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EAU

Une mise en oeuvre qui fait des vagues

PUBLIÉ LE 1er JUIN 2011
LA RÉDACTION
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Depuis 1998, on estime que les inondations en Europe ont provoqué le déplacement d'un demi-million de personnes et des pertes économiques d'au moins 25 milliards d'euros, couvertes par les assurances. Durant la période, l'Europe a subi plus de cent inondations majeures, notamment celles, catastrophiques, du Danube et de l'Elbe. À l'avenir, malheureusement, les choses ne peuvent aller qu'en empirant. Le risque inondation est en effet le premier risque naturel, en particulier en France où des millions de gens vivent sur 27 000 kilomètres carrés de zones inondables. Les enjeux soumis au risque (entreprises et activités économiques, notamment) ne font eux aussi que croître avec le temps. « Ainsi, si la crue historique de 1910 en région parisienne se reproduisait aujourd'hui, son pouvoir dévastateur serait incommensurablement supérieur à celui de l'époque, car les hommes, les activités et les biens sont plus nombreux, plus concentrés, plus vulnérables... Un tel événement pourrait nécessiter d'évacuer et de reloger près d'un million de personnes, ce que l'on ne sait absolument pas faire. Certains secteurs d'Île-de-France pourraient être immobilisés des semaines, des mois, et ne pas retrouver leur capacité d'accueil et de développement avant deux ou trois ans », détaille Nicolas- Gérard Camphuis, directeur du Centre européen de prévention du risque d'inondation ( Cepri). Selon les estimations, un tel événement coûterait plus de 10 milliards d'euros à la collectivité nationale. L'impact du changement climatique, même s'il n'est pas encore pleinement appréhendé, n'augure pas une réduction de l'ampleur de ces phénomènes, bien au contraire. LES ENJEUX DE LA DIRECTIVE Face à de tels constats, le Conseil et le Parlement européen ont trouvé un accord sur une directive qui devait complètement renouveler la stratégie de prévention des inondations dans les États membres. Cette directive 2007/60/CE, du 23 octobre 2007 est marquée par le principe de prévention : elle part du constat que les inondations sont des phénomènes naturels ne pouvant être évités et elle se donne pour finalité d'en réduire les conséquences négatives, en particulier sur l'activité économique. Par plusieurs aspects, ce texte peut être comparé à la directive-cadre sur l'eau, avec laquelle il est d'ailleurs étroitement coordonné puisque le cadre géographique d'intervention est identique : les bassins hydrographiques. Il véhicule en effet une nouvelle philosophie allant bien au-delà des objectifs et des méthodologies qu'il impose, il préconise une approche intégrée de la gestion de l'eau et de l'aménagement du territoire qui se veut à la fois ambitieuse et pragmatique, il fait une large place à la concertation avec les acteurs de terrain et avec le public... UNE TRANSPOSITION TARDIVE En France, en particulier, l'application de ce texte constitue une occasion de revisiter profondément la politique nationale de prévention des inondations, laquelle s'enferre depuis longtemps dans des visions à trop courte vue et dans les conflits d'intérêts. Mais alors que la transposition de la directive en droit national était attendue au plus tard pour novembre 2009, elle n'est intervenue qu'avec la loi Grenelle 2 du 12 juillet 2010. Le décret définissant les étapes successives de la démarche et achevant formellement la transposition est, lui, daté du 2 mars 2011. Il constitue la réponse de la France aux poursuites pour insuffisance de transposition engagées par la Commission européenne fin octobre 2010. COURSE CONTRE LA MONTRE Mais pourquoi la France a-t-elle accumulé autant de retard sur le sujet ? « L'État pensait peut-être que la connaissance du risque était suffisante en France, en quoi il se trompait largement, comme la Commission le lui a sèchement rappelé », avance un observateur. « Il y a eu pendant longtemps des discussions pour décider s'il était nécessaire de faire une loi pour transposer ce texte, ou si un décret, accompagné d'ordonnances suffirait », indique un autre. « C'était déjà difficile de faire adopter les PPRI, alors mettre en place des outils basés sur des modalités plus ambitieuses, vous imaginez l'enthousiasme ! », conclut un dernier. Excès de confiance, négligence, hésitation ou volonté délibérée d'éviter un sujet qui dérange, toujours est-il que la