La gestion des eaux pluviales figure parmi les compétences transférables depuis la création du syndicat. Réseau31 en construit pas à pas les contours. Face au réchauffement climatique, la prise de conscience collective va certainement accélérer ce processus.
Dans les collectivités, à quels services sont rattachés les pôles en charge de la gestion des eaux pluviales : l’assainissement, la Gemapi, le cadre de vie, la voirie, les espaces verts…? Avec ce simple questionnement, la difficulté de l’exercice de cette compétence à cheval sur de nombreux domaines apparaît. Imaginez alors l’usager lambda, hermétique au vocabulaire technico-administratif qui, les pieds dans l’eau, verrait plusieurs entités se rejeter la responsabilité du fait des limites de leurs compétences. À l’heure de la simplification dont les effets sont inversement proportionnels aux annonces, il serait temps de faciliter l’exercice de cette compétence qui, au cœur de nos crises climatiques, peut à la fois être révélateur de la gravité de la situation mais également l’une des solutions.
Réseau31 est le syndicat mixte de l’eau et de l’assainissement de Haute-Garonne. Dès sa création en 2010, la gestion des eaux pluviales a été prévue dans les compétences transférables. Réseau 31 est un syndicat ouvert à la carte (eau potable, assainissement collectif, ANC, eaux pluviales, eaux brutes). Présidé par Sébastien Vincini, il apporte un service à près de 510 000 habitants répartis sur 380 communes, principalement de Haute-Garonne mais aussi du Gers, du Tarn et de l’Aude.
Les impacts du réchauffement climatique se font de plus en plus sentir sur notre territoire, avec une accélération du « trop peu » et du « trop » d’eau (routes et habitations fissurées par la sécheresse, coulées de boues et crues soudaines, etc.). Depuis 2019, en plus de gérer les ouvrages de collecte, de transport et de stockage, le syndicat a donc décidé de construire une nouvelle relation avec ses usagers au travers d’un règlement de service ambitieux.
Stocker l’eau au plus près de l’impact de la goutte est une approche évidente, mais clairement nouvelle. Pour ce faire, l’infiltration à la parcelle est devenue la règle ; le rejet superficiel, l’exception. Dans nos statuts, nous avons clarifié la répartition spatiale des compétences. La compétence sur la gestion des eaux pluviales urbaines (art. L.2226-1 du CGCT) est exercée sur les zones urbanisées et à urbaniser, le ruissellement & lutte contre l’érosion (art. L.211-7 du Code de l’environnement item 4) sur les zones naturelles et agricoles, et la Gemapi (art. L.211-7 du CE items 1, 2, 5 et 8) sur les cours d’eau tels que définis par les arrêtés préfectoraux (art L.215-7-1 du CE introduit par la loi biodiversité du 08/08/16).
Les documents d’urbanisme deviennent alors les « juges de paix » en précisant « qui fait quoi » de manière simple et pragmatique. Des divergences peuvent néanmoins apparaître : communes sans document d’urbanisme, ruisseaux « orphelins » non portés par les structures gemapiennes, cours d’eaux busés en agglomération, etc. Mais globalement, depuis cinq ans, cette méthode n’a jamais été contestée.
Cette répartition des compétences figure dans chaque schéma directeur de gestion des eaux pluviales. Ainsi, cinq schémas sont achevés chaque année, et certains zonages sont intégrés dans le règlement du plan local d’urbanisme pour qu’ils deviennent opposables. L’élaboration de ces documents prospectifs permet à cette compétence de mieux s’ancrer dans les territoires. Ils contribuent à l’acculturation des acteurs (lotisseurs, maîtres d’œuvre, architectes, aménageurs, entreprises, bureaux d’études, urbanistes et administrations) en faveur d’une gestion vertueuse des eaux pluviales. En période de disette financière des collectivités, c’est aussi un moyen de faire davantage supporter la charge sur les usagers du service en évitant le tout tuyau. L’exercice de cette compétence apporte aussi une réponse à la zéro artificialisation nette (ZAN) introduite par la loi Climat et résilience du 22 août 2021, à condition que d’autres règles n’entravent pas son essor comme le formulaire Cerfa 13406*06 de demande de permis de construire d’une maison individuelle qui exclut les eaux pluviales des pièces obligatoires pour l’instruction des demandes d’urbanisme.
L’autre difficulté rencontrée concerne le financement de cette compétence, équilibrée par les contributions des communes adhérentes. À ce jour, elles abondent au coup par coup en fonction des tâches réalisées. Ce fonctionnement se heurte à la lourdeur du suivi analytique, l’élaboration constante de devis (pour de faibles sommes), des difficultés d’intervention en astreinte et la construction de programmes d’interventions préventives.
Depuis trois ans, sous l’impulsion d’Yves Cadas, vice-président en charge des eaux pluviales et maire de Labarthe-sur-Lèze, sept communes du Muretain Agglomération adhérentes contribuent forfaitairement. Bien que modeste (3 €/hab/an), cette dotation permet une gestion plus souple des eaux pluviales et du ruissellement en faveur des premiers investissements et des interventions curatives. D’autres communes sont prêtes à mettre en place ce système qui permettrait à terme de créer un véritable budget pluvial. Face aux transferts croissants des compétences pluviales des communes à Réseau31, une évaluation du service va s’engager pour déterminer leur devenir. Bien qu’elles ne soient pas concernées par les prises de compétences obligatoires des communautés de communes en 2026, comme pour l’eau potable et assainissement, les eaux pluviales et ruissellement ne pourront rester en dehors du débat public, tant le décloisonnement des compétences, la professionnalisation des acteurs et le rapprochement entre le petit et grand cycle de l’eau demeurent nécessaires pour faire face aux changements climatiques et aux obligations de pragmatisme efficace.