Entre 2015 et 2017, le CNRS et le Max Planck Institute de Marburg en Allemagne, ont analysé des échantillons prélevés dans les caniveaux de Paris. 6.900 espèces de micro-organismes y ont été décelés, ce qui ouvre la voie à une nouvelle gestion des eaux urbaines polluées.
6.900 espèces de micro-organismes vivent dans les caniveaux parisiens. C’est la découverte surprenante faite par une équipe de chercheurs menée par le CNRS et le Max Planck Institute de Marburg (Allemagne), pour une étude publiée dans The ISME Journal mi-octobre dernier. « C’est en constatant une couleur caractéristique de l’eau des caniveaux (marron ou verte) et l’apparition de bulles, témoin d’une activité photosynthétique, que des chercheurs du laboratoire Biologie des organismes et des écosystèmes aquatiques ont soupçonné la présence de micro-algues dans les rues parisiennes », explique le CNRS dans un communiqué. Un constat qui a donné lieu à deux ans de recherches entre 2015 et 2017. « Ils ont analysé divers échantillons d’eau non potable (provenant de la Seine, du canal de l’Ourcq, des bouches de lavage et des caniveaux) afin de déterminer quelles espèces de micro-organismes y étaient présentes. »
A partir de 104 échantillons d’eau et de biofilms récoltés dans 90 caniveaux des 20 arrondissements de Paris, durant une période de précipitations, les chercheurs ont donc identifié 6.900 « espèces potentielles d’eucaryotes », dont une majorité de micro-algues. Parmi ces organismes également, des champignons, éponges ou encore des mollusques. « Plus étonnant, les analyses montrent que près de 70 % de ces espèces sont absentes des sources d’eau non potable », soulignent les chercheurs. « Les types de communautés changent en effet énormément d’un site de prélèvement à l’autre, ce qui suggère une origine probablement liée aux activités humaines et/ou une adaptation urbaine de ces micro-organismes. »
Les rôles écologiques des micro-organismes
Par ailleurs, les interactions entre ces différents organismes « pourraient avoir des rôles écologiques potentiellement importants mais non pris en compte dans les villes », à savoir, des rôles dans l’assainissement des eaux polluées et usées, le traitement des eaux pluviales, des déchets humains, ou des polluants et émissions des véhicules. Ainsi, le CNRS et le Max Planck Institute de Marburg supposent que ces organismes participent à « la purification de l’eau, au sein-même de la rue, à la manière de micro-stations d’épuration ». Ce qui « pourrait également constituer une niche pour la croissance et la dissémination des parasites et pathogènes », souligne l’étude. Cette piste va donner lieu à de nouvelles recherches : « Comprendre la composition et la dynamique des communautés de caniveaux est un nouveau sujet passionnant qui pourrait concerner la plupart des zones urbaines et périurbaines du monde. Des connaissances (…) qui pourraient être utilisées pour guider une planification et une action ciblée sur le nettoyage des rues, et sensibiliser le public et les touristes à la présence d’une vie de micro-algues dans les villes », conclut le rapport.