Il y a 25 ans, l'agence de l'eau Seine-Normandie a été pionnière dans le développement des classes d'eau, ces voyages scolaires pédagogiques pour sensibiliser à la protection de l'eau. Depuis quelques années, elle innove en ouvrant l'accès aux adultes. « Nous sommes actuellement dans une démarche proactive visant à toucher d'autres publics tels que les élus, les industriels et les agriculteurs », explique Estelle Gavard, chargée de mission éducation à l'environnement. Les classes d'eau pour agriculteurs ont débuté en 2008, bénéficiant à près de 150 exploitants. Pendant cinq jours, les participants font le tour du petit et du grand cycle de l'eau, avec des visites de stations de potabilisation et de stations d'épuration. « C'est important de prendre le temps d'aller voir les professionnels de l'eau et de l'assainissement pour comprendre quelles sont leurs contraintes réglementaires, économiques et techniques », explique l'agriculteur Philippe Jacquemin, qui a organisé la première classe d'eau au CFPPA (Centre de formation professionnelle et de promotion agricole) de l'Épine, dans la Marne. La réglementation sur l'eau est aussi abordée grâce à l'intervention de différents acteurs tels que l'agence ou les services de l'État (DDT, Dreal). « Les agriculteurs sont contents de venir pour échanger directement sur les points qui font débat. Ils sont étonnés de pouvoir en discuter aussi ouvertement », ajoute Léa Desoutter, chargée de mission à la Chambre d'agriculture de l'Oise qui organise actuellement une classe d'eau. « Au départ, ils ont peur d'être endoctrinés, mais ils se rendent vite compte que nous ne sommes pas là pour leur donner des vérités toutes faites, mais plutôt pour leur permettre de rencontrer de nombreux acteurs », résume Estelle Gavard. Concrètement, l'organisateur (une chambre d'agriculture, un syndicat d'eau, un parc naturel régional, un CFPPA) établit le programme en accord avec l'agence. Celle-ci finance la classe à 80 %, et fournit la méthodologie et les outils pédagogiques.
Au-delà du fonctionnement global du cycle de l'eau, les agriculteurs sont également conviés à des journées plus techniques. Dans l'Oise, ils ont échangé sur différentes pratiques : bio, conventionnelle et gestion intégrée. Dans la Marne, ils ont réfléchi à un projet pour leur exploitation. « Réduction d'intrants, intercultures…, il s'agissait de voir ce que l'on pouvait mettre en place sur notre exploitation pour limiter la pollution des nappes », raconte Philippe Jacquemin. Mais mobiliser des agriculteurs durant cinq jours sur cette thématique reste compliqué, même en concentrant les journées en hiver. Le plus souvent, les rares volontaires sont aussi élus locaux ou dans des instances professionnelles. Pour l'agence, ce type de formation sur une longue période a pourtant de réels avantages pour l'assimilation des informations. Elle souhaite désormais développer ces classes sur les territoires aux enjeux prioritaires.