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ÉNERGIE

SUV, vieille voiture… Qui est le mauvais élève en matière de climat et de pollution ?

PUBLIÉ LE 9 FÉVRIER 2024
PF
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SUV, vieille voiture… Qui est le mauvais élève en matière de climat et de pollution ?
Selon AAAdata, la part des SUV dans les ventes de voitures neuves a atteint 46 % pour les particuliers contre 39 % en 2019 et 19 % en 2013 / Crédit : AdobeStock
[ CHOIX DES LECTEURS * ] Lyon et Paris ont acté un triplement des tarifs de stationnement pour les véhicules lourds. Une initiative controversée. Les SUV sont-ils réellement plus polluants et plus mauvais pour le climat que les autres véhicules, comme les vieilles voitures ?

C’est une sortie de route. Le dimanche 4 février, les Parisiens se sont prononcés en faveur d’un triplement des tarifs de stationnement pour les véhicules lourds « visiteurs ». Quelques jours plus tôt, la mairie de Lyon annonçait également la mise en œuvre d’une tarification au poids, y compris pour les habitants.

Des initiatives critiquées, notamment par Pierre Chasseray, porte-parole de l’association 40 millions d’automobilistes, qui soutient que les SUV ne sont pas plus polluants que d’autres voitures.

En matière de politiques publiques, les vieilles voitures ont été les premières à être dans le viseur, notamment dans le cadre de l’instauration des Zones à Faible Émissions (ZFE-mobilité). Où se situent les SUV, en termes de pollution de l’air et d’émissions de CO2 ?
 
Les SUV sur l’autoroute du réchauffement climatique
 
Du côté des émissions de CO2, les SUV (Sport Utility Vehicles) ne sont pas sur la bonne voie, à tel point que certains modèles émettraient même davantage que des voitures de plus de 10 ans.
 
L’association britannique Possible a fait le point sur les émissions de CO2 au Royaume-Uni, et plus particulièrement à Londres. Elle a constaté, dans un rapport publié en 2023,  que les émissions « augmentent dans les zones urbaines où les SUV sont les plus populaires ». «  La mode récente vers des voitures plus grosses, plus lourdes et plus puissantes, comme les SUV, signifie qu’en moyenne, une voiture achetée en 2013 est plus susceptible d’émettre moins de CO2 qu’une voiture thermique neuve achetée en 2023 », a observé l’association. Les SUV thermiques émettent en moyenne 20 % de CO2 en plus qu’une berline, principalement en raison de leur poids : ils pèsent en moyenne 200 kg de plus qu’une voiture standard. Un résultat qui « n’étonne pas »,  Alex Keynes, spécialiste des politiques automobiles, au sein de la Fédération européenne Transport & Environnement (T&E).
 
Problème : les SUV occupent une place croissante dans le parc automobile. Ils représentent plus de la moitié des ventes de véhicules dans le monde. La situation est similaire en France. Selon un rapport de l’organisation Global Fuel Economy Initiative publié fin 2023, si les émissions de CO2 des véhicules ont baissé de 4,2 % entre 2010 et 2022, elles auraient pu chuter de 30 % supplémentaires sans la mode des SUV.
 
Les SUV électriques, une fausse bonne solution
 
En ce qui concerne les SUV électriques – dont les émissions de CO2 sont majoritairement émises lors de la production  –, ils deviennent plus vertueux pour le climat par rapport à une voiture compacte diesel à partir de 100 000 kilomètres, contre 15 000 kilomètres pour une petite citadine électrique, selon l’Ademe.
 
Tout est donc une question d’usage : la distance parcourue, donc, mais aussi l’utilisation au quotidien.  «  Si on passe d’une petite citadine thermique à un gros véhicule électrique : la balance n’est pas bonne, précise Antoine Dupont, directeur général de la Fabrique des mobilités, association dédiée à la transition écologique des transports. Mais si la grosse voiture est utilisée de manière ultra optimisée, par exemple avec 5 passagers, le bilan passager/kilomètre devient meilleur. Mais ce n’est pas le cas aujourd’hui : il y a environ 1,6 passager par voiture et par trajet ».  
 
