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ÉNERGIE

[Tribune] Quelle place pour le photovoltaïque en France ?

PUBLIÉ LE 4 MARS 2021
JULIEN AUFFRET
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[Tribune] Quelle place pour le photovoltaïque en France ?
Julien Auffret, consultant en transformations à Darwin X. Crédits : DR
Julien Auffret, consultant en transformations à Darwin X, évoque les enjeux de la transition énergétique en se focalisant sur le photovoltaïque. « Il semble impossible à l’heure actuelle dans le cas de la France, de baisser les émissions de CO2 en remplaçant le nucléaire par du photovoltaïque », déclare-t-il.

Les énergies renouvelables connaissent une effervescence médiatique depuis quelques années. Les fournisseurs d’électricité proposent des offres dites « vertes », les entreprises communiquent sur la part d’énergie renouvelable dans leur mix électrique, les partis politiques débattent sur leur utilisation pour remplacer le nucléaire… L’encre qui a coulé sur le sujet n’a cependant pas permis de comprendre les réels avantages et inconvénients d’une de ses composantes majeures, le photovoltaïque. Contrairement à l’opinion de la majorité des Français, le photovoltaïque est la plus carbonée des énergies renouvelables. Son caractère intermittent présente également de nombreuses contraintes quant à son intégration dans le réseau électrique. L’utilisation de son vaste potentiel ne pourra se faire sans intégrer ces critères dans les décisions qui dessineront la transition énergétique de demain.

Le photovoltaïque a le potentiel d’être un ingrédient majeur du mix énergétique de demain

En France, l’énergie solaire qu’on serait en mesure de capter sur l’ensemble du territoire français représente 466 TWh, soit l’équivalent de la consommation annuelle d’électricité qui s’élève à 473 TWh en 2019. L’exploitation de ces gisements aurait un impact au sol limité en occupant environ 600km² soit 0,1% du territoire.

Autre atout majeur, l’énergie photovoltaïque est moins carbonée que les énergies fossiles. En prenant en compte l’intégralité de son cycle de vie, elle émet environ 20 fois moins de CO2 que le charbon et 8 fois moins que le gaz naturel pour une même production d’électricité.

Enfin, les matières premières nécessaires à sa construction ne sont pas un facteur limitant car relativement non polluantes et abondantes. Le principal composant des cellules photovoltaïques est le silicium, lui-même extrait du quartz. Deuxième élément le plus abondant de la croûte terrestre, il ne concerne pas l’exploitation de terres rares. La France était par ailleurs le 5ème producteur mondial de silicium en 2019.

Néanmoins, le photovoltaïque est loin d’être la solution miracle, surtout en France

Même si les émissions de CO2 du photovoltaïque sont très inférieures à celles des énergies à combustions, elle reste la plus émettrice des énergies bas carbones. Selon l’ADEME, elle émet en France environ 10 fois plus de CO2 que le nucléaire et entre 3 et 4 fois plus que l’éolien. L’empreinte carbone du photovoltaïque évolue cependant régulièrement à la baisse grâce à l’allongement de la durée de vie des panneaux solaires et à la diminution de l’énergie nécessaire à leur production.

Une autre contrainte de l’énergie photovoltaïque est son intégration dans le réseau électrique tout en le maintenant stable et équilibré. Un des éléments clés pour que le réseau électrique fonctionne est l’adéquation, exacte à chaque instant, entre la production (ou offre) et la demande. Le photovoltaïque est une énergie intermittente, c’est à dire très peu pilotable car dépendante des facteurs météorologiques. Elle produit de l’électricité entre le lever et le coucher du soleil, avec un pic autour de 13h et une production plus importante en été.

Cependant, la consommation d’électricité française reste élevée en fin de journée avec notamment un pic de demande à 19h et est plus forte en hiver du fait de l’utilisation du chauffage. Pour répondre à cette discordance il faudrait développer une capacité de stockage court terme et intersaisonnier. L’étude de l’ADEME sur « le potentiel du stockage d’énergie » montre qu’à horizon 2030, la capacité de stockage économiquement viable en France pourrait difficilement dépasser les 17 TWh, ce qui ne permettrait d’alimenter que la consommation française entre 5h30 et 6h30 du matin.

La récente collaboration entre RTE et l’IEA montre également que pour augmenter significativement l’utilisation du photovoltaïque, il serait nécessaire de trouver le moyen de continuer à stabiliser le réseau en termes de fréquence et d’inertie. Ce rôle est aujourd’hui tenu par les rotors des alternateurs des centrales électriques conventionnelles. Il faudrait donc adapter le réseau pour le décentraliser en créant des réseaux autonomes ou développer une technologie capable de le stabiliser sans les rotors actuels.

Finalement, quelle place pour le photovoltaïque en France ?

Si l’ambition est de baisser les émissions de CO2, il semble impossible à l’heure actuelle dans le cas de la France, d’arriver à ce résultat en remplaçant le nucléaire par du photovoltaïque. En revanche, son développement pourrait aider à remplacer l’utilisation des énergies fossiles qui alimentent certaines industries. Ceci nécessiterait des adaptations du réseau électrique actuel et une électrification des industries en question.

Si la stratégie est de remplacer le nucléaire par des énergies renouvelables, comme le fait l’Allemagne, on limite les risques liés à l’utilisation de cette énergie, les déchets radioactifs et la pollution liée à l’extraction de l’uranium. En revanche, on augmente considérablement les émissions de CO2. En Allemagne, produire un kilowattheure d’électricité génère 10 fois plus de CO2 qu’en France.
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