L’énergéticien teste actuellement un dispositif de production de biométhane à partir de Combustibles Solides de Récupération (CSR) sur sa plateforme de R&D GAYA, dans le Rhône. Une première mondiale.
En 2025, selon l’Ademe, 2,5 millions de tonnes de Combustibles Solides de Récupération (CSR) seront produits en France par an. Son étude sur « l’état de l’art de la production et de l’utilisation de combustibles solides de récupération », publiée en 2012, rappelle qu’en France le gisement est sous-exploité : « À l’heure actuelle, les quantités de CSR issus des déchets des ménages sont insignifiantes, et les quantités issues de déchets d’activités économiques sont de l’ordre de 0,1 million de tonnes par an ».
La plateforme GAYA, développée par Engie, a réussi à valoriser des CSR en produisant du biométhane. « Quand on parle de CSR, on parle de déchets qui, par essence, ont une composition très variable. Les CSR ont la particularité d’être un mélange de papier, de carton, de plastique, de mousse, de textile etc. Le challenge est de maîtriser cette variabilité de l’intrant tout en assurant des caractéristiques constantes en sortie pour avoir un gaz renouvelable substituable au gaz naturel », explique Alessandra Barba, responsable du Lab Biogaz, Biomasse & Déchet au ENGIE Lab CRIGEN interrogée par Environnement Magazine.
Créé en 2010, le projet GAYA co-financé par Engie et l’Ademe vise au départ à « démontrer qu’il était faisable de produire du biométhane à partir de biomasse. Aujourd’hui, la réalisation qui est une première mondiale, est de faire cette démonstration à partir de CSR », rappelle Alessandra Barba. Située à Saint-Fons (Rhône), dans la Vallée de la Chimie, la plateforme GAYA est conçue entre 2012 et 2017. Les premières injections de biomasse pour la production de gaz de synthèse sont réalisées en 2018, avant une première injection de biométhane à partir de biomasse forestière en 2019 et, enfin, la première production de gaz renouvelable à partir de CSR cette année.
Double procédé
Pour ce faire, la plateforme GAYA passe par un procédé de pyrogazéification et de méthanation. « Le CSR est introduit dans un réacteur de pyrogazéification. Le but est de dégrader cette matière pour produire un syngaz, décrit Alessandra Barba. Ce syngaz est composé d’hydrogène, de monoxyde de carbone, de dioxyde de carbone et de méthane - ce sont les composants majoritaires. Ces molécules vont réagir entre elles dans un réacteur catalytique de méthanation, de façon à augmenter la part de méthane produite. Le but de cette chaîne de procédés intégrés est à la fin d’avoir un substitut de gaz naturel produit à partir de ces déchets. »
Mais la plateforme n’a pas vocation à commercialiser ce produit ; ce sera le rôle de la future unité industrielle nommée « Salamandre », dont la construction est prévue au Havre (Seine-Maritime) à partir de 2023. « Ainsi, dès 2026, près de 70.000 tonnes par an de déchets non recyclables permettront de produire jusqu’à 150 GWh de gaz renouvelable soit l’équivalent de la consommation de 670 bus urbains. En outre, le procédé multi-énergies permettra également de produire environ 45 GWh de chaleur renouvelable pour servir des besoins urbains ou industriels », décrit Engie dans un communiqué. L’énergéticien s’est donné pour objectif d’atteindre 100% de gaz renouvelable dans le réseau d’ici 2050. « Selon l’Ademe, pour atteindre cet objectif, il est nécessaire d’avoir le développement de trois filières complémentaires : la filière méthanisation, la filière dont nous parlons aujourd’hui, et le power-to-gas. Celle qui couple pyrogazéification et méthanation représenterait 40% du mix total », résume Alessandra Barba.
(Article modifié le 21/12/12 après des précisions d’Engie Lab Crigen sur les CSR et sur le processus de pyrogazéification-méthanation)