A l’ombre de la méthanisation de grande puissance, la microméthanisation agricole poursuit son petit bonhomme de chemin. Spécialiste belge du secteur, Biolectric cherche aujourd’hui à doubler ses moyens de production. Rencontre avec sa Senior Country Manager, Sigrid Farvacque.
Environnement Magazine : Qu’est-ce que la microméthanisation ?
Sigrid Farvacque : La microméthanisation est un système en cogénération se présentant sous la forme d’un micro-méthaniseur calibré en fonction de la taille du cheptel produisant de l’électricité et de la chaleur. Il s’agit d’un système en circuit court permettant un fonctionnement en totale indépendance du monde extérieur et pouvant fonctionner uniquement sur base des effluents d’élevage. Ce système présente plusieurs avantages : une indépendance énergétique des élevages, via l’autoconsommation électrique et la revente du surplus d’électricité ; une optimisation des effluents – le digestat est considéré comme un engrais amélioré permettant de réduire les dépenses en engrais chimiques ; une diminution drastique des émissions de méthane – en moyenne, 82 % du méthane provenant des lisiers est capté dans le biogaz et transformé en électricité ; une diversification économique des exploitations agricoles participant à leur pérennisation.
Quel est l’intérêt de la microméthanisation par rapport à la méthanisation classique ?
Contrairement à la méthanisation classique, un projet de microméthanisation est financièrement abordable par une exploitation et n’impose donc aucunement de nouvelles associations. L’outil est calibré en fonction des intrants déjà disponibles sur la ferme, l’exploitant est donc dans le contrôle total de l’alimentation de son méthaniseur. D’autre part, les effluents d’élevage seuls permettent son fonctionnement, aucune culture n’est donc requise. Les effluents utilisés sont frais ce qui engendre un captage du méthane quasiment immédiat et donc une véritable gestion des émissions de gaz à effet de serre (GES). Enfin, aucun trafic routier n’est généré, aucune incidence olfactive donc ; au contraire, les digestats sont grandement désodorisés.
Quel est l’état du marché en Europe, et en particulier en France ? Et quelles en sont les perspectives dans les années à venir ?
Près de 350 installations sont en fonctionnement en Europe, dont 110 en France. De nombreux projets sont en cours. Les pays où Biolectric est le plus représenté sont la Belgique, les Pays-Bas, le France et la Pologne, mais nous sommes également actifs en Grande-Bretagne, en Suède, en Allemagne, en Italie, en Espagne et en Lituanie.
La demande est en constante augmentation, la réduction des émissions de GES, comme la gestion des coûts énergétiques, sont des sujets de grande importance pour tous les professionnels, le monde agricole n’y échappe pas. Aujourd’hui, nous sortons deux installations par semaine de notre usine située en Belgique, à un peu plus d’une heure de la frontière française. Nous travaillons à doubler notre capacité de production à moyen terme afin de pouvoir répondre à la demande grandissante.
A ce jour, en France, seule la méthanisation classique est soutenue financièrement, sauf dans le Sud-Ouest, où la région a mis en place une aide pertinente dans le but de soutenir les éleveurs dans leurs démarches. Aussi, le monde politique ne fait aucune distinction, au niveau législatif, entre la microméthanisation agricole en circuit court et les installations de grande puissance.
En quoi la microméthanisation réduit-elle l’impact environnemental des élevages ? Et quels bénéfices les agriculteurs peuvent-ils en tirer ?
En utilisant le lisier le plus frais possible dans un micro-méthaniseur, on évite l’évacuation du méthane dans l’air et on le capte dans le digesteur pour ensuite le transformer en électricité, grâce à des moteurs biogaz et des génératrices. Quand on sait que 20 % des émissions de GES dans les élevages laitiers, par exemple, proviennent des effluents d’élevage, l’installation d’une solution Biolectric est clairement une des solutions à un développement éco-responsable de ces exploitations. Les revenus pour les agriculteurs sont générés par les économies en électricité, la revente du surplus de l’électricité produite, les économies en énergie thermique et en ammonitrate – grâce à l’épandage du digestat – et la valorisation des crédits carbone.
Quelles sont les activités de Biolectric ? Et quelle est la stratégie de l’entreprise, notamment en France ?
Biolectric est spécialisé en micro méthanisation, il s’agit de notre unique activité. Nous investissons énormément en R&D et en qualité de service après-vente, car il s’agit des deux points d’une importance capitale pour une entreprise ayant une vision à long terme. En France, nous tentons de sensibiliser les autorités politiques sur le bon sens de tels investissements afin de pouvoir se déployer de manière encore plus significative sur le territoire. En effet, la microméthanisation agricole est une des clés pour assurer la pérennité des exploitations de manière responsable, contribuer à la production d’énergie verte locale, et réduire les émissions de GES et les intrants sur les terres grâce à l’utilisation du digestat.