À quoi cela sert-il de curer une rivière si c'est pour la repolluer avec les lixiviats des boues de curage ? C'est la question que pose l'Association de défense de la qualité de la vie dans la vallée de la Céphons et du Nahon ( ADQV), près de Châteauroux (Indre). Fin juillet, le syndicat local d'assainissement, le SIAVNC, son dossier de subventions bouclé, lance les travaux de curage de la Céphons, dont les sédiments ont accumulé sur 18 km les rejets chromés des mégisseries de la commune de Levroux jusqu'en 1999, date de la mise en route d'une station de déchromatage. « On n'est pas contre le curage, précise Bertrand Verbrugghe, trésorier de l'ADQV. On est contre la façon dont il est exécuté : entreposage des boues au bout d'un chemin sans garantie d'imperméabilité du sol (il faudrait 8 m d'argile, or on est en plein calcaire), écoulement possible des lixiviats vers la rivière rien qu'en actionnant une vanne, rotation de remorques non étanches, ouvriers sans masques, etc. » « On ne prend pas ces précautions car il s'agit de chrome 3, pas de chrome 6 », se défend la Ddaf, assurant que l'étude de terrain (cabinet Haskoning) conclut à une perméabilité de 10-8 m/s et que toutes les dispositions de l'arrêté préfectoral autorisant les travaux sont respectées : « Si les analyses révèlent des lixiviats pollués, ils seront pompés et évacués en step. » À cela se greffent des règlements de comptes personnels et politiques. « Le site d'entreposage est voisin du domicile de la présidente de l'ADQV », s'étonne le SIAVNC. Déboutée de sa plainte au tribunal administratif en 2006, l'association, soutenue par Indre Nature, a fait appel. « L'ancien maire de Levroux était mégisseur, voilà sans doute pourquoi cette affaire est restée une affaire de curage de rivière au titre de la loi sur l'eau, et non une affaire de pollution industrielle instruite par la Drire avec envoi en décharge de classe 1 aux frais du pollueur, comme le recommandait déjà une étude de 1994 », assène l'ADQV. Le syndicat, conseillé par le cabinet Huglo-Lepage, et surtout la préfecture, devra bétonner son argumentaire comme quoi il n'y avait pas lieu de classer le site ICPE.