Emmanuel Macron, le 30 mars, dans les Hautes-Alpes. Crédit : DR.
Industrie, agriculture, lutte contre les fuites, nouveaux usages avec la REUT, tarification et adaptation au changement climatique. En cinq axes, le chef de l’Etat engage la France vers une réduction des usages de l’eau de 10% en 2030.
En direct de Savines-le-Lac dans les Hautes-Alpes, le président de la République a dévoilé le 30 mars les principales mesures du plan Eau attendu depuis le mois de janvier. Parmi les annonces, les agences de l’eau vont bénéficier d’une rallonge de 500 millions d’euros par an sur un budget d’environ 2 milliards. Cette enveloppe devra permettre de « mettre en œuvre » des mesures de réduction de la ressource. La Banque des Territoires et la Caisse des Dépôts sont appelées à lancer un plan sur les infrastructures pour faire face au sous-investissement chronique et lutter contre les fuites. « Le plafond de dépenses des agences de l’eau sera supprimé, ce qui permettra aussi de cofinancer, avec les collectivités, toutes les actions permettant de s’adapter aux conséquences du changement climatique », a poursuivi le chef de l’Etat. Pour ce faire, 180 millions d’euros sont confirmés chaque année pour financer des projets de renouvellement de réseau avec les collectivités. Les agences ainsi confortées dans leur rôle vont aussi pouvoir s’appuyer sur des intercommunalités « qui pourront définir les règles les plus adaptées aux usages ».
Sobriété et réutilisation des eaux usées traitées Les industriels sont aussi mobilisés avec une exigence de sobriété, en particulier pour les projets de production de batterie et d’hydrogène, particulièrement gourmands en eau avec une visée de sobriété et de réduction des usages de l’eau. Ce sont 50 sites qui sont identifiés comme porteur d’un gros potentiel et sur lequel un plan d’investissement pour économiser l’eau après identification par le ministère de l’industrie sera mis en place. Dans les nouveaux usages, Emmanuel Macron encourage le recours aux eaux pluviales et prévoit une aide aux collectivités pour aider les usages de réemploi des particuliers. Quant à la réutilisation des eaux usées traités (REUT), un objectif de 10% est visé (aujourd’hui autour de 1%) à travers le développement de « 1000 projets en 5 ans ». Ce sont au total 300 millions de mètres cubes qui seront réutilisés par an, promet le président, assorti du lever des verrous administratifs, présents sur ces usages. Le décret de mars 2022 n’avait en effet que partiellement répondu aux attentes des professionnels.
Adaptation de l’agriculture au changement climatique Sur le volet agricole, les nouvelles installations devront être adaptées au climat (sol et adapttion, diagonostic eau). Sur l’irrigation, 30 millions d’euros seront consacrés à l’innovation et à des modèles d’adaptation et de réduction de l’eau (goutte-à-goutte, sonde, etc.). Sur les bassines, le président préconise le stockage dans les sols et les nappes phréatiques, la restauration des haies ; les ouvrages existants pourront aussi être utilisés avec un impératif de partage de la ressource et une inscription dans un projet de territoire. « Ce sera aussi le cas pour les retenues conditionnées aussi à des changements de pratique agricole, a-t-il souligné. On va étendre les surfaces agricoles utiles irriguées avec des solutions innovantes car on ne doit pas plus prélever. » Ce sont 100 millions d’euros par an qui financeront les pratiques vertueuses agricoles.
Une gouvernance au plus près du terrain Quant à la « tarification de l’eau, elle pourra être progressive et facturée à un prix proche du prix coûtant pour les premiers mètres cubes, puis progressivement augmenté pour la consommation de confort » pour inciter à la sobriété. Sur le sujet de la gouvernance, le président prône une proximité avec les territoires et le respect des instances en charge de l’eau (élus, comités de bassin et agences de l’eau), et un certain pragmatisme « de la souplesse et de l’apaisement » dans l’application de la loi Nôtre et du regroupement des compétences eau lorsque les intercommunalités ne sont pas la bonne échelle. « Il faut peut-être mutualiser autrement, travailler en commun et trouver les bonnes solutions : nouveau syndicat possible, intercommunalité choisie avec comme cap une accélération des investissements qui reposent sur un modèle pluriel, sur l’intelligence des élus de terrain et la diversité du territoire », a-t-il conclu. L’Outre-mer bénéficiera en outre de 35 millions d’euros supplémentaires pour faire face aux investissements nécessaires sur leur territoire respectif.
Au final des mesures sans surprise qui confortent les instances actuelles, mais qui offrent aux élus une échelle territoriale, une adaptation locale à leur problématique, la possibilité d’opérer des synergies par bassin et de trouver des stratégies d’adaptation les plus pertinentes possibles à leur environnement.