Les industriels qui possèdent des tours aéroréfrigérantes ou les gestionnaires de grands réseaux d'eau chaude sanitaire (hôpitaux, hôtels, salles de sport) sont en permanence à la recherche d'outils simples d'autocontrôle. L'ATPmétrie, mesure de l'adénosine triphosphate, est sans doute une réponse. Déjà connue en contrôle de surface dans l'agroalimentaire, cette technique a été affinée par LuminUltra Technologies, dont les kits d'analyse sont commercialisés en France par Aqua-Tools. Le principe est celui qui rend les lucioles luminescentes. Il s'agit d'hydrolyser l'ATP par une enzyme spécifique, la luciférase (molécule présente dans l'abdomen des lucioles), générant ainsi de la lumière. Cette émission de photons, mesurée par un luminomètre, est proportionnelle à la quantité d'ATP. Or l'ATP est une molécule indispensable à la vie microbienne, puisqu'elle constitue la première source d'énergie de tout organisme vivant sur terre. Sa présence témoigne donc de la présence de biomasse. Mieux, sa quantité est proportionnelle au nombre de micro-organismes (on admet qu'un picogramme d'ATP équivaut à mille bactéries). Jusqu'à présent, ces tests n'étaient pourtant que qualitatifs. L'intérêt des travaux de LuminUltra Technologies est donc de fournir un outil d'analyse fiable et quantitatif.
Le kit prévoit notamment un calibrage avec une dose fixe d'ATP garantissant que le réactif enzymatique est efficace : l'émission lumineuse est donc représentative de la concentration en ATP (exprimée automatiquement par un logiciel). L'atout de cette technique (qui s'applique aux bactéries filtrées) est aussi de répertorier tous les organismes viables, et pas seulement les bactéries cultivables comme dans le test normalisé pour les légionelles. Mais surtout, l'ATPmétrie a l'avantage d'être un test extrêmement rapide (une dizaine de minutes), peu cher (7 euros l'analyse) et utilisable par tout technicien. On peut donc multiplier les points de prélèvement sur un réseau et réagir très rapidement aux dérives. « Sur un réseau complexe, on peut repérer les zones infectées et les traiter, sans avoir à traiter tout le réseau. C'est un gain économique potentiel », souligne-t-on chez Aqua-Tools. Bien entendu, les tests servent aussi à contrôler l'efficacité d'un traitement, car ils sont insensibles à la présence résiduelle de biocides dans le réseau.
Pour le calcul du stress bactérien
L'ATPmétrie ne vient cependant pas se substituer aux contrôles réglementaires, ni même aux autres nouveaux outils de contrôle rapide comme la PCR (lire EM n° 1663 p. 78). Il s'agit avant tout d'un moyen complémentaire, plus rapide et moins coûteux. En effet, la technique n'est pas sélective, puisqu'elle contrôle tous les micro-organismes vivants. La mesure est donc toujours supérieure au nombre réel de légionelles. Mais l'expérience acquise par Aqua-Tools montre qu'elle est largement représentative des légionelles dans les réseaux sanitaires. Il a ainsi été déterminé que pour maintenir un taux de légionelles inférieur aux exigences réglementaires pour les tours aéroréfrigérantes, le seuil d'alerte en ATP devait être de 10 pg/ml.
On notera enfin que l'ATPmétrie peut être utilisée plus globalement qu'en seul contrôle sanitaire des eaux claires. En effet, on peut non seulement mesurer l'ATP des micro-organismes piégés sur un filtre (ATP intracellulaire représentatif des bactéries viables), mais également l'ATP extracellulaire dans l'eau (bactéries mortes ou à mort programmée). On peut donc définir le taux de stress des bactéries (l'ATP extracellulaire par rapport à l'ATP total). Cet indice est particulièrement utile en traitement des eaux usées pour estimer la bonne santé de la biomasse épuratoire ou repérer la source de leur stress.