Assurant le développement de l'espace rural et la préservation des espaces affectés aux activités agricoles, le zonage A peut entraîner une perte de valeur foncière importante pour les propriétaires de terrains classés précédemment en zone constructible destinée à accueillir des activités ou de l'habitation. Ce classement a en effet pour conséquence d'interdire l'urbanisation dans ces secteurs (Rép. ministérielle à la question écrite n° 57014, JOAN, 7 sept. 2010). L'administration n'est pas liée, pour déterminer l'affectation future des divers secteurs de zone d'un POS ou d'un PLU qu'elle institue, par les modalités existantes d'utilisation des terrains, dont elle peut prévoir la modification dans l'intérêt de l'urbanisme (CE, 4 juil. 1980, Ste. Engreval, n° 14766, rec. CE, Tables, p. 927). Le classement en zone A doit se fonder sur l'utilité de la zone pour l'agriculture (CAA Bordeaux, 22 déc. 2009, n° 08BX03248).
Révision du PLU
Dans le cadre de la révision ou de la modification de son PLU, la commune peut donc classer en zone A des terrains qui présentent un potentiel agronomique, biologique ou économique, pour favoriser le développement de l'activité agricole ou la maintenir.
Il appartient aux auteurs d'un PLU de déterminer la partie d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de constructions. L'appréciation à laquelle se livrent les auteurs du plan lorsqu'ils classent en zone agricole un secteur qu'ils entendent soustraire à l'urbanisation, pour l'avenir, ne peut être discutée devant le juge administratif que si elle repose sur des faits matériellement inexacts ou si elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ou d'un détournement de pouvoir (CAA Marseille, 7 oct. 2010, n° 08MA04039).
Deux éléments essentiels à prendre en compte ressortent de la définition quant aux critères permettant la délimitation des zones A :
l'absence d'influence de l'équipement des parcelles sur leur classement en zones A ;
leur protection en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles.
La configuration des lieux interférera sur ces deux éléments, l'hypothèse de l'interdiction des constructions agricoles en zone agricole étant par ailleurs à cerner.
L'absence d'influence du degré d'équipement des parcelles sur le classement en zones A :
il importe peu que les parcelles soient équipées ou accueillent déjà des constructions non agricoles, dès lors qu'il ressort des termes de l'article R. 123-7 du Code de l'urbanisme que la zone A peut être « équipée ou non ».
l'équipement ne constitue pas un obstacle au classement en zone A dès lors que le classement en zone agricole correspond aux partis pris d'urbanisme visant à limiter le mitage et à densifier l'urbanisation.
Est légal le classement d'une parcelle qui faisait antérieurement l'objet d'un classement en zone UB au POS de la commune de Cornier, puis classée en zone agricole A du PLU, ladite parcelle n'étant pas construite, ni située dans l'un des trois pôles principaux d'urbanisation de la commune, mais à proximité d'un des secteurs construit, extérieur à ces pôles, dont cette dernière a justement souhaité limiter le développement. Si les requérants font valoir que la parcelle située à proximité de leur parcelle, qui n'était pas construite, et était également classée en zone UB au POS, a pourtant, quant à elle, été rattachée à la zone U située au lieudit les Moulins, il est constant qu'à la date de la délibération attaquée, un lotissement avait déjà été autorisé sur cette parcelle. La commune a donc pu, sans contradiction, inclure cette parcelle dans ladite zone U. Même si elle est située à proximité directe de ladite zone U et desservie par les réseaux, la parcelle classée en zone A n'est pas entourée de parcelles construites et se rattache à un secteur qui a conservé pour l'essentiel un caractère rural, cette parcelle étant encore récemment utilisée par un agriculteur. Dans ces conditions, en classant en zone A cette parcelle, le conseil municipal n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation (CAA Lyon, 29 juin 2010, n° 08LY00757).
Quel est le parti pris d'urbanisme ?
En procédant à la révision simplifiée du PLU de la commune d'Evette-Salbert, les auteurs du plan ont entendu promouvoir un développement urbain maîtrisé, tout en protégeant les espaces verts et naturels de la commune, en privilégiant l'urbanisation des poches libres afin de limiter l'étalement urbain. Les parcelles litigieuses sont situées hors du bourg, dans le prolongement d'une vaste zone agricole dont la destination n'est pas contestée. Si les parcelles situées à l'Ouest de ces terrains sont bâties le long de la rue de Valdoie, celle située à l'Est, également classée en zone agricole, ne sont pas bâties. Dans ces conditions, compte tenu de l'emplacement des parcelles litigieuses dans un vaste espace agricole, et alors même qu'elle pourrait être constructible, les auteurs du PLU n'ont pas entaché la délibération du 8 juillet 2008 d'une erreur manifeste d'appréciation en maintenant le classement desdites parcelles en zone agricole (CAA Nancy, 20 mai 2010, Cne d'Evette-Salbert, n° 09NC01102).
