Le Sipibel est né d'une belle opportunité technique : la possibilité offerte par la station d'épuration de Bellecombe de traiter séparément les effluents domestiques du syndicat des Eaux des Rocailles et les rejets du nouveau centre hospitalier Alpes Léman. Doté de 700 000 euros de financements publics en 2013, cet ambitieux programme de suivi et de recherche sur la caractérisation, la traitabilité et les impacts des effluents hospitaliers est piloté par le Groupement de recherche Rhône-Alpes sur les infrastructures et l'eau (Graie).
L'observatoire a été mis en place début 2011, permettant la réalisation d'un état zéro de la qualité de l'Arve et des eaux usées domestiques un an avant l'ouverture du nouvel hôpital. « Des micropolluants aux indices biologiques de qualité de la rivière, en passant par l'écotoxicité, la génotoxicité, l'antibiorésistance et le potentiel de perturbation endocrinienne, plus de 100˜paramètres sont suivis durant trois ans », souligne Élodie Brelot, directrice du Graie.
La présentation des premiers résultats, début 2013, confirme les grandes tendances observées dans d'autres programmes nationaux ou européens : si les concentrations en micropolluants sont plus importantes dans les effluents hospitaliers, les rejets urbains représentent près de 95 % des flux totaux. Le dispositif évalue également l'efficacité du traitement biologique sur les résidus médicamenteux. Alors qu'on atteint 99 % d'abattement sur le paracétamol, d'autres molécules voient leur concentration augmenter au cours du traitement ! « D'où de nombreuses questions sur la dégradation de ces substances, la prise en compte de leurs métabolites et leur concentration dans les boues », commente Élodie Brelot.
Pour y répondre, deux unités pilotes, boues activées conventionnelles et cultures fixées fluidisées, couplées à l'ozonation, vont être mises en place en 2013. « L'objectif est d'aller au-delà des configurations classiques, pour développer un système intégré associant oxydation biologique et oxydation chimique à l'ozone », précise Adriana Gonzalez Ospina, responsable des projets d'innovation sur les micropolluants à la direction technique eaux usées de Degrémont. De plus, un consortium scientifique regroupant cinq laboratoires universitaires renommés a été constitué pour valoriser les données produites par l'observatoire, avec notamment quatre thèses en cours : méthodes d'analyses, modélisation des flux, écotoxicité et devenir des micropolluants dans les boues.
Un appel à projets conjoint, ministère de l'Écologie-Onema-agences de l'eau, va prochain emen t être lancé pour encourager collectivités et scientifiques à travailler ensemble et tester les orientations des plans nationaux sur les micropolluants et les résidus de médicaments. « La démarche du Sipibel correspond tout à fait au type de candidatures attendues », ajoute Edwige Duclay, chef du bureau de la lutte contre les pollutions domestiques et industrielles au ministère de l'Écologie.
