Aqua Picardie Maritime a été créée en 2002 pour répondre aux obligations réglementaires des industriels en matière de surveillance de leur impact sur les nappes. Elle a permis de mutualiser les moyens humains, techniques et financiers nécessaires à la création et à la gestion d'un réseau de piézomètres. L'observatoire, opérationnel depuis 2004, compte plus de 80 points de suivi pour 65 sites industriels concernés. Les données piézométriques ont d'abord servi à déterminer 23 zones d'influence cohérentes en termes d'implantation des entreprises et d'écoulement de la nappe de la craie. Des schémas conceptuels ont ensuite été définis pour décrire les relations entre les sources de pollution potentielles et les enjeux à protéger (milieux naturels, populations, usages) et préciser les vecteurs de transfert (eau, sol, air du sol). Coté qualité, les mesures sont confrontées à des seuils de gestion, fixés en fonction de valeurs de référence relatives aux usages à l'aval : normes, valeurs réglementaires ou, à défaut, préconisations existantes (émanant par exemple de l'OMS). Ainsi, le suivi est renforcé en fréquence et/ou en nombre de points et de paramètres en cas de dépassement du seuil d'alerte, équivalent à 75 % de la valeur de référence. Au-delà du seuil de déclenchement (cinq fois la valeur), l'association invite les entreprises à mettre en place des mesures correctives. « Ces seuils constituent des repères pour les industriels, qui éprouvent parfois des difficultés à se situer par rapport à leur incidence et aux réglementations », indique Dominique Nourry, président de l'association et directeur industriel de Watts Industries France.
Au final, sept zones de priorité forte, dépassant le seuil haut, ont été mises en évidence. Les analyses y ont révélé plusieurs paramètres problématiques parmi les métaux et les solvants chlorés, chrome hexavalent et trichloréthylène notamment. Rien d'étonnant lorsque l'on sait que des entreprises de traitement de surface et de travail des métaux sont implantées ici depuis plus de cent ans.
Ces pollutions ont-elles des causes actuelles ou héritées d'un long passé industriel ? Pour le savoir, l'association a accompagné six entreprises dans la réalisation d'investigations complémentaires (historique des sites, sondages, analyses de sol) afin de mieux connaître leur impact sur la nappe.
« Les compléments d'étude confirment l'ancienneté des pollutions constatées. Ce n'est pas vraiment une surprise : aucun rejet liquide n'émane des entreprises depuis une dizaine d'années », précise Ségolène Lathuile, conseillère développement durable à la CCI Littoral Normand Picard, mise à disposition de l'association.
Cette démarche de mutualisation unique en France est cofinancée par les industriels (30 %), le conseil régional (35 %) et la Direccte (direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, pour 35 %).