Les parcelles déjà équipées auront plutôt vocation à être classées en zone urbaine. Ont été jugés illégaux les classements en zones NC ou A suivants :
le classement de parcelles desservies par des réseaux d'eau et d'électricité, dans un secteur déjà ouvert à l'urbanisation (CE, 8 sept. 1995, Lambrein, DA, 1995 n° 652) ;
le classement en zone NC d'une parcelle jouxtant une route départementale, parcelle entourée à la fois au nord et au sud de constructions situées en zone NB, desservie par les réseaux d'eau et d'électricité et n'ayant aucun intérêt agricole, classement par ailleurs motivé par l'absence de raccordement au réseau communal (CAA Nantes, 30 déc. 1998, Taillandier, BJDU, 4/1999, p. 313) ;
le classement à proximité d'une zone en cours d'urbanisation et de nombreuses constructions (CE, 1er déc. 1993, Martinez, n°112948) ;
le classement en zone A d'une parcelle longeant une voie communale, bordée par des constructions sur deux côtés et desservie par les réseaux, dès lors que les terrains ne présentent aucun intérêt agricole (CAA Bordeaux, 22 fév. 2008, n° 05BX01785).
La configuration des lieux joue un rôle prééminent dans la délimitation des zones A, et surtout lorsque la zone revêt un caractère rural (CAA Lyon, 28 sept. 2010, n° 08LY00684), ou est intégré dans un vaste ensemble à vocation agricole (CAA Lyon, 28 sept. 2010, n° 08LY01619 ; CAA Lyon, 17 août 2010, Bassot-Bert c/Cne Saint Symphorien d'Ozon, n° 09LY00359).
Le classement en zone agricole est légalement justifié pour :
une parcelle située à la limite extérieure de l'agglomération, dans une zone principalement consacrée à l'agriculture, à proximité d'autres constructions et desservie par deux voies de circulation, compte tenu du nouveau parti pris d'urbanisation (CE, 19 juin 1991, Deschildre, n° 106460) ;
une parcelle, qui bien que bordée au Nord-Est par un hameau classé en zone urbaine UC et desservi par une voie de circulation, s'ouvre par ses autres côtés sur un vaste espace agricole (CAA Nantes, 18 déc. 2007, Cne de Treffin, n° 07NT01236 ; en ce sens également : CAA Bordeaux, 10 juin 2008, n° 06BX02549 ; CAA Douai 18 juin 2009 n° 08DA00787) ;
des parcelles en état de prairie, même si elles sont bordées au Sud en direction du bourg par des parcelles bâties, puisqu'elles ouvrent au Nord sur une vaste zone agricole qui constitue un élément de la coupure verte prévue au schéma directeur entre les agglomérations de Lyon et Givors (CAA Lyon, 12 oct. 2010, n° 09LY00823).
Potentiels agronomique, biologique ou économique
Valeur agricole des terres : sous l'empire des dispositions de l'ancien article R. 123-18 du Code de l'urbanisme, les zones agricoles NC étaient des zones « à protéger en raison notamment de la valeur agricole des terres ou de la richesse du sol et du sous-sol ».
La valeur agricole ne constituait que l'un des motifs de classement, le classement en zone agricole n'étant pas lié à la seule valeur agricole des terres, d'après la jurisprudence (CE, 22 av. 1992, Maubon, n° 107881 ; CAA Nantes, 18 déc. 2007, Boulzennec et Calvez, n° 07NT01122), le POS pouvant classer en zone agricole des terrains non exploités mais insérés dans un secteur à dominante rurale, quelle que soit la valeur agricole des terres (CAA Bordeaux, 30 déc. 2005, Cne d'Aslonnes, n° 02BX02119).
Le potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles ne fait pas l'objet d'une définition précise par l'article R. 123-7. En pratique, le potentiel « agronomique » ou « biologique » est plutôt associé aux zones de cultures, le potentiel économique étant davantage associé aux zones de pâture.
Absence de nécessité d'exploitation agricole : le classement de terrains en zone agricole n'est pas suspendu au fait qu'il fasse l'objet d'une exploitation agricole, la zone A n'étant pas nécessairement une zone faisant l'objet d'une exploitation effective (CAA Bordeaux, 30 déc. 2005, Cne d'Aslonnes, n° 02BX02119).
Un PLU peut classer en zone agricole des parcelles utilisables pour l'exploitation vinicole, alors même qu'elles sont équipées et que les propriétaires ont procédé à l'arrachage de vignes (CAA Bordeaux, 25 nov. 2008, Guichard, n° 07BX00639).
