Les chercheurs tirent la sonnette d’alarme dans une récente étude publiée par le Wilson Center Polar Institute. Le réchauffement climatique pousse l’Antarctique vers de nombreux points de basculement, entraînant une réaction en chaîne qui serait désastreuse pour la biodiversité.

L’humanité n’est pas loin de franchir les points de basculement de l’Antarctique, alertent des scientifiques à l’occasion de la 43ème Réunion Consultative du Traité sur l’Antarctique (RCTA), tenue du 14 au 24 juin. Le groupe de travail composé de spécialistes de l’Antarctique ont averti dans un rapport produit par le Wilson Center Polar Institute et intitulé « Changement climatique et résilience de l’océan Austral », sur les conséquences néfastes des changements climatiques sur cette région polaire et « les effets en cascade qui pourraient se déclencher ».

Le rapport identifie notamment une transformation des processus naturels qui aura des impacts régionaux et mondiaux. « Le changement climatique pousse cette région polaire isolée, qui connecte tous les bassins océaniques et préserve l’habitabilité de notre planète, vers de nombreux points de basculement ayant des ramifications mondiales pour l’humanité et la biodiversité », expliquent-ils.

La menace climatique qui pèse sur ces processus naturels aura des répercussions importantes sur la vie marine et humaine dans le monde entie. Selon les conclusions publiées, cinq processus clés de l’océan Austral approchent des points de basculement climatiques avec des
dimension mondiales :

- La hausse des températures océaniques provoquant l’effondrement des barrières de glace et une élévation mondiale du niveau de la mer de plusieurs mètres ;
- Des changements dans la chimie de l’océan, entraînant une absorption accrue du dioxyde de carbone et l’acidification ;
- Des changements dans la séquestration régionale du carbone ;
- Des modifications dans la dynamique des écosystèmes et des espèces conduisant à une perte de la biodiversité et à une modification des processus biologiques.

« L’Antarctique atteint des seuils critiques. La protection des zones les plus menacées par le changement climatique, comme la péninsule Antarctique, nous aidera non seulement à y restaurer la biodiversité, mais renforcera également la résilience d’écosystèmes marins lointains. Elle nous permettra également de contrôler les effets à long terme d’autres facteurs de stress humains, comme la pêche. En préservant ainsi sa santé, nous préservons la nôtre. En renforçant sa résilience au changement climatique, nous renforçons la nôtre », a déclaré Andrea Capurro, chercheuse invitée à l’université de Boston et co-rédactrice du rapport.

Des recommandations face au changement climatique

Selon le rapport, la Commission pour la conservation de la faune et de la flore marines de l’Antarctique (CCAMLR), chargée de gérer et de conserver la vie marine de la région, pourrait mieux tenir compte du changement climatique « lorsqu’elle adopte des mesures dans le cadre du Système du traité sur l’Antarctique ».

Pour renfforcer la résilience de cette région polaire face au changement climatique, les scientifiques préconisent d’abord de renforcer la protection de ces habitats « par la création d’un réseau circumpolaire d’aires marines protégées tout autour de l’Antarctique ». Ensuite, d’intégrer des considérations sur le changement climatique dans les politiques de gestion de la pêche.

Ils souhaitent également que la CCAMLR encourage la mise en œuvre d’un programme de travail « en réponse au changement climatique afin de renforcer la résilience et d’intégrer le changement climatique dans toutes les mesures de conservation ». Ces derniers lui conseillent de renforcer le principe de précaution dans « ses processus décisionnels afin de prévenir des changements irréversibles pour les espèces qui se trouvent dans ses eaux ».

Par ailleurs, les spécialistes, qui ont lancé une pétition en ligne pour l’Antarctique, invitent les États membres de la RCTA à renforcer leurs efforts de conservation de cette région en créant un réseau d’aires marines protégées et coordonné à l’échelle mondiale. « Il est devenu évident que, dans le cadre de la gestion de la crise climatique, un réseau circumpolaire d’aires marines protégées dans l’océan Austral fera considérablement avancer, entre autres mesures, la science du climat et l’élaboration de politiques climatiques pour l’ensemble de la planète », conclue la chercheuse.