Jusqu’il y a peu encore, des inquiétudes subsistaient quant à l’autonomie de la batterie des véhicules électriques (VE). C’est désormais sur la faculté de pouvoir les charger lors de déplacements que des doutes persistent, explique dans cette tribune Elodie Hestin, spécialiste du stockage de l’énergie chez Socomec. Si les infrastructures de recharge des véhicules électriques (IRVE) publiques se sont multipliées ces dernières années et que l’objectif des 100 000 points de recharge a été atteint conformément aux recommandations de l’Union européenne, la nécessité de gérer les pics de demande constitue un défi majeur, développe l’autrice.
Vacances ou week-ends prolongés, les périodes de forte affluence sur les routes soulèvent l’épineux problème de la disponibilité de l’énergie pour assurer la charge d’un grand nombre de véhicules au même moment. Le stockage et la production locale de l’énergie s’imposent alors comme les principales solutions pour fournir la puissance de charge nécessaire et assurer un fonctionnement à pleine capacité des bornes de recharge.
Relever le challenge de l’augmentation de puissance requise
La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte prévoit en France que 7 millions de points de charge, dont 400 000 ouverts au public, soient installés d’ici 2030. Avec cet objectif et le développement de bornes de recharge rapides et ultra-rapides (de 50kW à 350kW), le besoin en puissance, si tous les VE venaient à charger simultanément, dépasserait largement la puissance disponible sur le réseau.
Ainsi installer un système de stockage par batteries dans des zones où la puissance disponible serait inférieure à la demande typique présente une réelle opportunité et contribue au déploiement des véhicules électriques en diminuant l’un des freins des utilisateurs.
Maximiser la rentabilité des bornes de recharge de véhicules électriques
À l’échelle d’une station de recharge, le manque de puissance disponible peut également se faire ressentir, dans ce cas cela induirait directement une baisse de rentabilité de la station, car il faudrait soit diminuer le nombre de voitures chargeant en simultané à pleine charge, soit diminuer leur puissance de charge et donc allonger la durée de la charge - diminuant ainsi le nombre de charges possibles sur une journée. Des travaux de redimensionnement de l’infrastructure du réseau électrique pourraient prendre jusqu’à deux ans pour être mis en œuvre ; un temps qu’un opérateur de bornes de recharge (CPO) qui souhaite conserver ou gagner des parts de marché ne peut pas perdre.
Ainsi, les CPO sont enclins à installer des solutions énergétiques flexibles et puissantes afin d’éviter des investissements massifs dans les infrastructures de réseaux électriques. Les systèmes de stockage d’énergie par batteries (BESS) représentent des solutions de choix car ils permettent de décupler simplement et rapidement, pour un coût maîtrisé, la puissance disponible d’un point de connexion réseau pour répondre aux pics de puissance générés par les recharges de véhicules électriques.
En outre, des systèmes de stockage d’énergie transportables ont récemment fait leur apparition : il s’agit alors de livrer les BESS déjà câblés (pour la partie DC) et montés en usine sur une structure métallique. Cela permet un gain de temps considérable, le système est livré sur place et il ne reste plus qu’à connecter le réseau puis les interfaces de communication avant de pouvoir mettre le système en service. Celui-ci peut ensuite être déplacé d’un site à l’autre pour déployer rapidement la recharge en attendant les connexions au réseau, ou pour fournir des lieux touristiques saisonniers en IRVE abordables.
Stockage, photovoltaïque et pilotage : triptyque gagnant
Pour limiter encore davantage la dépendance au réseau, et proposer une énergie d’origine renouvelable, associer ces points de charge à des installations photovoltaïques (PV) est aujourd’hui une piste plus que crédible. En France, entre la loi ENR, imposant l’installation d’ombrières photovoltaïques sur les parkings des entreprises de 1 500 m² et plus, et la loi d’orientation des mobilités (LOM) qui impose des points de recharge pour les bâtiments tertiaires, industriels et de service public, l’association PV / Stockage / Bornes de recharge fait d’autant plus de sens. La consommation de l’énergie intermittente produite par les panneaux solaires est optimisée : le surplus d’énergie est stocké pendant les faibles demandes de pointe, puis libéré pour charger les véhicules électriques lors des périodes de demandes élevées. Enfin, pour optimiser au maximum une telle installation, il convient de recourir à des logiciels de pilotage qui pourront - entre autres - gérer la répartition de la puissance de charge disponible entre les différents véhicules. Avec une fine analyse des données, les opérateurs sont en mesure de stocker et d’utiliser l’énergie de manière stratégique afin de gérer les pics de demande sur le réseau, garantir le fonctionnement optimal des bornes et contribuer à la durabilité des stations de recharge.