C'est une certitude : les plantes participent à l'assainissement de l'air intérieur. Mais à quel degré exactement ? Car entre le discours des vendeurs de végétaux dépolluants et celui des scientifiques qui demandent davantage de temps pour affiner leurs études, c'est le grand écart ! Ce sont les chercheurs de la Nasa qui ont ouvert la voie. Dans les années 1970, ils constatent que la station spatiale habitée Skylab 3 renferme plus d'une centaine de composés organiques volatils (COV). Et puisqu'il n'est pas question d'ouvrir les fenêtres pour les chasser, les scientifiques vont s'atteler à mesurer la capacité d'absorption de certaines plantes.
Aujourd'hui, de nombreux écrits évaluent précisément les performances des végétaux : le formaldéhyde est décomposé à 90 % par l'aloès, à 86 % par le chlorophytum, à 80 % par le philodendron. Le lierre est le champion de la lutte contre le benzène, puisqu'il en élimine 90 %... « Toutes ces données viennent des travaux de la Nasa », tempère Damien Cuny, professeur à la pharmacie de Lille. « Je mets un bémol sur la manière dont les résultats des expériences ont été extrapolés. » Selon lui, les performances obtenues en laboratoires sont difficilement transposables dans la vie quotidienne, car les expériences sont réalisées avec des concentrations de polluants supérieures à celles constatées dans les bureaux et les logements. Pas question pour autant de jeter le bébé avec l'eau du bain.
Le laboratoire de botanique de Lille participe d'ailleurs activement au programme Phyt'Air qui, depuis 2003, cherche à affiner les connaissances. « Nous ne sommes pas encore capables de dimensionner une solution dépolluante, mais on peut déjà dire que les résultats sont positifs », estime Damien Cuny. Deux éléments jouent un rôle essentiel : le terreau et les micro-organismes, qui composent le sol et agissent comme des filtres ; les feuilles des végétaux, qui captent les polluants. « Des scientifiques allemands ont montré que le chlorophytum est capable de dégrader le formaldéhyde en acides organiques, acides aminés et sucre », illustre-t-on chez Plant'airpur, une association constituée pour promouvoir les effets bénéfiques des plantes.
Pendant que les études se poursuivent, reste à savoir comment utiliser dès maintenant les végétaux ! Tout le monde s'accorde sur un point : ils n'interviennent qu'après l'amélioration de l'aération et la réduction à la source des émetteurs de gaz polluants. Les entreprises spécialisées se risquent ensuite à quelques indications : « On considère qu'une belle plante est nécessaire pour 9 à 10 mètres carrés », explique Maxime Blanchard, le fondateur de la société Bioxygène. Pour le choix des végétaux, Biofiltre recommande de réaliser d'abord un diagnostic pour évaluer les polluants les plus présents. Mais on peut aussi jouer la carte de la polyvalence et opter « en premier pour le chlorophytum, qui dégrade le formaldéhyde, le toluène, le benzène, le monoxyde de carbone et le xylène », conseille Pierre Samson, président de Plant'airpur. Au contraire, les conifères qui rejettent des COV dangereux pour la santé, comme l'isoprène et le monoterpène, sont à bannir. « Mieux vaut des plantes qui ne fleurissent pas pour éviter les risques d'allergie », complète par ailleurs Damien Cuny. Dernier conseil : ne pas choisir des plantes trop touffues qui auraient plus de mal à capter les polluants.