Comment coupler la méthanisation à la méthanation biologique ? Tel est le sujet de recherche du projet Hycabiome. Il réunit le laboratoire d’ingénierie des systèmes biologiques et des procédés (LISBP) de l’Insa Toulouse, les bureaux d’études Hespul et Solagro, la start-up Leaf et le centre régional d’innovation et de transfert de technologie GPTE. L’idée est de travailler avec du biogaz, composé de méthane et de dioxyde de carbone et produit par une installation de méthanisation classique. Puis d’utiliser la méthanation pour augmenter la proportion de méthane dans le mélange. Objectif : passer de 60 à 70 % en temps normal à un taux pouvant aller jusqu’à 96 %. La méthanation jouerait alors le rôle d’épurateur. « C’est un moyen de transformer les coûts d’épuration du biogaz en coûts d’enrichissement en biométhane », résume Claire Dumas, chercheure au LISBP.D’une façon générale, la méthanation associe le dioxyde de carbone et l’hydrogène pour former du méthane. « Mais on distingue deux types de procédés. Soit la méthanation catalytique thermochimique, qui se déroule à forte pression, jusqu’à cent bars, et à haute température, jusqu’à 500 °C, expose Claire Dumas, soit la méthanation biologique. » Le projet Hycabiome explore cette seconde voie, qui présente plusieurs avantages. D’abord, la réaction se fait à pression atmosphérique et à une température plus basse, entre 40 et 80 °C. Ensuite, elle utilise comme catalyseurs des micro-organismes moins sensibles aux impuretés. « Ces micro-organismes sont présents dans les méthaniseurs et les stations d’épuration », ajoute la chercheure. Le projet de recherche Hycabiome consiste à les caractériser, à étudier leur sensibilité et les transferts gaz-liquide lors de l’injection d’hydrogène dans le réacteur biologique. Il s’agit aussi de concevoir un pilote préindustriel mobile pour le déplacer sur des sites de méthanisation. Des tests seront notamment menés sur les modes d’injection de l’hydrogène et sur la gestion de l’eau lors de la réaction.Dans le monde, quelques laboratoires travaillent déjà sur ce type de projet. Au Danemark, à Copenhague, Biocat combine ainsi station d’épuration, méthanisation, électrolyse et méthanation biologique. En France, Hycabiome dressera un état de l’art des projets dans le monde. Il va également établir un scénario prospectif à l’horizon 2025 en évaluant le potentiel de développement de la technologie par territoires, selon qu’ils sont équipés de méthaniseurs ou de stations d’épuration. Les modalités de fonctionnement de l’électrolyseur, pour la production d’hydrogène, et de la méthanation ne sont pas encore définies. Fonctionneront-ils par intermittence ou non ? Le modèle économique en dépendra.Mais les chercheurs y voient déjà un moyen de fournir des services d’ajustement au réseau électrique, en utilisant pour l’électrolyse les électrons en surplus par rapport à la demande. Par exemple pour valoriser les excédents de production d’électricité renouvelable. Pour confirmer ces promesses, le projet bénéficie d’un budget de 400?000 euros, dont 50 % d’aides de l’Ademe. Lancé en décembre 2015 pour vingt-sept mois, il doit franchir fin 2016 une étape importante : la mise en place du pilote préindustriel.Thomas Blosseville