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RECYCLAGE & RÉCUPÉRATION

Nicolas Defrenne : « La France est le seul pays à valoriser à une échelle industrielle les métaux critiques des cellules photovoltaïques »

PUBLIÉ LE 12 AVRIL 2023
PROPOS RECUEILLIS PAR ABDESSAMAD ATTIGUI
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Nicolas Defrenne : « La France est le seul pays à valoriser à une échelle industrielle les métaux critiques des cellules photovoltaïques »
Avec Envie2E Aquitaine, Soren utilise à Saint Loubès un procédé par délamination pour traiter les PV. Crédit : Soren
Abîmés, détruits ou simplement vieux, les panneaux photovoltaïques usagés sont expédiés vers des usines spécialisées pour leur recyclage. Comment s’effectue ce processus ? Quels matériaux peut-on valoriser ? Échange avec Nicolas Defrenne, directeur général de l’éco-organisme Soren, chargé de coordonner et organiser le traitement des PV usagés en France.

Malgré leur rôle crucial dans la transition énergétique, les panneaux solaires ont une durée de vie limitée et leur recyclage pose un véritable défi environnemental. Un challenge que relève Soren qui a récemment inauguré à Saint-Loubès (Nouvelle-Aquitaine) son usine de recyclage de panneaux photovoltaïques (PV). Nicolas Defrenne, son directeur général, nous explique les enjeux de cette filière et expose le traitement par délaminage, un processus unique au monde de récupération des matériaux contenus dans les PV, une spécialité de l’éco-organisme.
 
Nicolas Defrenne, directeur général de l’éco-organisme Soren. Crédit : Soren

EM : Quelles sont les tendances dans le secteur du recyclage des PV ?

Nicolas Defrenne : Premièrement, le marché du photovoltaïque est en croissance chaque année. Depuis 2019, on a enregistré une mise sur le marché autour de 105.000 tonnes et en 2022 on avoisine les 232.000 tonnes. Cette croissance profite au secteur du recyclage qui est en essor.

Il faut rappeler que les PV ont une durée de vie assez longue, aujourd’hui on collecte principalement des panneaux qui ont un défaut ou qui ont subi des dégâts à la suite d’épisodes météorologiques extrêmes ou éventuellement des panneaux issus de démantèlement de centrales pour des raisons de performance, mais qui possèdent encore un potentiel d’usage.

Lorsque nous avons obtenu le premier agrément en 2015, il n’y avait pas d’unité de traitement en France. Nous avons fait émerger une unité pendant cet agrément, aujourd’hui on travaille avec trois unités de traitement de rang 1 sur le territoire national, et une future unité qui va permettre de traiter une certaine fraction. On coopère également avec un partenaire en Belgique et un autre en Allemagne pour les cellules de technologie CdTe.

EM : Quelle est la complexité du PV et son processus de recyclage ?

Un panneau est principalement constitué de verre, mais ça reste un millefeuille composé de différentes couches successives autour desquelles il y a un cadre aluminium. Dans ces couches, nous allons trouver principalement du verre, une couche de l’EVA (Éthylène-acétate de vinyle), des cellules avec des soudures, une membrane, une boîte de jonction et des câbles.

La complexité du travail de recyclage réside surtout dans la séparation de la partie dite du « laminé » dans laquelle se trouve les principaux métaux. Faut préciser qu’un panneau est composé à 70 % de verre, 13 % de l’aluminium et 10 % de polymère, tandis que le silicium représente moins de 3 % et l’argent c’est environ 0,08 %. En termes de valeur, le silicium qui ne pèse que 3 % du poids c’est 38 %, et l’argent c’est 20 % de la valeur du panneau solaire. Ces deux éléments, qui représentent 60 % de la valeur, ont été longtemps mal recyclés en France, mais c’est désormais le seul pays dans lequel on valorise réellement à une échelle industrielle les métaux critiques des cellules photovoltaïques.
 
La complexité du PV réside dans ses différentes couches de matériaux. Crédit : Soren 

Cette avancée représente un véritable enjeu pour le secteur, car la transition énergétique n’est pas possible sans économie circulaire. C’est pour cette raison que nous insistons sur le recyclage à valeur ajoutée, c’est-à-dire de ne pas se concentrer uniquement sur la performance en pourcentage de la masse, qui est un critère important chez Soren et ses partenaires, mais de travailler également sur la valeur des éléments récupérés. Le recyclage n’est plus qu’un mode de traitement de déchets, c’est surtout un mode de production de matières premières.

EM : Qu’est-ce qui fait la renommée du site de Saint-Loubès ?

