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POLITIQUES

Climate Chance dévoile les « grands enseignements » de l'action climat en 2021

PUBLIÉ LE 6 DÉCEMBRE 2021
ABDESSAMAD ATTIGUI
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Climate Chance dévoile les « grands enseignements » de l'action climat en 2021
la baisse des émissions enregistrée en 2020 serait presque effacée par la reprise économique en 2021. Crédit : Pixabay
Énergie, industrie, transport ou encore bâtiment... L’association Climate Chance présente un bilan sectoriel qui permet de constater globalement la puissance d’action des acteurs non-étatiques, et le chemin à accomplir pour stabiliser les émissions mondiales.

Le monde sobre et durable post-Covid, ne verra pas le jour de sitôt ! Après les hourras suscités par la baisse historique des émissions mondiales en 2020 (- 5 % par rapport à 2019) entraînée par la crise sanitaire, la reprise économique dévoile désormais des profils régionaux distincts en matière d’évolution des émissions. Selon le récent rapport publié par Climate Chance, « en Europe et dans les Amériques, la forte baisse des émissions a accéléré la tendance structurelle à la baisse alors que la croissance des émissions des grands pays émetteurs asiatiques n’ont été que peu freinées »

La première conclusion dévoilée dans le rapport est peu rassurante pour le climat : la baisse des émissions enregistrée en 2020 serait presque effacée par la reprise en 2021. La levée des restrictions sanitaires s’est accompagnée fin 2020 par une relance économique. Ce redressement s’est rapidement traduit par une reprise des activités carbonées et un rebond des émissions carbone, observe Climate Chance. Quels enseignements climatiques en tirer par secteur ?

Les énergies fossiles ont toujours la cote

Le charbon est le principal facteur de l’augmentation des émissions liées aux énergies. Le recours à l’énergie fossile pour la production électrique trace « une frontière très nette entre les régions qui s’en détournent (États-Unis, Europe), où la reprise des émissions n’efface pas la baisse de 2020, et celles où le minerai noir a conservé le soutien des pouvoirs publics (Asie-Pacifique) ». D’après le rapport, il est attendu que la demande de charbon retrouve en 2021 le pic atteint en 2014, avec une croissance concentrée à 80 % en Asie, dont plus de la moitié en Chine : « 38,4 GW de nouvelles capacités au charbon y ont été installées l’an passé, soit près de 80 % des 50 GW des nouvelles capacités au niveau mondial, malgré les promesses de réduction de l’utilisation du charbon et l’engagement à la « neutralité carbone » de l’État chinois pour 2060 ».

Exit le charbon, pour laisser place au gaz naturel liquéfié. Les gouvernements du G7 miseraient sur une autre énergie fossile : le gaz, qui a reçu 16 milliards de dollars de financement public entre 2017 et 2019. Contrairement au charbon, le rapport prévoit une augmentation de la demande de gaz qui devrait se poursuivre pendant « une bonne partie du siècle, pour atteindre un pic en 2037, et devenir ainsi le combustible fossile dont la croissance est la plus longue ». La région Asie-Pacifique devrait être le moteur de la croissance de la demande.

… Les renouvelables tiennent le coup

Mais l’énergie renouvelable n’a pas dit son dernier mot. Les capacités installées des énergies décarbonées « ont atteint 2 800 GW en 2020, une augmentation record de 260 GW par rapport à 2019, près de 50 % plus élevée que celle de l’année précédente ». Même si les fossiles dominent les capacités installées, ce sont les énergies renouvelables « qui captent la majeure partie de l’augmentation ». Ce sont le solaire (127 GW) et l’éolien (111 GW) qui sont responsables de 91 % de cette croissance. La grande majorité des nouvelles installations se situe en Chine (49 GW de solaire, 72 GW d’éolien), suivie par les États-Unis (14 GW de solaire, 14 GW d’éolien) et l’Union européenne (19 GW de solaire, 10 GW d’éolien).

Cet engouement n’est pas prêt de s’arrêter puisque les engagements en faveur des énergies renouvelables se multiplient, notamment via les Power Purchase Agreements (PPA). Ces contrats signés par les entreprises contribueraient à l’installation de nouvelles capacités de production renouvelable tout en garantissant des revenus aux producteurs. Les PPA sont à l’origine de près de 10 % des capacités renouvelables installées dans le monde en 2019. Peu affectés par la pandémie, ces contrats connaissent un succès florissant : « 23,7 GW d’électricité d’origine renouvelable ont été contractualisés via des PPA par des acteurs privés en 2020, soit 18 % de plus qu’en 2019 », apprend-on dans le rapport.

