Selon le dernier rapport du Haut conseil pour le climat publié samedi dernier, le déploiement de la 5G pourrait faire « significativement » augmenter les émissions de carbone du secteur numérique en France.
Saisi par le Sénat en mars dernier, le Haut conseil pour le climat (HCC) a remis un rapport sur l’impact environnemental de la 5G. Ces nouvelles fréquences, mises aux enchères par l’État en novembre 2020, sont censées « augmenter le débit, réduire la latence et augmenter les réseaux possibles pour les réseaux industriels », résume Corinne Le Quéré, présidente du HCC, lors d’une conférence de presse en ligne. Pour l’instance, l’introduction de ces nouvelles fréquences est « susceptible d’augmenter les émissions à l’ensemble du territoire et à l’étranger », notamment à cause de l’utilisation des centres de données et du renouvellement plus rapide des terminaux (smartphones, ordinateurs etc.).
Le numérique représente 2% des émissions de carbone françaises (soit 15 MtCO2eq par an). Les terminaux cumulent à eux seuls 70 % des émissions de carbone du numérique. « Un autre quart est associé au développement des réseaux et datacenters (infrastructures) et un dernier quart provient de l’utilisation des réseaux et des datacenters », précise la présidente du HCC. L’utilisation de la 5G pourrait ajouter « entre 2,7 et 6,7 MtCO2 en 2030 », poursuit Corinne Le Quéré. Au contraire, les contributions de la 5G à la transition bas-carbone restent encore peu quantifiées. Il reste encore à faire les évaluations adéquates « pour dire si le potentiel est réel et ce qu’il faut faire pour le mettre en œuvre. » Le rapport souligne par ailleurs que son analyse « ne saurait se substituer à une évaluation complète de l’ensemble des impacts environnementaux (incluant l’empreinte matière), sanitaires, économiques, financiers et sociaux, qui aurait dû avoir lieu au préalable. »
Éviter le gaspillage
L’instance a établi trois scénarios de déploiement (variante haute, centrale et basse) en les comparant à deux scénarios de non-déploiement, basés sur la 4G et le WiFi. De ces scénarios, résultent cinq recommandations : éclaircir les enjeux en amont, imposer la maîtrise aux opérateurs (en mandatant l’Autorité de régulation des communications et des postes pour le cahier des charges), tenir compte des effets de la demande d’électricité et de ses implications sur le système d’échanges de quotas d’émission européen (SEQE), agir sur les émissions importées, et informer et sensibiliser les usagers, particuliers et entreprises aux bonnes pratiques pour éviter le gaspillage. Pour le HCC, il semble important d’impliquer les citoyens dans le processus, même si la proposition de la Convention citoyenne pour le climat d’un moratoire sur la 5G a été rejetée par le président de la République. Notamment pour pallier les « usages disproportionnés » comme le visionnage d’une vidéo sur son smartphone. « On parle de regarder au niveau de l’offre aux usagers. On n’encourage pas des offres qui mènent au gaspillage de l’énergie », précise Corinne Le Quéré.
Dans un communiqué, le Sénat « constate que cette évaluation n’a pas pu être remise au Parlement avant l’attribution des fréquences mobiles 5G » en octobre dernier. Il compte examiner la proposition de loi sénatoriale sur l’impact environnemental du numérique le 12 janvier, sans attendre la feuille de route interministérielle que le gouvernement devrait bientôt publier à ce sujet.