyés. De son côté, pour permettre le recyclage de l'eau, Ondeo IS propose des bioréacteurs à membranes en lieu et place des boues activées en raison du meilleur abattement de la matière organique. Cependant, « la difficulté rencontrée par les papetiers en ce domaine est de définir la qualité de l'eau qu'il leur faut pour maintenir la qualité de la production de papier, ce qui complique le recyclage », poursuit Emmanuel Cronier. Un programme de recherche mené en 2003-2005 par le Centre technique du papier (CTP), baptisé Cyclade, avait pour but d'identifier les points du cycle papetier où il était possible de réutiliser l'eau issue des deux étapes classiques de traitement. « Certains usages, comme le rinçage de la machine à papier, se sont imposés ; il existe donc un potentiel, mais toutes les eaux d'épuration ne peuvent pas être utilisées partout, surtout lorsque l'on monte en gamme de papier », analyse Éric Fourest, chef de projet pour le traitement des eaux au CTP. En effet, la dégradation biologique n'élimine pas les sels, le carbonate de calcium, les sulfates et les métaux contenus dans les eaux. Ces éléments sont source de corrosion et d'entartrage des réseaux ; en outre, plus le recyclage est poussé et l'apport d'eau neuve dans le circuit est réduit, plus les eaux se chargent en sels. « Pour réutiliser 100 % de l'eau, il faudrait quasiment faire de la potabilisation afin d'éliminer les sels », poursuit le chercheur. Donc utiliser des techniques telles que l'osmose inverse, les résines échangeuses d'ions, l'électrodialyse (trois techniques qui éliminent les sels), la filtration sur charbon actif ou l'ultrafiltration (deux technologies qui ne les éliminent pas). Ce qui est toujours possible, mais souvent très coûteux : seules les usines qui sont soumises à un régime « zéro rejet » y viendront. « Pour atteindre un recyclage maximal, il convient de mettre en oeuvre plusieurs technologies. Selon les cas, le concepteur en associera une ou plusieurs », rappelle Thierry Legube. ÉCONOMIE D'ÉNERGIE Deuxième impératif des papetiers : faire baisser le coût de l'épuration, donc la consommation d'électricité et de réactifs. C'est l'aération des bassins de boues activées qui représente le plus gros poste de consommation d'énergie des installations de traitement. Éric Fourest insiste donc sur l'importance des systèmes de contrôle automatique installés sur les bassins : « La mesure en ligne de paramètres tels que les MES, la hauteur du voile de boues, la matière organique dissoute, l'azote ou l'oxygène dissous n'est pas encore très développée dans le secteur papetier, hormis sur les plus grosses stations. Cela demande de gros investissements et les gains sont encore mal perçus ; cela permettrait pourtant d'optimiser l'aération et de diminuer la facture énergétique. » De son côté, Claude Delporte explique qu'Ondeo IS a mis au point pour les installations de prétraitement un système de double mesure de la turbidité : « Sur un même échantillon, la turbidité totale est comparée à la turbidité après une décantation, afin d'asservir le dosage de réactifs à la qualité de l'effluent. » L'optimisation de la consommation d'énergie passe aussi par la méthanisation des effluents et l'utilisation du biogaz ainsi produit pour générer de l'électricité ou de la vapeur. « Les premiers méthaniseurs ne comprenaient pas de système de récupération du biogaz. Sur la quinzaine de papeteries équipées de méthaniseurs, seules quelques-unes valorisent le biogaz », constate Éric Fourest, qui évalue la production d'électricité par cette technologie à « 1 ou 2 % de l'énergie consommée dans l'année par l'usine, ce qui n'est pas négligeable. » DÉSHYDRATATION Des économies importantes peuvent aussi être réalisées en diminuant le coût de gestion des boues d'épuration - il est ici question des boues qui ne peuvent pas être recyclées dans le cycle de production. En effet, les papetiers s'efforcent au maximum de recycler leurs boues. Tant qu'elles contiennent un pourcentage important de cellulose, les boues peuvent être remises en circulation, notamment pour fabriquer des papiers peu nobles ou des cartons. À l'intérieur de l'usine, certaines boues peuvent aussi être déshydratées et incinérées dans la chaudière