La société alsacienne Cooltech Applications commercialisera dès la fin de l'année le premier système de réfrigération magnétocalorique. Alternative à la réfrigération traditionnelle basée sur des cycles de compression-détente d'un fluide réfrigérant, cette nouvelle technologie divise presque par deux la consommation d'énergie et évite l'utilisation des réfrigérants liquides nocifs à l'environnement (HFC et autres). Envisagée depuis la découverte en 1881 de l'effet magnétocalorique qui lie aimantation et température dans certains métaux magnétiques, la réfrigération magnétique consiste à refroidir un matériau magnétocalorique en le soumettant cycliquement au champ d'un aimant permanent, puis à transmettre cet écart de température à un liquide caloporteur pour refroidir l'air d'une enceinte frigorifique. Dans un marché mondial du froid estimé à 20 milliards d'euros (dont un quart en Europe) consommant 15 % de l'électricité globale, l'arrivée du froid magnétique était très attendue. Mais une utilisation concrète en réfrigération n'était pas évidente pour une propriété découverte sous champs magnétiques intenses dans des gammes de tempéra-ture très en dessous de 0 °C. le premier matériau magnétocalorique fonctionnant à température ambiante, à base de gadolinium et germanium, a été conçu dès 1997. Restait à trouver le meilleur matériau parmi les différents alliages magnétocaloriques qui existent désormais, à diminuer l'intensité du champ magnétique nécessaire et à intégrer la circulation du liquide caloporteur dans un dispositif industrialisable et commercialisable à des coûts comparables aux systèmes traditionnels. Après dix ans de recherche et 240 brevets internationaux, Cooltech Applications propose le premier système opérationnel, quasi silencieux, utilisant un alliage de matériaux magnétocaloriques permettant une descente en température très efficace malgré un champ magnétique inférieur au Tesla. Destiné au marché des petites unités (vitrine froide, congélateur à crèmes glacées), il consomme moins de 100 W électriques pour produire 500 W de puissance froide : un coefficient de perfor-mance (COP) presque double de celui des systèmes traditionnels. Et son mélange caloporteur « eau-alcool », en plus d'être moins cher que les réfrigérants, est inoffensif pour l'environnement. Un énorme avantage quand, malgré une surveillance coûteuse, les fuites dans les circuits de réfrigération avoisinent 15 à 20 %. « À terme, la réfrigération magnétocalorique remplacera une bonne partie des systèmes traditionnels, souligne Vincent Delecourt, directeur marketing et commercial de Cooltech Applications. Et d'autant plus vite que les utilisateurs en percevront les avantages économiques et environnementaux. » Passée de 9 employés en 2009 à 32 aujourd'hui grâce à un financement d'Oséo de 10 millions d'euros en 2010 et à un nouvel apport de 8 millions par des fonds d'investissement privés début 2013, la jeune société Cooltech Applications se lance donc dans la production. Son nouveau bâtiment inauguré à Holtzheim (Bas-Rhin) en juillet dernier devrait produire 30 000 systèmes de réfrigération en 2014 et plus de 500 000 en 2016. Au moins. Car les ingénieurs de Cooltech Applications veulent mettre au point des systèmes de plusieurs kilowatts de puissance froide pour les vitrines centralisées et les transports réfrigérés d'ici fin 2014, adapter le système de 500 W pour la climatisation des véhicules électriques d'ici à 2016 ou 2017 et proposer des systèmes de plusieurs dizaines de kilowatts pour la surgélation d'ici à 2020. Et ils étudient aussi des matériaux complémentaires pour utiliser l'autre versant de l'effet magnétocalorique : la production de chaleur.