Par Gilles Malamaire, chargé de mission Évaluation de techniques innovantes à l’Agence régionale pour l’environnement & l’écodéveloppement.L’Agence régionale pour l’environnement est une agence publique dont la vocation est l’accompagnement des collectivités sur des thématiques environnementales. Concernant l’assainissement, l’Arpe assure notamment la mission d’assistance technique à l’exploitation des stations d’épuration (Satese) pour le compte des départements des Bouches-du-Rhône, du Var et du Vaucluse. La diversité et le nombre d’installations suivies lui permettent d’avoir une bonne connaissance des techniques d’épuration employées et leur efficacité dans le temps et d’orienter le choix des collectivités bien souvent un peu démunies face à la multiplicité des procédés existants. L’Arpe intervient notamment pour des installations publiques d’assainissement semi-collectif, dont les capacités peuvent être comprises entre 20 et 100 équivalents-habitants (EH). À l’heure actuelle, ces installations représentent une cinquantaine de stations dans les trois départements où elle assure la mission de Satese. Parmi ces sites, 20 sont équipés de filtres plantés de roseaux (FPR). L’Arpe suit ce procédé depuis plus de dix ans et a réalisé dans ce cadre un dossier technique téléchargeable sur son site internet.Dans un FPR, les eaux usées brutes, après avoir subi un dégrillage, sont envoyées vers des massifs filtrants plantés de roseaux, constitués de graviers de plus en plus grossiers. Les eaux filtrées sont drainées et le plus souvent dirigées vers un second étage de filtres constitués de matériaux plus fins. Pour éviter le colmatage des filtres, améliorer leur aération et créer des conditions favorables à la biomasse épuratrice, des roseaux sont plantés en surface des massifs filtrants. Adaptés jusqu’à 2 500 EH lorsque le foncier disponible le permet, les filtres plantés présentent pour l’Arpe les meilleures performances parmi les techniques proposées en assainissement semi-collectif en termes d’efficacité épuratoire, de simplicité d’exploitation, de nuisances potentielles, de coûts d’exploitation et d’acceptation des variations de quantités et de types d’effluents à traiter. En effet, en assainissement collectif et semi-collectif, les rejets dans le réseau d’assainissement sont beaucoup moins maîtrisés qu’en non collectif où les usagers sont seuls responsables de leurs rejets.Séduit par la simplicité de l’exploitation du FPR et dans un souci d’harmonisation avec d’autres stations de ce type déjà implantées sur le secteur, le Sivom du Haut Calavon a installé en 2005 un FPR classique de 40 EH dans le hameau des Jonquets (40 EH) à Caseneuve (84). Exploitée en régie par la communauté de commune du Pays d’Apt-Luberon, cette station fournie d’excellents rendements épuratoires depuis sa mise en service. Les bilans de fonctionnement réglementaires montrent que les charges polluantes reçues ne dépassent pas 25 % de la capacité de la station. Cette sous-charge pourrait poser problème pour d’autres types de procédés, mais pas pour le FPR. En outre, les bilans réalisés sur des filtres de capacité supérieure montrent que ces rendements (supérieurs à 98 % pour la pollution organique biodégradable) sont maintenus même lorsque les charges à traiter augmentent.Dans le FPR des Jonquets, après plus de onze ans de fonctionnement, aucune boue d’épuration n’a encore dû être évacuée. À efficacité équivalente, cela n’aurait pas été le cas pour d’autres procédés d’épuration. Ceci s’explique par le stockage et la minéralisation (dégradation) des boues qui s’accumulent à la surface des filtres du premier étage. Ainsi, pour des FPR dont le taux de charge est plus classique, une évacuation des boues est prévue tous les dix à quinze ans. Ici, vu les faibles charges reçues, le premier curage sera encore plus tardif.Pour des raisons économiques ou d’implantation, il existe des variantes plus compactes : filière à un étage avec ou sans recirculation, avec ou sans infiltration, filière à deux étages superposés, filière à un étage partiellement saturé… Le choix dépend alors du contexte local car leurs performances peuvent être moindres que la filière classique. La commune de Roussillon (84) a ainsi opté en 2006 pour un FPR à deux étages superposés dans le hameau des Ferriers (60 EH). Cette station qui appartient aussi à la communauté de communes du Pays d’Apt-Luberon donne de très bons résultats. Notons cependant que le taux de charge organique est lui aussi très faible et ne dépasse pas 15 % de sa capacité de traitement. Le surdimensionnement des filières est en effet très fréquent pour ces petites capacités. Il résulte d’une tendance des élus à opter pour une marge de sécurité importante, anticipant une augmentation de la population. Cette stratégie qui s’avère souvent inutile est d’autant plus dommageable que les subventions de l’agence de l’eau sont proportionnelles à la population réellement raccordable au moment de la construction de la station d’épuration. Aussi l’Arpe, dans son rôle de Satese, conseille-t-elle aux collectivités de limiter la capacité épuratoire des nouvelles stations à construire et, si besoin, prévoir une réserve foncière, en cas d’augmentation importante du nombre de raccordés.