Piloté par l’école des Ponts ParisTech (ENPC), Roulépur s’est intéressé à la performance de plusieurs dispositifs de gestion à la source des eaux de ruissellement de voiries et parkings urbains sur la maîtrise des flux de micropolluants. La filtration par un substrat végétalisé, des parkings perméables végétalisés et des noues filtrantes, s’avère particulièrement efficace.
Le laboratoire Eau environnement et systèmes urbains (Leesu-ENPC-Upec) en collaboration avec deux équipes de recherche (Cerema-Team, UMR Epoc), trois collectivités (Ville de Paris, conseils départementaux de Seine-Saint-Denis et de Seine-et-Marne) et deux partenaires privés (Ecovégétal, Saint-Dizier Environnement) a mené entre 2015 et 2019 le projet Roulépur. Issu de l’appel à projets de l’Agence française de la biodiversité, il est consacré à la maîtrise à la source des micropolluants des eaux de ruissellement sur voiries et parkings urbains. Quatre types de dispositifs basés, ou non, sur l’infiltration, ont été étudiés : un dépollueur compact (Stoppol), des filtres à sable horizontaux non infiltrants, un parking perméable végétalisé (Evovégétal) et un ensemble d’accotements filtrants et de noues filtrantes.
Deux sites enregistraient une forte pollution liée au trafic (les voies sur berges parisiennes équipées du Stoppol, une route départementale à Compans proche de l’aéroport Charles-de-Gaulle pour les noues), tandis que les deux autres étaient représentatifs d’un trafic modéré (une voirie de Rosny-sous-Bois équipée de filtres à sable et le parking perméable construit en zone résidentielle à Villeneuve-Le-Roi). En entrée et en sortie de ces dispositifs, quatre familles de micropolluants ont été analysées (métaux, HAP, alkylphénols et phtalates), présentant des propriétés chimiques et des affinités pour la phase particulaire variées. Les résultats montrent, globalement, une meilleure performance d’abattement des micropolluants dans les ouvrages filtrants, y compris avec des effluents très chargés. Ces processus de filtration par un sol végétalisé permettent d’obtenir un très bon abattement de la pollution particulaire (matières en suspension), mais une efficacité plus limitée sur les micropolluants en phase dissoute. L’abattement en volume est maximal dans le cas des ouvrages végétalisés très diffus (parking perméable et noues) et l’abattement en masse est fortement conditionné par celui de volume. Preuve qu’il est important d’agir sur les volumes ruisselés et pas seulement sur les concentrations et de veiller à un dimensionnement suffisant les ouvrages.
Comme le souligne Marie-Christine Gromaire, directrice de recherche au Leesu qui a piloté ce projet, « les solutions techniques doivent être choisies au cas par cas en fonction du contexte local, surface urbaine à drainer et potentiel polluant, mais également de la capacité du gestionnaire à entretenir ses ouvrages. On favorisera une filtration par un sol ou un substrat végétalisé pour une rétention plus efficace des polluants dans les premiers centimètres de sol. Ce type de dispositif basé sur la nature est bien adapté aux ruissellements peu chargés mais nécessite une mise en œuvre très diffuse pour obtenir un abattement en volume important ». L’étude a en outre identifié un risque de contamination des eaux en sortie par les matériaux de construction utilisés tels que les membranes d’étanchéification ou les drains.
Par ailleurs, dans le cadre de l’Observatoire des polluants urbains en Île-de-France (Opur), le Leesu coordonne la rédaction du guide « Infiltrer les eaux pluviales, c’est aussi maîtriser les flux polluants », publié au printemps 2020. « Ce guide s’appuie sur les conclusions de la thèse soutenue en 2017 par Damien Tedoldi sur les risques de contamination des sols et des nappes liés à l’infiltration des eaux pluviales dans les techniques alternatives », rappelle Marie-Christine Gromaire. Ces travaux menés sur dix sites expérimentaux d’Île-de-France (petits bassins d’infiltration, noues d’infiltration, bandes enherbées) ont mis en évidence une accumulation des polluants conservatifs (métaux, HAP) dans les sols au cours du temps. « Ce qui pourrait conduire sur certains ouvrages, et sur des zones circonscrites à l’arrivée des effluents, à changer la couche superficielle de sol (les 50 premiers centimètres) au bout de quinze ans. Cependant, le niveau de contamination reste très inférieur à celui des sols pollués et cette intervention s’impose surtout pour restaurer la capacité de rétention du sol qui se sature progressivement », estime Marie-Christine Gromaire.