Co mment peut-on valoriser les 250 000 tonnes de coquilles issues de la conchyliculture et de la pêche françaises jusqu'alors considérées comme déchets ? Dans le cadre du projet européen Recif (Réutilisation de coproduits marins en récif artificiel), l'École supérieure d'ingénieurs des travaux de la construction (ESITC) de Caen et ses partenaires travaillent actuellement sur un écomatériau de construction à base de coquilles vides d'huîtres et de saint-jacques. Une fois concassées et criblées, elles peuvent remplacer les granulats traditionnellement incor-porés au béton, jusqu'à 50 % des matériaux de base selon la porosité souhaitée.
En avril dernier, un récif artificiel expérimental utilisant ce béton a été immergé en rade de Cherbourg. Constitué de douze modules de 3 mètres de long, 2 mètres de large et 1,35 m de haut organisés en trois îlots, l'aménagement fait partie des mesures compensatoires mises en place par les Ports normands associés, à la suite de l'extension des terre-pleins portuaires dans la rade. Durant les cinq prochaines années, un suivi environnemental, mené par l'université de Caen, évaluera les bénéfices du récif sur la biodiversité, notamment en matière de nurserie et de colonisation par les espèces marines. La durabilité hydromécanique du nouveau béton vis-à-vis de l'eau de mer sera également étroitement surveillée.
« À terme, nous souhaitons constituer une filière locale de valorisation à partir des producteurs de coquilles », indique Mohamed Boutouil, directeur de la recherche à l'ESITC de Caen. Par ailleurs, l'école imagine déjà de nombreux débouchés dans la construction de quais ou d'ouvrages portuaires, de récifs artificiels au pied des fondations d'éoliennes, ou encore dans le recouvrement des câbles sous-marins. DH