à déchets du site, la production de papier nécessitant un apport de chaleur pour sécher le papier après son couchage. Il faut pour cela que les boues ne contiennent pas une trop forte charge minérale. Dans ce cas, les boues sont déshydratées pour augmenter leur siccité grâce à des tables d'égouttage, puis des filtres mécaniques (filtres à bande, à vis...) ou des sécheurs (solaires, thermiques). Afin d'optimiser l'étape de déshydratation, le CTP s'est notamment penché sur différents additifs pour limiter la production de biomasse des traitements par boues activées. Ces dernières produisent en effet beaucoup de boues biologiques. « Les boues biologiques représentent seulement 10 % du total des boues d'épuration dans une papeterie. Mais, lorsqu'elles sont mélangées aux boues physico-chimiques contenant des matières minérales, la déshydratation est plus difficile », détaille Éric Fourest. Dans tous les cas où le recyclage devient impossible, les boues doivent être enfouies ou valorisées hors du site. Or la déshydratation permet aussi de diminuer le volume des boues. Le gérant d'Idéal Technologies, Éric Durivault, cite ainsi le cas de la papeterie Sical, où la mise en place d'une essoreuse Revolution 2000 a permis de diminuer par deux le volume des boues issues du pulpeur (cuve où les vieux papiers sont humidifiés pour être transformés en pâte). L'économie est de taille pour l'entreprise : ces boues contiennent cellulose, plastiques, ferrailles, polystyrène expansé et doivent donc être dirigées vers un enfouissement technique. La même logique sous-tend le choix d'équipements qui produisent peu de boues lors du traitement des effluents : bioréacteurs à membrane, procédés MBBR, méthanisation... VALORISATION Ces investissements destinés à réduire le volume de boues sont aussi justifiés par les dépenses que génère la valorisation des boues. À partir des années 1970, les usines se sont vues dans l'obligation de valoriser leurs boues, celles-ci n'étant pas considérées comme un déchet ultime. Mais elles restent un déchet : les papetiers doivent donc prendre en charge tous les frais générés par leur valorisation. Dans le cas d'un épandage agricole, le principe du « rendu racine gratuit » s'est imposé. Il implique que la papeterie prenne à sa charge le devenir des boues de l'usine à la racine de la plante : les analyses des sols et des boues, le transport des boues déshydratées, la livraison, l'épandage ainsi que le suivi administratif de ces opérations. D'autres types de valorisation impliquent en outre de payer le destinataire final : dans les cas d'une valorisation « matière » en briqueterie ou cimenterie notamment. Le coût de la valorisation varie donc ; il peut monter à 90 euros par tonne de boues dans une cimenterie, alors qu'il atteint environ 20 à 25 euros par tonne en épandage agricole. En raison de son intérêt économique et du large volume de boues qu'elle peut accepter, « la filière principale de valorisation des boues de papeterie est l'épandage. Environ 80 % des boues sont épandues », précise Éric Fourest. Aujourd'hui, les boues de papeterie sont appréciées par les agriculteurs. « Elles sont pauvres en azote, mais riches en carbonate de calcium : plus qu'un fertilisant, c'est un amendement. Il stabilise le pH du sol et permet de diminuer l'irrigation grâce à la capacité d'absorption des fibres qui restent dans les boues », note Christophe Claverie, responsable environnement des Papeteries de Turckheim. La symbiose entre boues de papeterie et agriculture est devenue une réalité : dans le Haut-Rhin, près de la moitié de la matière sèche épandue vient des papeteries de Turckheim. TABOU(E) STORY Ce résultat a été obtenu grâce à une campagne de communication, lancée il y a douze ans à l'initiative du Syndicat mixte du recyclage agricole du Haut-Rhin, et baptisée Tabou(e) story. Un tel succès est essentiel à l'équilibre économique des papeteries, mais aussi à leur image environnementale. En effet, leur gestion de l'eau, des effluents et des boues se veut de plus en plus exemplaire : prélèvements minimaux, recyclage, valorisation. Un moyen de redorer le blason d'une industrie longtemps perçue comme très polluante.


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