Étape essentielle pour distribuer une eau exempte de maladie liée à la présence de micro-organismes pathogènes (bactéries, virus ou parasites protozoaires), la désinfection de l’eau potable s’effectue à l’aide de plusieurs techniques. Les principales, désinfection au chlore, à l’ozone et par rayonnement ultraviolet, pourront être utilisées séparément ou couplées, selon la qualité de l’eau brute.
Chaque type de désinfectant a ses particularités. Réactif chimique historiquement utilisé sous forme gazeuse ou liquide pour la désinfection de l’eau, le chlore est particulièrement efficace sur l’élimination des bactéries et des virus. Une de ces caractéristiques, la rémanence, lui permet de maintenir durablement son effet sur l’eau. Cette propriété, qui garantit la qualité bactériologique de l’eau dans le réseau de distribution jusqu’au robinet du consommateur, a hissé le chlore comme l’un des désinfectants les plus utilisés en France. Son emploi n’est cependant pas obligatoire et certaines villes, qui possèdent une qualité d’eau brute exceptionnelle comme Grenoble et aujourd’hui Mulhouse, s’en passent. Quant à l’ozone, il s’agit d’un oxydant puissant qui possède un effet bactéricide sur les virus et les bactéries.
Mais ces deux réactifs chimiques ont un inconvénient. En présence de matières organiques, ils sont susceptibles de former des sous-produits indésirables ayant des risques sanitaires : bromates, pour l’ozone, et trihalométhanes (THM) et acides haloacétiques (AHA), pour le chlore. En outre, ils sont peu efficaces sur les parasites, notamment sur les oocystes de Cryptosporidium.
Efficace pour l’inactivation de tous les micro-organismes et plus particulièrement les kystes de protozoaire (Giardia et Cryptosporidium), la désinfection par rayonnement UV respectant la réglementation n’engendre pas de sous-produit dommageable. En revanche, comme l’ozone, les UV n’ont pas d’effet rémanent.
Dans cette panoplie de techniques, chaque réactif a ses avantages et ses inconvénients. Le choix de l’exploitant reposera donc sur des critères liés principalement à la qualité de l’eau brute et à des considérations économiques liées au coût du traitement. Ainsi, le Syndicat des eaux d’Île-de-France (Sedif), qui se singularise en France par son périmètre de distribution, a choisi d’équiper ses trois principales usines alimentées en eau de surface (Choisy-le-Roi, Méry-sur-Oise, Neuilly-sur-Marne) d’une multibarrière de désinfection utilisant du chlore, de l’ozone renforcée récemment par un traitement aux UV. En outre, la filtration sur sable participe également à l’élimination des parasites en jouant un rôle de barrière. « Les différentes étapes de traitement ont des actions spécifiques et complémentaires sur les micro-organismes. Nous avons mis en évidence la très bonne efficacité des ultraviolets (UV) sur les parasites en complément de la clarification, de l’ozonation et de la chloration sur les virus et de l’ozonation, les ultraviolets et la chloration sur les bactéries. Le Sedif a donc choisi d’appliquer un concept de multibarrières, au cas où l’une d’entre elles présenterait une perte d’intégrité, même momentanée », précise Christophe Perrod, directeur des services techniques du Sedif.
Le syndicat vise encore le renforcement de ce concept en équipant l’ensemble de ses usines d’un traitement supplémentaire par osmose inverse basse pression. Grâce à une eau exempte de matières organiques, il pourra alors envisager de supprimer le résiduel de chlore en réseau qui protégeait jusqu’à présent l’eau en distribution contre de possibles contaminations.
Cet article est l’introduction du dossier d’avis d’experts "Eau potable : quelle désinfection pour garantir la qualité bactériologique ?", publié dans le numéro 254 d’Hydroplus. A venir : - La première partie : "La bonne place de la chloration dans le traitement de l’eau potable", parDavid Mariet, responsable traitements en continu de Cifec, publiée le jeudi 30 avril. - La seconde partie : "Mulhouse choisit le traitement par ultraviolets de l’eau potable", par Alain Nguyen, responsable commercial chez Bio-UV Group, publiée le lundi 4 mai. - La troisième partie : "Vers une eau pure, sans calcaire et sans chlore", par Christophe Perrod, directeur général des services techniques du Sedif, publiée le mardi 5 mai.