L’électrification de l’automobile contrebalancée par la « puissance »

Les émissions du secteur routier auraient diminué de 6 % en 2020, selon l’AIE. Cette baisse est directement corrélée au ralentissement des activités à la suite de la pandémie de Covid-19. Alors que le marché de l’automobile a été fortement impacté, les véhicules électriques ont tout de même tiré profit de cette crise. Porté par les plans de relance étatiques et le durcissement des normes locales, des ventes de véhicules électriques ont connu une progression « de 42 % au premier semestre 2020 en Europe. Cette tendance s’est confirmée de manière éclatante avec une hausse de + 137 % sur l’ensemble de l’année 2020 sur le marché européen ». Néanmoins, le secteur de la mobilité reste majoritairement marqué par les combustibles fossiles. En effet, la part des VE dans le parc automobile mondial est encore très faible : « 0,9 % des véhicules en circulation dans le monde sont électriques, contre 0,7 % en 2019 ».

Les voitures électriques souffriraient par ailleurs de l’imaginaire de puissance. Avec une masse moyenne de près de deux tonnes, très supérieure aux moyennes des marchés français (1 240 kg) ou même américain (1 857 kg), près de deux VE sur trois vendues dans le monde sont des SUV ou des berlines. La croissance de ce segment « constituait la deuxième source d’augmentation des émissions de GES avant la pandémie, selon l’AIE », indique le rapport.

Une électrification timide des bâtiments

L’énergie thermique, utilisée pour le chauffage d’air et d’eau et la climatisation, compte pour 77 % de la consommation mondiale d’énergie des bâtiments. Cette consommation tributaire des énergies fossiles la rend responsable de près de 45 % des émissions d GES des bâtiments, ce qui représente près de 12 % des émissions mondiales. La part des renouvelables dans la consommation de chaleur des bâtiments progresse lentement (10,4 % en 2019), en étant principalement portée par l’électrification des systèmes de chauffage. C’est notamment les pompes à chaleur qui ont bénéficié de forts soutiens publics, qui répondent « à 5 % de la demande mondiale de chauffage des bâtiments ». En Europe, près d’1,6 million d’unités ont été vendues en 2020, dont près de la moitié en France (394.000 unités), en Italie (233.000 unités) et en Allemagne (140.000 unités), indique le rapport. Toutefois, cette dynamique se heurte aux subventions accordées au gaz. « Les politiques engagées par les États restent globalement timides et mettent davantage l’accent sur l’abandon des chaudières au fioul, quitte à subventionner les chaudières à gaz, toujours présenté comme un « bridge fuel » », précise le rapport.

En outre, le secteur de la construction n’a pas échappé à la crise sanitaire. Ce marché devrait croître de 5,7 % en 2021, mais il n’est toujours que « très peu encadré et réglementé du point de vue énergétique et climatique ». Néanmoins, les politiques nationales tentent de flécher les investissements, via les plans de relance, sur la rénovation énergétique. Dans de nombreux pays, comme la France et les États-Unis, apparaissent des législations pour rendre obligatoires certaines rénovations. « Cependant, le rythme semble encore trop lent au regard des enjeux », souligne Climate Chance.


Hydrogène, une clé de décarbonation de l’industrie

Les industries lourdes misent désormais sur l’hydrogène bas carbone pour entamer leur décarbonation. Pour rappel, 98 % de la production actuelle est « grise », c’est-à-dire en ayant recours à des combustibles fossiles, et les 2 % restant sont produits à partir de l’électrolyse de l’eau mais à partir d’énergie renouvelable. L’hydrogène « vert », produit par électrolyse de l’eau à partir d’électricité renouvelable, n’excède pas 0,3 % de cette production.

Si l’hydrogène vert était encore peu connu du public, l’année 2020 a marqué un tournant pour la filière. Les annonces d’investissements publics et privés font la part belle à cette énergie décarbonée : côté européen, le Portugal a annoncé 7 milliards d’euros et la France 9 milliards d’euros, pour atteindre une capacité de 6,5 GW d’électrolyseurs installée à l’horizon 2030. De l’autre côté de la Méditerranée, le gouvernement mauritanien et la société CWP Global ont signé un
protocole pour développer un électrolyseur d’une capacité de 30 GW, le Maroc et l’Agence internationale pour les énergies renouvelables (IRENA) ont signé en juin 2021 un accord visant à faire progresser le développement et la consommation d’hydrogène vert dans le royaume.
Les États-Unis ont prévu à leur tour d’injecter 64 millions de dollars pour le développement de 18 projets d’hydrogène vert.

Ce rythme des engagements gouvernementaux, est de bon augure pour la croissance de cette technologie de rupture qui bénéficiera au premier plan aux industries lourdes comme la sidérurgie. « L’hydrogène pourrait permettre de diminuer la consommation de charbon, combustible primordial pour la production d’acier, responsable d’une bonne partie des émissions du secteur », conclut le rapport.
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