Le premier outil d'inspection est bien sûr l'œil des égoutiers. En arpentant les réseaux, ils peuvent mener des observations simples lors de leurs interventions de routine et ainsi relever et consigner l'état des conduites dans un registre ou un système d'information géographique. Des inspections plus détaillées, pédestres dans les sections visitables (d'un diamètre supérieur à 1 600 mm) sinon télévisées à l'aide d'un robot caméra, seront ensuite programmées en cas d'anomalies. Dépôts et stagnations d'eau, corrosion et abrasion, fissures, perforations, affaissements, défauts de joints ou d'emboîtements, ovalisations, branchements pénétrants, flaches, contre-pentes, etc. : de nature diverse et variée, les pathologies constatées sont répertoriées selon la norme EN 13508-2. Mais leur caractérisation ne saurait se limiter à un simple examen visuel interne, la cause du mal se cachant le plus souvent derrière le tuyau.
En dehors des problèmes directement liés à l'agressivité chimique de l'effluent, les dégâts sont majoritairement provoqués par une déstabilisation des terrains accueillant l'émissaire, due aux mouvements naturels du sol ou à une mauvaise pose qui peuvent être mis en évidence à l'inclinomètre. Les conduites et le sol, en équilibre instable permanent, interagissent. Le sol soutient la structure, et un déblai de 20 cm peut provoquer des fissures, voire un effondrement de la canalisation. « De l'état structurel du complexe associant la conduite et le sol découle la résistance mécanique de l'ouvrage, et donc sa tenue dans le temps », souligne Julien Landaud, responsable du pôle ingénierie des ouvrages souterrains du bureau d'études Structure et réhabilitation. Primordiale, la connaissance de la qualité du sol environnant et de son interface avec le collecteur est accessible grâce aux techniques d'auscultation. Le géoradar, les essais d'impédance mécanique ou de marteau instrumenté mesurent le comportement mécanique de l'ouvrage et détectent d'éventuels décollements et zones vides à l'extrados. Développé par Eau de Paris, le vérinage interne est un procédé adapté des domaines du génie civil. « Il consiste à ovaliser la conduite à l'aide de vérins pour évaluer la capacité structurelle du couple ouvrage-terrain », précise Olivier Thépot, chef de projet au Service Mac (mécanique d'auscultation des conduits).
Utilisant une technique similaire, l'essai Dynarad est quant à lui spécifique au contrôle de l'assise des radiers. Recommandées par l'Aftes (association française des tunnels et de l'espace souterrain) et l'Astee (association scientifique et technique pour l'eau et l'environnement), ces méthodes présentent de surcroît l'avantage d'être utilisables sur des surfaces immergées, les réseaux étant rarement hors d'eau lors des inspections. Non destructives, elles peuvent dans un premier temps être mises en œuvre sur un grand linéaire afin d'en déterminer les hétérogénéités, pour être complétées par la suite par des examens plus ciblés au droit des secteurs problématiques. Des carottages ou des mesures de perméabilité à l'infiltromètre permettront d'apprécier l'état de dégradation de la conduite. Sondes gamma-gamma, sondages pédologiques et essais au pénétromètre renseigneront sur la nature et la compacité de l'encaissant. Enfin, des mesures de pendage et des relevés topographiques q ualifieront le profil et la stabilité du tronçon.
« Pour des raisons financières, ces inspections ne sont pas toutes réalisées et le diagnostic se limite souvent à une inspection télévisée », déplore Christine Bonvallet, chargée d'études à l'Office international de l'eau. Grave erreur, car c'est l'interprétation de ces investigations, enrichie des données relatives à l'environnement de l'ouvrage (contextes géologiques, hydrogéologiques et pédologiques, activités en surface, encombrements souterrains, chimie de l'effluent…), qui permettra d'établir le diagnostic, essentiel pour déterminer la cause des dysfonctionnements et ensuite dimensionner la technique de réhabilitation la plus efficace. « Ce diagnostic est capital pour le maître d'ouvrage, afin d'optimiser les moyens techniques et financiers et de garantir la durabilité des travaux qui s'en suivent », ajoute Amer Aflak, expert en hydraulique urbaine chez Safege. C'est donc faire un bien mauvais calcul économique que de s'affranchir de certaines de ces études préalables. Au final, le risque est grand de voir les problèmes réapparaître rapidement après réhabilitation, leurs causes n'ayant été ni identifiées ni traitées.