L’Union des transports publics réitère ses critiques sur la gratuité des transports urbains, à l’impact jugé dérisoire sur le trafic automobile et majeur sur les finances des services.
38% des usagers des transports publics – soit 9 points de plus qu’en 2016 – sont favorables à leur gratuité, selon les résultats de l’Observatoire de la mobilité 20181, présentés le 27 novembre par l’Union des transports publics (UTP). « La gratuité des transports publics est une vue de l’esprit, leur coût est une réalité », tranche l’organisation professionnelle (170 entreprises), qui dénonçait déjà en 2011 cette « fausse bonne idée ».
Effet d’aubaine pour l’usager
Sur ce sujet, qui sera amplement débattu lors du scrutin municipal de 2020, le vice -président de l’UTP, Frédéric Baverez, est déjà saisi par « une bonne quinzaine de maires demandeurs d’un argumentaire anti-gratuité ». La première justification réside dans l’absence de report modal significatif : selon l’étude d’Ile-de-France Mobilités publiée début octobre, la gratuité ne réduirait que de 2% le trafic automobile. C’est avant tout sur la marche et le vélo qu’empiètent des transports publics gratuits : « On les emprunte pour une ou deux stations là où se déplaçait à pied auparavant, note Thierry Mallet, président de l’UTP. Cet effet d’aubaine – cohérent avec le côté pratique des transports collectifs, mis en avant par une majorité d’usagers2 -, s’observe d’abord en zone centrale, quand tout l’enjeu est de développer des alternatives à la voiture en zone périphérique. En outre, l’intensification de la fréquentation sur des axes déjà saturés risque de dégrader le service », alerte le PDG de Transdev.
Selon la région Ile-de-France, la gratuité coûterait de 800 à 1.600 €/an et par foyer imposable. Quant à la hausse du versement transport (VT) acquitté par les entreprises, elle buttera sur le refus du Medef de « financer des mesures de démagogie électorale », assène Frédéric Baverez, président d’Effia. Les conclusions de l’étude sur la gratuité commandée par la ville de Paris sont attendues en décembre.
Paupérisation des services
Plus d’un voyage sur deux s’effectue déjà avec un titre à prix réduit (54% en 2018 contre 46% en 2016), rappelle l’UTP. La collectivité finance 68,4% du coût du ticket (par les impôts locaux et le VT) et l’usager 31,6% (hors remboursement de 50% par l’employeur). Les recettes commerciales des services totalisent 3,74 milliards d’euros (2,4 pour la RATP, 1,34 en régions) et les dépenses de fonctionnement 7,68 mds/an (3,45 et 4,23 mds). « Quand les opérateurs de transport se privent de 4 mds d’euros de recettes, ils privent les voyageurs de plus de 5 000 bus électriques », selon le dossier de l’UTP, qui juge la gratuité « anti-environnementale ». Avec des recettes commerciales3 nulles, « comment développer l’offre, au plan qualitatif ou géographique, qui permettra du report modal ? », questionne le vice-président Marc Delayer. Rappelant que l’UTP et la Fédération nationale des associations d’usagers des transports publics partagent la même opposition à la gratuité totale, Thierry Mallet souligne que cette option « mettra les opérateurs face à un risque d’impasse financière et de paupérisation des services ».
1 : Enquête réalisée en ligne en septembre 2018 auprès d’un échantillon représentatif de la population française, soit 1.501 personnes vivant dans une agglomération de plus de 50.000 hab. 2 : 46% des usagers utilisent les transports publics car ils sont pratiques, 26% car ils n’ont pas d’autre choix, 15% pour raison économique et 14% par motivation environnementale. 3 : La vente de titres, les impôts locaux et le VT financent à part à peu près égale les 12,6 mds d’euros/an que coûtent les transports collectifs (8 mds pour l’exploitation, 4,6 pour l’infrastructure).