Le moyen tiré de ce que le classement d'une parcelle en zone agricole est illégal doit être écarté, dès lors qu'il ressort du dossier que le hameau est constitué de quelques habitations, de granges et entouré de terres agricoles, la parcelle étant incluse dans une zone agricole, nonobstant la circonstance qu'elle ne fait pas l'objet elle-même d'une exploitation agricole et qu'il n'y ait plus d'élevages bovins à proximité mais des cultures maraîchères (CAA Lyon, 15 déc. 2009, n° 07LY01107).
Le classement en zone A n'est entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation, s'agissant de parcelles qui ont fait l'objet d'un aménagement en pelouse pour l'agrément des habitations comprises dans la zone UC, ces parcelles étant libres de toute construction, et n'ayant pas vocation à être incluses dans ladite zone UC, alors même que, hormis un verger, elles ne font pas l'objet actuellement d'une exploitation agricole (CAA Lyon, 30 juin 2009, n° 07LY01843).
Zone tampon : le Juge administratif admet la possibilité d'aménager par l'intermédiaire d'une zone A une zone tampon entre une zone U et une zone N inconstructible (CAA Lyon, 30 juin 2009, n° 07LY01843). Par ailleurs, un zonage N ne s'oppose pas à l'exploitation agricole des terres (CAA Lyon, 30 juin 2009, GFA de la Garde, n° 07LY01840).
Combinaison des critères
Le plus souvent, le juge administratif combine les critères. La circonstance que des parcelles jouxtent une zone urbanisée et qu'elles ne constituent plus le siège d'une exploitation agricole n'est pas de nature à affecter leur classement en zone A d'une erreur manifestement d'appréciation, dès lors qu'il s'agit de parcelles non construites, situées dans une zone rurale, et qui ne sont pas enclavées dans une zone urbanisée, alors qu'il n'est pas établi qu'elles ne présentent pas un potentiel agronomique, biologique ou économique (CAA Lyon, 6 av.2010, n° 08LY00741).
Il en va également ainsi :
- de parcelles comprises dans une zone d'AOC, précédemment classées en zone NC du POS (CAA Bordeaux, 25 nov. 2008, n° 07BX00639) ;
- d'une parcelle à proximité immédiate d'une exploitation agricole, alors même que la parcelle est desservie par une voie de circulation et par les réseaux publics, compte tenu du partie d'aménagement, les terrains en question étant jusque-là classés en zone constructible (CE, 18 novembre 1998, Klein, n° 164090) ;
Un PLU peut comporter des sous-secteurs agricoles où les constructions agricoles sont prohibées. Les dispositions des articles R. 123-4 du Code de l'urbanisme, qui indiquent que le règlement du PLU détermine les occupations et utilisations du sol interdites, et les dispositions de l'article R. 123-7 du Code de l'urbanisme, ne font pas obstacle à la délimitation, à l'intérieur d'une zone A de sous-secteur où les constructions liées à l'agriculture sont interdites (CAA Lyon, 2 avril 2010, n° 08LY00340).
Si le PLU peut, dans les zones A, identifier les bâtiments agricoles existants dont le changement de destination est admis, il ne peut, en revanche, délimiter, au sein des zones A des microzones N (naturelles), englobant au plus près de tels bâtiments, pour lesquelles sont admis leur changement de destination ainsi que leur extension (CE, 31 mars 2010, Cne. de Châteauneuf du Rhône, n° 313762).
La commune de Châteauneuf du Rhône a, au sein de la zone A de son PLU, délimité sous forme de microzones naturelles, une trentaine de bâtiments ou groupes de bâtiments agricoles inutilisés en état d'abandon. Le règlement de ces zones N permettait la transformation en habitation de ces bâtiments, mais aussi leur extension afin de favoriser la densification de ces noyaux bâtis. La commune avait mis en oeuvre les dispositions de l'article R. 123-8 alinéa 1 du Code de l'urbanisme. Compte tenu de la vocation du zonage N, ce micro-zonage était entaché d'erreur manifeste d'appréciation. Cet arrêt va à l'encontre des réponses ministérielles antérieures qui avaient affirmé, à plusieurs reprises, la possibilité de créer des microzones N constructibles à l'intérieur des zones A.
Le nouvel article L. 123-1-5 14° du Code de l'urbanisme prévoit, dans sa rédaction adoptée par l'Assemblée nationale sur la base d'un amendement (n° 406) que « dans les zones naturelles, agricoles ou forestières, le règlement peut délimiter des secteurs de taille ou de capacité d'accueil limités dans lesquels des constructions peuvent être autorisées, à la condition qu'elles ne portent atteinte ni à la préservation des sols agricoles et forestiers, ni à la sauvegarde des sites, milieux naturels et paysages. Le règlement précise les conditions de hauteur, d'implantation et de densité des constructions permettant d'assurer leur insertion dans l'environnement et leur compatibilité avec le maintien du caractère naturel, agricole ou forestier de la zone ».
Il s'agit d'éluder la jurisprudence commune de Châteauneuf du Rhône, en permettant de délimiter des microzones N au sein de zones agricoles.