L’Irstea vient de publier les conclusions de son étude de suivi in situ des installations d’ANC en France. Verdict : seulement cinq dispositifs sur 21 seraient satisfaisants en terme de qualité de l’eau.
Seuls cinq dispositifs d’assainissement non collectif qualifiés sur 21 sont satisfaisants quant aux seuils de référence « qualité de l’eau ». Il s’agit des résultats d’une étude menée entre 2011 et 2016 par l’Institut national de recherche en sciences et technologies pour l’environnement et l’agriculture (Irstea), sur le suivi in situ de ces installations. Des conclusions alarmantes, d’autant que « si l’on intègre aussi le critère "fréquence d’entretien", seuls trois dispositifs (sur 18 qualifiés sur les deux critères de qualité de l’eau et des opérations d’entretien) sont satisfaisants », précise l’Irstea. 250 installations ont fait l’objet d’un suivi, « afin d’évaluer la qualité des eaux usées traitées par ces dispositifs d’ANC pour être rejetées au milieu naturel », précise l’Institut. A noter qu’à ce jour, environ 50 dispositifs d’ANC sont agréés. « Cette étude, poursuivie en coordination depuis 2014 avec le Groupe National Public (GNP), a évalué une trentaine de dispositifs traditionnels ou agréés, dont une vingtaine ont pu être qualifiés selon deux critères : la qualité des eaux usées traitées (21 dispositifs qualifiés) et la fréquence des opérations d’entretien "curatif" (19 dispositifs qualifiés). » En cinq ans, 75.000 données ont été recueillies, auprès de 246 particuliers volontaires, après 1448 visites dans 22 départements français.
15 à 20 % des Français concernés
« Pour analyser la qualité des eaux usées traitées, nous avons créé un modèle à partir d’un logiciel de statistique connu, le logiciel R, qui nous a permis d’analyser simultanément les effets de tous les facteurs explicatifs. Quant aux informations recueillies sur l’entretien des installations, nous les avons exploitées via une méthode innovante, dite de logique floue, avec le logiciel FISPRO. Cet outil qui transforme des commentaires en données mathématiques nous a permis de qualifier et comparer les données liées à l’entretien des différents dispositifs d’épuration », détaillent Catherine Boutin et Yves Le Gat (Irstea) dans le rapport d’étude. D’après l’étude, « le CFSF (cultures fixées sur support fin) est aussi performante que la famille CFI (cultures fixées immergées), tout en étant moins contraignante en termes de fréquence d’entretien "curatif". La famille CL (cultures libres) est la moins performante tout en étant la plus contraignante en termes de fréquence d’entretien "curatif" ; (...) les filières les mieux classées simultanément en termes de qualité de traitement et d’entretien "curatif" sont deux filières de la famille CFSF : "sable" et "végétaux". » Enfin, les dispositifs, les mieux classés en terme de qualité des eaux usées traitées et de la fréquence d’entretien "curatif", sont trois dispositifs de la famille CFSF : à savoir, le filtre à sable traditionnel de la filière « sable », le dispositif étudié de la filière « végétaux », et l’un des deux dispositifs étudiés de la filière « copeaux de coco ». « Suivent deux dispositifs de la filière "lit fixe" de la famille CFI : qualité des eaux usées traitées "acceptable" mais fréquence d’entretien "curatif" inacceptable. Ces 5 dispositifs sont les seuls à délivrer une eau usée traitée de qualité acceptable », conclut l’Irstea.
Alors que les Assises de l’assainissement non collectif (ANC) s’achèvent ce 14 septembre à Limoges, ces résultats lancent un pavé dans la mare. 12 à 15 millions de Français, soit 15 à 20 % de la population, ne sont raccordés à aucun réseau d’assainissement collectif, et sont donc concernés. Environ cinq millions d’installations « assurent le traitement des eaux usées des habitats individuels et petits groupes d’habitats », représentant un coût moyen de 9.000 euros en 2017.
Une analyse peu fiable selon l’IFAA
En juillet dernier, l’IFAA, syndicat des professionnels de la filière de l’ANC, mettait en doute les méthodes utilisées par l’Irstea pour mener cette étude. L’IFAA estime notamment que « les paramètres pris en compte ne sont pas réglementaires (…), que les ratios DCO/DB05 retenus ne sont pas applicables en ANC, ou encore que les prélèvements ponctuels réalisés ne sont pas fiables en ANC : seuls des échantillonnages composés sur 16 ou 24 heures auraient été acceptables, (…). » Le syndicat concluait alors que « les données collectées et leur analyse ne sont pas fiables ni représentatives du fonctionnement de dispositifs ANC. On ne peut dès lors accorder la moindre valeur aux conclusions qui en sont tirées. » Croisé lors des Assises nationales de l’ANC, le président de l’IFAA a confié à Réseaux VRD qu’il communiquerait sur le sujet le 4 octobre prochain.