« Le passage à l’électrique reste indispensable pour atteindre les objectifs de réduction de CO2 », appuie Alex Keynes, mais cette transition doit s’accompagner de trois autres pans : « réduire la taille des véhicules, diminuer le besoin [de voiture,ndlr], et utiliser d’autres modes de transport », ajoute Antoine Dupont. 
 
Car au-delà de leur impact carbone, les SUV électriques nécessitent 3 fois plus de cuivre et d’aluminium et 5 fois plus de lithium, nickel et cobalt qu’une petite citadine électrique, selon les calculs du WWF. Si la part des SUV continue à croître, ils risquent de provoquer des pénuries en métaux critiques et de menacer la transition du parc automobile tout entier, même en considérant les objectifs annoncés de recyclage de ces métaux, souligne l’ONG.
 
Pollution de l’air : des SUV pas si propres

Les ZFE-m visent à réduire la pollution de l’air en ville, comme les particules fines ou le dioxyde d’azote. La généralisation des filtres à particules a permis aux voitures récentes d’être plus vertueuses. C’est pourquoi les vieilles voitures – plus polluantes – sont les premières exclues des ZFE.
 
Mais il existe une autre pollution produite par les voitures lorsqu’elles roulent : celle « hors échappement »,  provenant de l’usure des freins, des pneus et de la route. Cette abrasion émet des poussières contenant des éléments métalliques et du carbone, qui représentait en France, en 2019, plus de la moitié des particules émises par les transports routiers, selon l’Ademe.
 
Plus une voiture est lourde, plus elle use les pneus et la route. Or, la masse moyenne des voitures en France a augmenté de presque 30 % entre 1990 et 2022, pour atteindre 1 233 kg en 2022, notamment en raison de la « SUV-isation » du marché.
 
Une hausse également liée à la part croissante des voitures électriques, plus lourdes en raison du poids de la batterie. En matière de pollution de l’air, l’avantage des SUV électriques est donc moins net qu’une petite voiture thermique récente. Les études ne montrent « pas d’écart significatif d’émissions totales de particules entre les véhicules électriques à forte autonomie et les véhicules thermiques neufs actuels qui n’émettent quasiment plus de particules à l’échappement », souligne l’Ademe. 
 
Problème : les vignettes Crit’Air, obligatoire pour circuler dans les ZFE, ne prennent pas en compte le poids des véhicules. Si les vieilles voitures sont pénalisées, les grosses voitures récentes ne le sont pas. 
 
Les voitures lourdes font fausse route
 
En somme : pour le climat comme pour la pollution de l’air, il est nécessaire que les véhicules lourds – y compris électriques – appuient sur la pédale de frein. L’Agence internationale de l’Energie (AIE) a elle-même appelé à sévir contre ces gros véhicules.
 
La Fabrique des Mobilités  propose de rétrograder les véhicules thermiques lourds de plus de 1 400 kg et de bonifier les voitures thermiques légères classées Crit’Air 3, en Crit’Air 2.  « Il y a un aspect social, détaille Antoine Dupont. Il est difficile de changer de véhicules pour beaucoup de gens. Or, les petits véhicules thermiques vont être aujourd’hui exclus de certaines zones [avec les ZFE, ndlr]. Nous souhaitons bonifier les voitures légères afin de laisser plus de temps pour changer de voiture ». 
 
En France, un malus pour les voitures thermiques de plus d’1,6 tonne est également instauré. La réglementation évolue aussi en Europe. Pour la première fois, l’Union européenne s’est attaquée, l’année dernière, à la pollution hors échappement, en fixant un objectif de réduction des quantités de particules provenant du freinage de 27 % d’ici 2035, avec un plafond d’émissions pour les voitures électriques et thermiques. La nouvelle norme Euro 7 a été approuvée par le Parlement en décembre, et doit maintenant être validée par le Parlement et le Conseil de l’Union européenne (UE). Des contraintes nécessaires, pour Antoine Dupont.  « Il faut garder en tête que le marché du neuf aujourd’hui, c’est le marché de l’occasion demain », rappelle-t-il. L’UE a acté la fin de la vente des véhicules thermiques neufs d’ici 2035. 


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