À Saint-Loubès, on utilise un procédé par délamination, c’est unique au monde à l’échelle industrielle. Avec ce procédé, on utilise une lame chauffée à 300 °C par une résistance électrique et on scalpe le verre du panneau pour récupérer une plaque de verre propre qui aura une utilité ultérieurement, et un verre laminé dans lequel on trouve l’EVA et les cellules. Ce laminé va subir un traitement aval avec un procédé de pyrolyse pour éliminer les polymères, puis un traitement par chimie douce afin de récupérer le silicium et des fils d’argent qui ont une valeur économique importante en termes de fraction.

En vitesse de croisière, ce site est capable de traiter 4000 tonnes par an, mais en doublant la ligne ce site pourrait augmenter sa capacité de traitement. Les appels d’offres de 2021 vont répondre à nos besoins d’ici à 2026-2027, parce qu’il y aura des montées en puissance. À l’horizon 2026, nous aurons de nouveaux appels d’offres et on réajustera notre capacité en fonction des besoins.
 
A Saint-Loubès, Soren utilise la délamination pour récupérer les principaux éléments du PV. Crédit : Laurent Julliand.

EM : Combien de panneaux traitez-vous ?

L’année dernière, nous avons traité près de 6 800 tonnes et 232.000 tonnes de panneaux ont été mis sur le marché, on se trouve donc au tout début de la vague. Pour accompagner la demande, Soren réfléchit déjà à répartir des unités sur l’ensemble du territoire et vise potentiellement une dizaine d’installations, c’est-à-dire que nous ferons plus de 200.000 tonnes par an. Ces implantations à l’horizon quinze ans seront au plus près du gisement et feront la première partie du traitement. Un nombre plus restreint d’opérateurs aval pourront traiter les fractions qui auront un faible poids mais beaucoup de valeur qui nécessitent une technologie et un investissement spécifique.

EM : Que deviennent ces panneaux après recyclage ?

On recycle 94 % du poids des panneaux solaires. Les éléments récupérés sont valorisés dans l’économie pour des applications adéquates. L’aluminium est refondu, vous pouvez le retrouver plus tard sous forme de canettes, de voitures, à nouveau dans un cadre panneau photovoltaïque. Le verre panneau solaire est beaucoup plus compliqué, car il contient de l’antimoine, un minéral toxique utilisé pour ajuster l’opacité du panneau, qui exclut donc son recyclage pour l’alimentaire. Toutefois grâce à notre procédé de délamination, on travaille à sa réintégration dans du verre solaire neuf.

Quant au silicium, il est plutôt transformé pour en faire du silicium métallurgique, car faire du silicium solaire reviendrait très cher énergétiquement même s’il est techniquement possible. Ce silicium part en aciérie pour contribuer à la production d’acier décarboné. Les polymères sont transformés en combustible solide de récupération et partent en combustible de substitution en cimenterie donc en valorisation énergétique.

EM : Soren prévoit-il la sensibilisation des particuliers qui seraient moins familiers avec ces enjeux de recyclage ?

Les particuliers représentent 10 % du gisement installé, avec des centaines de milliers d’installations domestiques. Nous sommes d’abord un éco-organisme spécialisé, on travaille avec les organismes professionnels pour faire ce relais, et on communique sur ces enjeux via les réseaux sociaux. On réalise également des baromètres depuis 2022 pour comprendre la vision qu’ont les Français du recyclage des panneaux solaires, et évaluer l’évolution de ces perceptions dans le temps. On essaie ainsi de s’adresser à l’ensemble des citoyens qui sont concernés par la transition énergétique, et naturellement la gestion de ces équipements en fin de vie fait partie de ces enjeux.

EM : Quels sont vos objectifs pour ce deuxième agrément ?

Nous avons deux objectifs principaux. D’abord, accompagner la montée des volumes, et surtout la mise en place du réemploi dans un marché où il y a une ambiguïté entre le marché de la seconde vie et l’export illégal avec des acteurs qui se sont fortement développés au sein de la filière au cours des deux dernières années. Pour nous, l’enjeu ces prochains mois c’est la lutte contre ces mauvaises pratiques.

À Soren, on promeut le marché de l’occasion et la seconde vie, mais il faut rappeler que c’est un produit qui a des particularités et qui nécessite des précautions. Un panneau solaire qui a vécu en extérieur lorsqu’il est démonté, c’est potentiellement parce qu’il présente un risque électrique ou de départ de feu, il y a un réel besoin de le recertifier afin de garantir la sécurité et la durabilité avant son utilisation dans une logique de seconde vie.
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