Polymem est une PME toulousaine créée en 1997 par deux ingénieurs spécialistes du traitement d'eau par membranes fibres creuses. Son siège et son usine de fabrication sont situés à Castanet-Tolosan (Haute-Garonne), proche des centres de recherche spécialisés dans le domaine. La société conçoit et fabrique une large gamme de modules d'ultrafiltration, allant de 4 m2 à 540 m2 , pour la potabilisation de l'eau, la filtration d'eau de mer, le traitement et la réutilisation des eaux usées.
La réutilisation des eaux usées (Reuse) est l'un des grands enjeux technologiques dans le monde pour les prochaines décennies. Actuellement, l'offre technologique pour le recyclage existe et certaines références ont déjà vu le jour. Dans ce contexte, les procédés de filtration sur membranes, procédés physiques de séparation des molécules par exclusion de taille, sont incontournables. À Singapour, par exemple, l'usine de production d'eau potable Newater recycle depuis 2005 une partie importante de ses eaux résiduaires urbaines vers les réservoirs d'eau potable de la ville. En Australie, afin de faire face aux sécheresses, l'État du Queensland a lancé un projet de recyclage des eaux résiduaires urbaines, le Western Corridor. Il vise à construire trois usines de recyclage qui alimenteront une réserve artificielle d'eau réutilisable. Ces références d'envergure sont réservées à des contextes dans lesquels les contraintes environnementales, principalement le stress hydrique, sont les moteurs principaux de choix, mais le critère économique est aussi prépondérant.
Pour permettre la généralisation de la réutilisation en France et en Europe, il est nécessaire de réduire le coût du traitement des eaux résiduaires pour qu'il s'approche du coût du traitement de potabilisation. Ce surcoût, actuellement d'environ 25 %, est lié à la présence dans ces eaux d'un cocktail de fragments cellulaires, de flocs bactériens, de macromolécules organiques, d'exopolymères et autres petits composés organiques qui s'adsorbent sur les membranes d'ultrafiltration, ce qui nécessite de les nettoyer fréquemment. Les solutions pour éliminer ce surcoût sont donc d'une part d'améliorer la qualité de l'effluent arrivant sur la membrane grâce à un prétraitement adapté à faible coût, notamment par oxydation de ces matières organiques et, d'autre part, de proposer de nouvelles membranes d'ultrafiltration peu ou pas sensibles au colmatage.
Partenaire des principaux acteurs du traitement d'eau français et internationaux, Polymem travaille activement depuis plusieurs années sur ces deux possibilités. La société a ainsi participé au projet européen Life +, Purifast, coordonné par l'entreprise italienne Next Technology Tecnotessile (NTT) spécialisée dans l'ingénierie de l'industrie textile. Ce projet mené de 2009 à 2012 avait pour but de traiter et de recycler des effluents de l'industrie textile mélangés avec des eaux résiduaires municipales. Dans ce cadre, un prétraitement par oxydation avancée (ozone ou ultrasons) avait été élaboré et installé par NTT en amont d'une unité d'ultrafiltration membranaire de Polymem. Ce prétraitement d'oxydation a produit des radicaux hydroxyles qui ont détruit les composés organiques avant leur arrivée sur les membranes, rendant le cocktail moléculaire beaucoup moins colmatant pour les membranes qui ont travaillé à des flux comparables à ceux de la potabilisation de l'eau. Une unité d'ultrafiltration pilote d'une capacité de traitement de 50 m3 /jour a été implantée avec succès sur la station d'épuration urbaine de Prato, dans la banlieue de Florence, en Italie. Le couplage des deux technologies a permis de travailler de façon pérenne sur des périodes d'essais, supérieures à six mois, en réduisant drastiquement les fréquences de nettoyage des membranes. Le recyclage des eaux usées traitées vers les ateliers textiles et en irrigation est en cours de dimensionnement.
La seconde possibilité étudiée par Polymem pour réduire le coût du traitement membranaire est de modifier la membrane elle-même pour la rendre moins sensible au colmatage. La société a lancé plusieurs programmes de recherche en ce sens. Elle coordonne notamment le projet Neophil, financé par le Fonds unique interministériel (FUI), la région Midi-Pyrénées et l'Europe dans lequel elle met au point avec ses partenaires une nouvelle génération de membranes superhydrophiles, et donc peu ou pas sensibles au colmatage des eaux usées. Ces propriétés remarquables sont obtenues en modifiant la fabrication des membranes. L'approche est basée sur l'incorporation de copolymères à blocs dans le mélange de polymères utilisé dans la fabrication industrielle des membranes à fibres creuses. Le choix de blocs particuliers est judicieux si l'on utilise le bénéfice de chacun des blocs, l'un des blocs servant alors d'ancrage dans le squelette de la membrane et l'autre bloc apportant la fonction superhydrophile. On crée ainsi un caractère hydrophile fort et durable dans le temps. Dans le cadre du projet, cette nouvelle membrane est testée jusque début 2015 dans une station d'épuration urbaine en Île-de-France, sur un démonstrateur d'une capacité de 400 m3 /jour. La taille de ce démonstrateur proche de la taille d'une collectivité de 3 000 équivalents habitants est une première référence majeure sur ce type d'application en France.