France s'est mise dans une position difficile : maintenant, c'est la course contre la montre. La mise en oeuvre de la directive passe par trois étapes successives. La première est une « évaluation préliminaire des risques d'inondation » (EPRI) dans chaque district hydrographique, dont l'objectif est d'aboutir à l'identification et à la sélection de « territoires à risque d'inondation important » (TRI), ayant des conséquences de portée nationale, voire européenne. Doit s'ensuivre une cartographie des surfaces inondables et des risques d'inondation, aboutissant in fine à un « plan de gestion des risques d'inondation » (PGRI). UN TRAVAIL TITANESQUE Compte tenu des retards pris dans la transposition, les délais sont fatalement resserrés : il faut finaliser les EPRI avant le 22 décembre 2011, achever la cartographie avant le 22 décembre 2013, et établir les PGRI pour le 22 décembre 2015. L'État, qui pilote sur le terrain cette démarche par le biais des préfets coordonnateurs de bassins, semble déterminé à faire avancer les choses rapidement. Première étape, les EPRI. Le texte réglementaire prévoit de « mobiliser l'information disponible, en vue de produire un document décrivant l'étendue et l'écoulement des différentes inondations survenues dans le passé et ayant eu des impacts négatifs significatifs sur la santé humaine, l'environnement, les biens ou l'activité économique ». Plusieurs experts considèrent que, compte tenu du calendrier très contraint, la réalisation d'un véritable état des lieux est quasi impossible, même si les Dreal peuvent parfois s'appuyer sur une masse de données consistante rassemblée par les EPTB. « Sur la partie franc-comtoise de l'établissement, nous avons historiquement une collaboration exceptionnelle avec les services de l'ancienne Diren, qui se traduit par un observatoire des inondations unique en France, explique Marc Foret, directeur de l'EPTB Saône et Doubs. Grâce à ce partenariat, il y a des chances que l'EPRI (d'ailleurs, mené par un de nos collaborateurs, qui a été mis à disposition de la Dreal Franche-Comté) sur cette partie du territoire soit plus précis et aille plus loin que sur les autres régions. » Deuxième étape, prioriser les actions sur le bassin hydrographique, en définissant des TRI. Il faudra pour cela préciser, de manière consensuelle, les contours de ce que sont des « TRI à enjeu national ». Puis, l'approfondissement de la connaissance sur ces territoires passera par l'établissement de la cartographie. La directive est très précise : les cartes devront faire apparaître, pour chaque scénario, le type d'inondation (crue de probabilité faible, moyenne et forte), son étendue, les hauteurs d'eau ou les cotes, la vitesse du courant ou le débit de crue correspondant, et pour la partie « enjeux », le nombre d'habitants, le type d'activités économiques et les installations potentiellement touchés. Ces éléments impliquent une profonde révolution. En effet, en France, les PPRI les plus récents prennent en compte la surface submersible, les hauteurs d'eau et les vitesses d'écoulement, mais uniquement concernant les plus hautes eaux ou la crue centennale. Avec la directive, il va falloir considérer toutes les inondations significatives survenues dans le passé, dès lors que la reproduction d'événements de même type est susceptible d'avoir des conséquences négatives. « Quand la directive demande de classifier le risque par fréquence, elle s'éloigne bien loin de ce qui se pratique en France dans le cadre des PPRI », estime Alexis Wetterwald, gérant du cabinet conseil Lexis. Sachant que les atlas des zones inondables ne dépassent souvent pas la crue centennale, cela va entraîner un énorme travail de recherche, voire d'acquisition de données, dont personne ne sait s'il sera à la portée des services de l'État. Une question corollaire porte sur l'échelle géographique à laquelle il convient de descendre. « Produire des cartes précises à la parcelle semble infaisable (trop coûteux, trop long). Mais si les cartes ne sont pas à la parcelle, elles n'auront pas grand intérêt », résume Alexis Wetterwald. Troisième étape, élaborer des plans de gestion sur les districts hydrographiques. L'objectif est de réduire la probabilité de survenue des inondations et d'en atténuer les conséquences potentielles. Là encore, il faudra un débat national et des arbitrages pour définir dans quelle mesure il convient de chercher à réduire les conséquences négatives des inondations. On peut ajouter