Yann Balliet, project manager au cabinet de conseil Square Adway. Crédits : DR
Qu’en est-il de la réglementation et des actions mises en place pour favoriser l’expansion de la finance responsable ? Yann Balliet, project manager au cabinet de conseil Square Adway, revient sur la place des investissements dits verts dans la transition énergétique.
Aujourd’hui, force est de saluer la prise de conscience et la volonté de faire évoluer les mœurs pour lutter contre le réchauffement climatique. Dans le monde de la Finance, cela se traduit par des termes tels que « finance responsable » ou encore « finance verte». Nous constatons pourtant que malgré leurs nombreux efforts, les acteurs dans ce domaine de finance eco-friendly sont laissés sans véritable guide par les pouvoirs publics et l’impact des investissements dits verts sur les émissions de CO2 reste difficilement évaluable.
Parler de finance verte revient à mettre en lumière tous les actifs et instruments financiers créés pour soutenir les projets d’ordre écologique. Le concept trouverait naissance en 2008 lorsqu’un fonds d’investissement suédois soucieux d’investir dans des projets respectueux du climat contactait le service de la Trésorerie de la Banque Mondiale pour les aider en ce sens. Moins d’une année plus tard, la première obligation verte fut émise par la Banque et la notion d’investissement Green a vu le jour. Cependant, plus d’une décennie plus tard, où en sommes-nous véritablement, notamment en termes de réglementation et d’actions mises en place pour favoriser l’expansion de la finance responsable ?
La Taxonomie verte
Globalement, le Pacte vert, s’intègre dans la stratégie de la Commission Européenne visant à mettre en œuvre le programme des Nations unies sur la biodiversité et le climat. La Taxonomie verte vient donc pour établir un système homogène visant à évaluer sur base de critères communs en Europe ce que l’on peut qualifier comme étant une activité durable. A titre d’exemples, nous pouvons citer des activités dont l’objectif est le zéro carbone tel que les transports électriques effectués par le groupe français TRANSDEV ou encore des entreprises spécialisées dans la transformation énergétique avec les éoliennes.
La Taxonomie verte prendra donc en compte les critères ESG (Environnementaux, Sociétaux et Gouvernementaux) et devrait pouvoir être lancée fin 2021 pour une application à partir de fin 2022. A ce stade, elle n’est pas obligatoire et est essentiellement conçue pour les produits d’investissement et la gestion de portefeuille. Elle ne concerne pas encore le financement.
Le Label « Relance » comme solution
Depuis octobre 2020, le label « Relance » créé par la Direction Générale du Trésor a pour objectif d’aiguiller l’épargne des français principalement composé de comptes à vue et de livrets d’épargne vers des fonds propres de PME et ETI françaises. Ce label s’inscrit dans le Plan de Relance gouvernemental exceptionnel de 100 milliards d’euros qui se déploie autour de 3 volets que sont la transition écologique, la compétitivité des entreprises et la cohésion sociale.
Le label sera principalement octroyé aux fonds qui s’engagent à investir à minima 30% de leur actif dans des entreprises tricolores, avec au moins 10% dédié aux TPE, PME ou ETI. Il inclut également un ensemble de critères environnementaux, sociaux et de bonne gouvernance visant à encadrer la politique d’investissement et d’engagement actionnarial des fonds labellisés. Les fonds se verront de facto interdits de tout investissement dans des secteurs polluants tel que le charbon.
Exemple d’application concrète en France : Le Crédit Agricole et FORINVEST
Avec pour but de faire une levée de fonds globale de 40 millions d’euros, le Crédit Agricole et FORINVEST (réseau de Business Angels contribuant au développement de la filière forêt-bois française) créent leur premier fonds d’investissement dans la filière bois française appelé le "Fonds DEVELOPPEMENT FILIERE BOIS". Il a déjà connu sa première levée de fonds financée conjointement par 24 caisses régionales du Crédit Agricole et Crédit Agricole S.A. Son objectif est de « soutenir et d’accompagner les entreprises de toute la chaîne de valeur de la filière Bois dans leur développement en renforçant leur fonds propres », indique FORINVEST.
C’est en investissant entre 0,5 et 5 millions d’euros dans les différents projets que le fonds prendra des participations minoritaires dans les entreprises de la filière. La création de ce fonds s’inscrit dans l’implémentation de la réglementation RE2020 à travers laquelle le gouvernement imposera l’utilisation de plus de bois par rapport aux matériaux habituels dans les constructions neuves toujours dans l’optique de favoriser les circuits-courts, la gestion durable des forêts françaises et l’économie en carbone.
L’ensemble de ces actions montrent que l’Union Européenne et les pouvoirs publics sont en ordre de marche pour promouvoir une finance de plus en plus verte. Les labels et réglementations encadrant la finance verte doivent rapidement trouver des leviers pour acquérir une légitimité auprès des investisseurs.