Les zones tampons humides artificielles de la région du Rhin supérieur se révèlent très efficaces pour dégrader les pesticides mais ne permettraient pas de le faire entièrement. Telles sont les conclusions rendues par le programme européen Phytoret(1) , achevé cet été, qui a étudié près de 40 ouvrages de rétention en Alsace et en Allemagne.
L'analyse de 24 molécules aboutit à un potentiel moyen de réduction de l'ordre de 80 % de leur masse. Cette mesure a été jugée plus représentative que la concentration, notamment pour suivre le transport des pesticides. Vont-ils se loger plutôt dans les sédiments, dans les racines des roseaux, à la surface ou dans les matières en suspension ? La réponse varie fortement d'une molécule à l'autre. Or la moyenne de rétention cache des disparités. La « performance » tombe à 40 % pour le pyriméthanil, fongicide utilisé en viticulture, et monte à plus de 90 % pour le glyphosate. « Dans tous les cas, l'absence d'efficacité à 100 % confirme le besoin d'actions correctrices en amont, à commencer par la réduction des quantités à la source », souligne Gwenaël Imfeld, chercheur au CNRS au laboratoire d'hydrologie et de géochimie de Strasbourg. Le programme souligne la pertinence de recourir à des marqueurs chimiques pour prédire la biodégradation : les énantiomères dans le cas des pesticides chiraux comme le métolachlore, l'analyse isotopique spécifique des compo sés (CSIA), qui suit l'évolution des ratios entre les isotopes 12 et 13 du carbone.
Parmi les facteurs naturels, Phytoret met en évidence une forte activité de dégradation des molécules du printemps à l'été, avant un restockage, de moindre ampleur, à l'automne. Il bat en brèche les arguments sur l'innocuité des produits de dégradation des pesticides. Ainsi, la transformation du glyphosate conduit à l'apparition de l'AMPA, dégradé moins rapidement.