que le PGRI se déclinera au niveau des TRI par des stratégies locales proportionnées aux enjeux en présence et des plans d'action locaux de gestion des risques d'inondation. Ils permettront l'application des mesures de sauvegarde (digues, barrages...), la coordination des secours et des mesures d'information à l'attention des habitants. PARTIES CONCERNÉES La directive prévoit la « participation active » des parties concernées, mais elle ne définit absolument pas les modalités de cette concertation. Comme il fallait vite trouver un cadre de dialogue existant, il a été décidé que la concertation des parties prenantes serait menée au sein des comités de bassin. « Sur le bassin Loire-Bretagne, on a fait évoluer une commission du comité de bassin, qui traitait précédemment du Plan Loire, pour qu'elle s'occupe des inondations. C'est dans le cadre de cette commission que seront préparés les avis du comité de bassin et en particulier, dès cette année, son avis sur l'EPRI », indique un responsable du service Loire et bassin Loire-Bretagne de la Dreal Centre. COMMISSION OUVERTE Cette commission a été ouverte à des acteurs non-membres du comité de bassin, notamment des EPTB, ainsi que des structures porteuses de SCOT. « Nous souhaitions aussi que les EPTB puissent contribuer à la production technique, ajoute le responsable de la Dreal Centre. Pour cela, nous avons organisé récemment une réunion pour recueillir leur avis sur la première partie de l'EPRI, la présentation du district Loire-Bretagne, sa géographie, les types d'inondation auxquels il est soumis, etc. On entame la seconde partie de ce travail, la caractérisation des potentielles inondations futures et l'estimation des enjeux, qui seront présentés aux EPTB de la même manière, probablement en septembre. » Ceux, notamment les représentants des collectivités locales, qui espéraient que l'élaboration de ces nouveaux outils prendrait une véritable forme de co-construction en sont pour leurs frais. « Il est clair que la gouvernance qui se met en place se fait un peu à marche forcée, et faute de mieux. Même si l'EPTB est associé en tant que technicien, les élus, eux, ne sont pas appelés à délibérer sur le sujet », juge Xavier Caron, directeur de l'Établissement public d'aménagement de la Meuse et de ses affluents ( Epama). La « consultation » en bonne et due forme n'aura lieu qu'en fin de parcours, en 2015, avant l'adoption du plan de gestion. UNE ARTICULATION INCERTAINE La mise en oeuvre de la directive laisse, pour l'instant, un grand nombre de questions non résolues. « Sera-t-il possible d'agir sur une zone qui n'est pas classée en TRI ? Avec quels moyens ? Le TRI inclura-t-il les territoires de l'amont sur lesquels il est possible d'aménager des zones d'expansion des crues capables de réduire les effets à l'aval ? », s'interroge Xavier Caron. Autre question : comment les outils issus de la directive vont-ils s'articuler avec les outils préexistants, les plans de prévention des risques d'inondation (PPRI), les programme d'action de prévention des inondations (PAPI) ? « Les PPRI auront sans doute vocation a être inclus dans le plan de gestion. Par ailleurs, on peut parfaitement imaginer que, sur les territoires non classés en TRI, les PPRI perdurent », avance le responsable de la Dreal Centre. Il devrait pouvoir en être de même pour les PAPI. Sachant que les PAPI, dans leur version actuelle, sont présentés comme un outil de préfiguration des « stratégies locales » à mettre en oeuvre sur les TRI. On note toutefois que les PAPI se concentrent sur les débordements de cours d'eau, tandis que la directive concerne tout type d'inondations : débordements, submersion marine, remontées de nappes, ruissellement pluvial... PERSPECTIVES Ce constat conduit naturellement à élargir la question de l'articulation des outils à celle de la place du Plan national de prévention des submersions marines dans ce nouveau panorama. Sans parler de la cohérence avec la récente proposition de loi déposée par le sénateur Retailleau, qui vise notamment à « réduire les conséquences des inondations par une meilleure anticipation ». Enfin, la mise en conformité des documents d'urbanisme et autres documents de planification ne sera pas facile. Les Scot, PLU et PPRI devront être rendus compatibles avec les objectifs et les mesures des PGRI dans les trois ans de leur adoption. Et le Sdage devra être mis en cohérence avec le PGRI.
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