À la métropole de Grenoble, 120 citoyens tirés au sort présentent plus de 200 propositions pour affronter le réchauffement climatique et atténuer ses conséquences sur le territoire alpin. Inspirée de la convention citoyenne nationale organisée en 2020, Grenoble Alpes Métropole a réuni de mars à octobre 2022 ses habitants dans une démarche participative faisant de ce territoire « la première métropole à avoir mis en place une convention citoyenne d’une telle ampleur ».
Durant huit mois, plus de 120 citoyens tirés au sort ont travaillé sous le regard d’un comité opérationnel et de trois garants de la Commission nationale du débat public (CNDP), sur deux thématiques principales : la réduction des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030 et l’atteinte de la neutralité carbone d’ici à 2050, à l’échelle de la métropole qui rassemble 49 communes, dont la ville de Grenoble. Toutefois, avant le travail de réflexion, une mise au point sur les enjeux climatiques est de rigueur. « Les études de l’Ademe ont montré qu’en France seulement 20 % des citoyens sont informés des questions du changement climatique. Nous avons veillé à la formation des citoyens tirés au sort durant un week-end d’acculturation pour leur expliquer les enjeux climatiques, les politiques publiques déjà engagées par la Métropole, en présence de spécialistes, de chercheurs et des universitaires », souligne Pierre Verri, Vice-président chargé de l’air, de l’énergie, et du climat à la Métropole de Grenoble.
Pierre Verri, Vice-président chargé de l’air, de l’énergie, du climat à la Métropole de Grenoble. Crédit : Grenoble Alpes Métropole
Après avoir été formés sur les enjeux environnementaux et sociaux, les citoyens ont élaboré un rapport proposant 219 actions, sur un total de 350, qualifiées de « prioritaires » et partagées entre 9 thèmes : Agriculture et alimentation ; Habitat aménagement et urbanisme ; Mobilité des personnes ; Consommation déchets et loisirs ; Production d’énergie ; Séquestration carbone et captation du carbone ; Action économique du territoire ; Sensibilisation-éducation-gouvernance ; Formation et emploi.
Aménagement éco-responsable
La thématique de l’habitat et de l’aménagement a inspiré de nombreuses propositions. Les citoyens proposent notamment d’accroître les travaux de rénovation énergétique en augmentant les aides financières à destination des plus précaires. Côté urbanisme, la convention citoyenne recommande « des aides financières plus favorables pour l’utilisation de matériaux biosourcés et décarbonés », particulièrement dans la rénovation que les habitants privilégient par rapport à la construction neuve. Des mesures déjà adoptées par la Métropole et qui seront renforcées comme nous l’explique Pierre Verri : « Dans notre dispositif, qui vient en complément de MaprimeRénov’, on propose des aides métropolitaines allant de 1000 à 11.000 euros pour accompagner les rénovations énergétique des logements. Puis nous avons vocation à soutenir la construction bas carbone à travers des primes de 1000 à 1500 euros pour l’intégration de matériaux biosourcés ».
Elle ne figure pas en tant que thématique à part entière, pourtant la ressource en eau a fait l’objet de différentes propositions, parmi celles-ci : l’installation des systèmes de récupération (récupérateurs d’eau sur les toits) et de réutilisation de l’eau et de circuit fermé (utilisation pour les jardins, sanitaires) ; l’utilisation des eaux de récupération pluviales et des eaux grises pour des usages d’arrosage potager, lavage du linge, toilette ; installation des revêtements drainants ainsi que des réducteurs de débit d’eau.
Mobilité et émissions de GES
À la page « mobilité », la convention veut créer une voie cyclable sécurisée Chronovélo périphérique « afin de créer des voies pour relier les villes périurbaines entre elles, sans que les cyclistes aient besoin de repasser par le centre de la Métropole » ; installer de parkings à vélo sécurisés et des arceaux ; ainsi que d’équiper tous les bus circulants hors agglomérations de porte-vélos.
Soucieux de lutter contre la pollution, les citoyens envisagent d’établir une évaluation des voitures en termes d’émissions de gaz à effet de serre (GES) avec un critère sur leur poids ; la modification des critères d’attribution de Crit’air en ajoutant le critère émission de CO2 ; et le remplacement des bus actuels par des bus moins émetteurs en CO2. L’aviation n’est pas en reste, la convention appelle à « imposer à l’aéroport de Grenoble-Alpes-Isère une réduction de ses émissions de CO2 de 10 % par an ». Un point qui « ne relève pas de la compétence métropolitaine, mais du Département », précise le Vice-président chargé de l’air, de l’énergie, et du climat.
Une filière de protéines végétales
En matière d’agriculture et d’alimentation, la convention citoyenne préconise de « développer des marchés de producteurs bios dans les quartiers populaires avec des prix abordables ». À l’image de l’affichage Nutri-Score et Planet-Score, celle-ci propose l’adoption d’un « étiquetage Qualité Carbone sur les produits locaux ».
Elle recommande également de soutenir les associations « de type foncière agricole ainsi que les organismes publics œuvrant à l’achat de terre agricole et l’aide à l’installation des jeunes agriculteurs à orientation environnementale (agriculture raisonnée et biologique) ». Par ailleurs, les conventionnaires demandent de « favoriser le développement d’une filière de protéines végétales dans la Métropole, et de permettre la vente de ces produits au marché, avec gratuité de l’emplacement ».
Que vont devenir ces propositions ?
Le Conseil métropolitain s’apprête désormais a examiné les 219 propositions citoyennes qui entrent dans le champ de ses compétences. Celui-ci va délibérer pour la mise en œuvre de chaque proposition formulée, lors d’une session prévue fin mars 2023. Quant aux propositions qui ne relèvent pas de la responsabilité de la Métropole, elles seront redirigées vers les instances compétentes : Département, Région, acteurs privés, ou l’État.
Pas question d’annuler des propositions de la convention locale. Ne voulant pas reproduire le couac de la convention citoyenne nationale – à l’issue de laquelle seules 10 % des recommandations citoyennes avaient été retenues par l’État – la Métropole a envisagé une « dernière option » pour les mesures « très complexes ou suscitant un débat important au sein du conseil métropolitain » : le recours au référendum citoyen.