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Le ton se durcit entre Veolia et Suez

PUBLIÉ LE 4 NOVEMBRE 2020
FLORÉANE MARINIER
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Le ton se durcit entre Veolia et Suez
Auditionnés par les sénateurs le 3 novembre, le président du conseil d’administration de Suez Philippe Varin et le directeur général Bertrand Camus ont défendu leur position, hostile au projet d’OPA de Veolia.
 
« Si nous voulons que la France conserve son avance, elle doit éviter la disparition d’un fleuron français. Nous devons développer nos entreprises plutôt que de jouer aux mécanos industriels. » Bertrand Camus, directeur général de Suez, n’a pas été avare d’attaques envers son concurrent Veolia. Auditionné par la Commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat avec le président du conseil d’administration de Suez Philippe Varin, il relève le « moment surprenant choisi par Veolia, en pleine période de crise sanitaire » et reproche une « perte du sens des priorités. »
 
Un champion fragilisé
 
Pour rappel, Veolia a exprimé le 30 août dernier son souhait d’acquisition de 29,9% des parts de Suez auprès d’Engie, et le cas échéant, de déposer une « offre publique d’acquisition volontaire du solde des actions de Suez ». L’opération de cession, acceptée par Engie le 6 octobre, représente 3,4 milliards d’euros. Le PDG de Veolia, Antoine Frérot, expose alors son objectif de créer un « champion de la transition écologique ». Mais pour Bertrand Camus, ce rapprochement avec son concurrent ne fera que « transformer deux champions en super groupe endetté et affaibli. »
 
Les sénateurs ont exprimé leurs craintes quant à l’impact d’un tel rapprochement sur les activités et les salariés de Suez. Philippe Varin estime que 4.000 à 5.000 emplois seraient touchés, en plus des emplois indirects et du double au niveau mondial. Une appréhension partagée par les syndicats de Suez, auditionnés le 15 octobre. Dans une interview au Monde, publiée peu après l’audition, Antoine Frérot assure au contraire que « nous garantissons l’emploi et tous les acquis sociaux en cas de rapprochement avec Veolia, aussi bien que pour les actifs cédés pour cause de concurrence. »
 
La position de l’État dans les négociations a aussi été un sujet de discussion récurrent pendant l’audition. Selon Philippe Varin, la déclaration du Premier ministre Jean Castex le 3 septembre, jugeant que le rapprochement « faisait sens », a provoqué un « retard à l’allumage » dans les recherches d’autres investisseurs, même si le ministre de l’Économie Bruno Le Maire s’est montré plus nuancé. Cette intervention aurait eu des conséquences directes sur l’offre du fonds Ardian. Sa proposition, communiquée dans une lettre d’intention le 1er octobre, visait l’acquisition des actions détenues par Engie dans Suez à hauteur de 29,9% suivie immédiatement d’une offre publique en numéraire pour l’ensemble des actionnaires de Suez. Pour Philippe Varin, l’offre n’a pu être concrétisée faute de temps.
 
Dialogue impossible
 
S’il y a bien une chose sur laquelle les deux groupes tombent d’accord, c’est l’impossibilité d’un dialogue dans de telles conditions. Dans son interview au Monde publiée mardi, Antoine Frérot reproche à Suez d’avoir franchi des « lignes rouges », dont « la création d’une entité opaque pour rendre inaliénable Suez Eau France ». Cette fondation créée aux Pays-Bas ne serait, pour Philippe Varin, rien de plus qu’un « outil de négociation », qui peut être dissout à tout moment. À la question sur la solidité de la direction de Suez, il assure que le conseil d’administration « partage la même boussole » ; pour Antoine Frérot, il constitue « le seul obstacle à l’OPA » qui sera lancée « dès l’instant où le conseil d’administration de Suez, quel qu’il soit, aura donné un avis favorable ».
 
Le Sénat devra encore auditionner ce soir le président d’Engie Jean-Pierre Clamadieu, avant de recevoir Antoine Frérot le 10 novembre. Il a également lancé un comité de suivi sur les conséquences économiques et environnementales du rapprochement entre Veolia et Suez, constitué de quatre rapporteurs venant de la Commission des affaires économiques, et celle de l’aménagement du territoire et du développement durable.
 
Bertrand Camus et Philippe Varin auditionnés au Sénat le 3 novembre / Capture d'écran
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