Les vertus de l'infiltration sont multiples : constitution de réserves d'eau dans le sol, diminution des débits et volumes écoulés, limitation de l'érosion des sols et des transferts de polluants par ruissellement… Les démarches favorisant l'infiltration des eaux pluviales se renforcent depuis plusieurs années et nombreuses sont les collectivités qui élaborent désormais des prescriptions en ce sens. Cependant, si la réalisation de projets exemplaires est un levier indéniable, elle ne peut suffire à elle seule à maintenir cette dynamique. Il s'agit aussi d'assurer la pérennité des solutions mises en œuvre, tout en prenant en compte les contraintes locales dans la conception des projets.
L'analyse de la faisabilité de l'infiltration devient donc un préalable à la réalisation de tout projet porté par une maîtrise d'ouvrage publique ou privée. Elle s'appuie sur une étude de sol réalisée par un bureau d'études spécialisé. Cette étude ne se limite pas à la réalisation d'essais de perméabilité et consiste, dans un premier temps, en une analyse documentaire, une visite de terrain, voire des reconnaissances superficielles des sols. Des reconnaissances in situ approfondies peuvent ensuite être menées au stade des études d'esquisse ou d'avant-projet, en incluant généralement des essais de perméabilité.
Une étude de sol permet plus largement de fournir les données nécessaires à la conception et au dimensionnement des ouvrages, ainsi qu'à la définition de prescriptions pour leur réalisation et leur exploitation futures. Ces données sont exploitées par le maître d'œuvre ou l'équipe du projet. En cas d'impossibilité d'infiltrer a priori, des adaptations techniques peuvent être étudiées. Lorsque le sol présente de faibles perméabilités (disons 10-7 m/s), l'infiltration ne doit pas être totalement écartée. Elle peut, en effet, permettre de gérer de petites pluies, une restitution complémentaire vers un cours d'eau, un réseau de collecte superficiel ou bien enterré étant alors nécessaire pour des pluies plus importantes. En cas de présence de sols sensibles à l'eau (par dissolution, retrait, gonflement, etc.), l'opportunité de séparer les ouvrages de stockage et d'infiltration peut être analysée.
Lorsque l'aptitude à l'infiltration est confirmée par l'équipe projet, plusieurs ouvrages peuvent être réalisés et couplés : tranchées ou noues d'infiltration, puits d'infiltration dans les secteurs contraints ou en l'absence d'exutoire, chaussées à structure réservoir, jardins de pluie, bassins ou bien encore simples modelés de terrain offrant un volume de stockage suffisant. En phase de conception et de mise en œuvre, maîtres d'œuvre et entreprises seront particulièrement attentifs à la vérification de la tenue des parois de certains ouvrages, à l'accessibilité future des surfaces d'infiltration, à l'existence d'un plan de circulation permettant d'éviter le Noue d'infiltration plantée. compactage des sols pendant le chantier, au choix de la végétation le cas échéant…
Lorsque les ouvrages contiennent des matériaux stockants, un point de vigilance réside dans le choix du matériau de stockage (caractérisation mécanique, innocuité environnementale). C'est notamment le cas pour les produits préfabriqués. Certains ont fait l'objet d'études ces dernières années, à l'image des produits creux en béton avec le Cerib ou des structures alvéolaires ultralégères (Saul) avec des services du ministère en charge de l'Écologie regroupés aujourd'hui au sein du Cerema. Pour les Saul, ces études ont mené à la définition d'une méthode de dimensionnement mécanique et à des recommandations essentielles pour la mise en œuvre, la réception et l'exploitation des ouvrages. L'utilisation de matériaux pour lesquels l'état des connaissances est insuffisant est déconseillée.
Le recours à l'infiltration étant désormais le mode de gestion des eaux pluviales à privilégier, des collectivités innovent pour une meilleure prise en compte de l'aptitude des sols à l'infiltration dans la planification urbaine. Les enjeux opérationnels sont multiples : définition de critères de caractérisation, élaboration de cartes d'in-filtrabilité et prescriptions (exemples du conseil général de Seine-Saint-Denis, du Grand Lyon ou de Lille Métropole), intégration dans la construction d'une politique locale et spatialisée de gestion des eaux pluviales, appropriation par les praticiens, traduction dans les règles d'occupation des sols… Cela constitue un sujet d'études au sein du Cerema. Les retours d'expériences menés devraient conduire à la rédaction d'un guide courant 2015.
D'autres questions sur l'infiltration relèvent quant à elles encore de la recherche. Les études réalisées notamment par les observatoires de terrain en hydrologie urbaine complètent progressivement les bonnes pratiques, pour optimiser, par exemple, la régulation des écoulements ou l'abattement des polluants dans les ouvrages. Le recours à l'infiltration ne doit pas non plus éluder l'importance des approches préventives, comme la limitation de l'imperméabilisation des sols et la réduction de l'émission ou du transfert de polluants grâce à l'adaptation des pratiques urbaines dans le choix des matériaux de surface et ou des techniques d'entretien.