L’initiative est unique en France. Dans les départements de la Drôme et de l’Ardèche, la Ligue de la protection des oiseaux et les entreprises locales se sont alliées pour protéger la biodiversité sur le territoire. Ils ont créé un club de la biodiversité, appelé Continuum, dont l’objectif est de proposer des projets concrets aux entreprises.

Comment dépasser la défiance réciproque entre entreprises et défenseurs de la nature, et encourager la coopération ? C’est la question que s’est posée Vivien Chartendrault lorsqu’il est devenu directeur de la Ligue de la Protection des Oiseaux Drôme-Ardèche. Face à l’urgence, le passionné de l’avifaune en est convaincu : « il faut se tendre la main ».  « Il n’y a pas les entreprises méchantes d’un côté et les gentils naturalistes irréprochables de l’autre », développe-t-il.

En 2015, il rassemble autour de la table 18 structures aux côtés d’Allain Bougrain -Dubourg, président de la LPO. Emerge progressivement l’idée d’un « club de la nature » local.  En 2017, Continuum est créé.

L’objectif : proposer aux membres des initiatives concrètes, collectives et individuelles en faveur de la biodiversité du territoire. Le projet est un succès. Aujourd’hui, il rassemble 37 membres de secteurs variés, allant de l’industrie à la construction, en passant par l’agroalimentaire. Et si le club a attiré de gros acteurs nationaux comme EDF ou l’Occitane, 80% des membres sont des petites et moyennes entreprises locales, comme Naturéal Constructions, les domaines viticoles Paul Jaboulet Aîné ou le producteur de four à bois Le Panyol.

Des actions clés en main

Continuum vise à pallier au manque d’offre en matière d’actions pour la nature. « Les entreprises font déjà des tas de choses bien :  elles agissent en faveur du sport, en soutenant par exemple les clubs locaux, la culture, la santé… Mais il y a encore peu d’investissement pour la protection la nature », observe Vivien Chartendrault. Non par manque d’intérêt, juge le représentant de la LPO, mais parce que les projets concrets manquent. Un constat partagé par Cédric Ceyte, fondateur d’Olinn, coach en satrategie, marketing, communication et RSE pour les dirigeants et entreprises, et président de Continuum. « Les dirigeants ne savent pas vers qui se tourner, ou ils ont peur de solliciter des opposants, développe-t-il. Puisqu’il n’y a pas de projets, ils finissent par ne rien faire. » 

Continuum comble le vide à son échelle. Dans le cadre du club,  les membres se réunissent tous les deux mois pour partager des bonnes pratiques ou faire des sorties nature, comme des observations migratoires, qui rassemblent patrons, collaborateurs et leurs enfants.
Les entreprises sont également encouragées à mettre en œuvre des actions individuelles : accueil de la nature sur leur site, mécénat pour soutenir des actions locales de la LPO comme la plantation de haies pour les agriculteurs ou la protection d’espèces locales.
Pour adhérer au club, les entreprises doivent présenter une candidature. Elles sont évaluées par les membres du club sur leurs motivations, les actions qu’elles souhaitent mettre en œuvre. Une fois le dossier validé, l’entreprise verse une cotisation annuelle en fonction de la taille de l’entreprise, qui s’élève de 400 à 5000 euros.  

De belles histoires

Le représentant de la LPO a déjà de belles histoires à raconter.  La société d’aménagement Cheval, membre de Continuum,  a par exemple présenté en 2024 une feuille de route visant à réduire l’impact environnemental de son activité, et envisage de devenir une entreprise régénérative. Le centre médical La Teppe a quant à lui mis en place un atelier indépendant permettant aux patients souffrant d’épilepsie de fabriquer et de vendre leurs propres nichoirs à oiseaux.  « Certaines entreprises qui intègrent Continuum se révèlent, développe Cédric Ceyte. Il est déjà arrivé qu’au sein d’un entreprise, un seul salarié participe aux activités que l’on propose. La fois suivante, c’était la moitié de la boîte ! », se réjouit Cédric Ceyte.  

La recette de cette réussite ? « L’ancrage local et la dynamique collective », répond d’emblée Vivien Chartendrault. La démarche est très pragmatique et répond à ce dont nous avons besoin : des rencontres, des histoires collectives, de la proximité entre les êtres humains, la nature, et le territoire. » Il espère aujourd’hui développer le club dans toute la région Rhône-Alpes, et voir émerger des initiatives similaires partout en France. Un club Continuum est déjà en train de se structurer dans l’Ain.