CE, 6 mai 2015, Monsieur B., n° 377487 La cour administrative d'appel de Marseille avait jugé que l'appontement, l'escalier et la cale de mise à l'eau utilisés par le requérant empiétaient sur le domaine public maritime à Bonifacio et par conséquent l'avait condamné à remettre en état les lieux qu'il occupait sur le domaine public maritime, sous astreinte de 75 euros par jour de retard à l'issue d'un délai de deux mois à compter de la notification du jugement du tribunal administratif.
Le Conseil d'État rappelle dans un premier temps que le juge de l'exécution est « tenu par l'autorité de la chose jugée par la décision dont l'exécution est demandée ». Par suite, la seule subsistance d'une partie des installations litigieuses sur le domaine public autorise le juge de l'exécution à prononcer une astreinte à l'encontre du requérant.
Il s'engage ensuite dans une démarche pédagogique afin de souligner qu'en droit français et en droit européen, la faculté du juge de prononcer une astreinte a le caractère d'un principe général, ne constitue ni une sanction ni une peine, et que « s'il n'appartient qu'au législateur de déterminer, d'étendre ou de restreindre les limites de cette faculté, le juge peut, en l'absence de dispositions législatives en ce sens, en faire usage sans texte ».
Ainsi, d'une part, en droit français, le fait que cette faculté du juge administratif de « liquider une astreinte à l'encontre d'une personne privée occupant irrégulièrement le domaine public ne soit pas prévue par la loi ne [méconnaît] aucune disposition à valeur constitutionnelle, et notamment pas l'exigence de séparation des pouvoirs ».
D'autre part, l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales relatif à la protection de la propriété stipule notamment que « Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi ». Selon l'interprétation de la Cour européenne des droits de l'homme, la mention « les conditions prévues par la loi » doit être comprise comme visant à la fois le droit écrit et le droit non écrit, et exige uniquement que ce droit soit accessible, précis et prévisible pour le citoyen afin qu'il puisse prévoir les conséquences qui peuvent découler d'un acte déterminé.
Or en l'espèce, la faculté pour le juge administratif statuant en matière d'occupation irrégulière du domaine public d'assortir sa décision d'une astreinte est une pratique établie depuis plusieurs décennies. Ainsi la personne qui fait l'objet d'une action contentieuse devant ce juge peut aisément prévoir l'adoption de cette mesure par le juge.