Avril 2010. Sur une zone du centre d'enfouissement technique (CET) close depuis les années 1970, les engins de chantiers s'affairent. Ils achèvent l'excavation de près de 20 000 m3 de déchets, sur une surface de 3 500 m2, constituant le septième casier. « Ainsi, nous aurons une autorisation d'exploiter pour les six prochaines années. Le site de Malleville-sur-le-Bec aura alors atteint sa pleine capacité », souligne Séverine Chapelle, directrice générale des services du Sdomode, le syndicat de destruction des ordures ménagères de l'ouest du département de l'Eure. Or c'est le seul centre d'enfouissement sur le périmètre du syndicat. Face à la difficulté notoire d'ouvrir un nouveau site, il explore donc, avec l'aide du bureau d'études environnementales Inddigo, la piste de l'excavation-criblage, encore peu courante en France.
L'objectif est double. D'une part, assainir le site. Sur les 25 hectares du CET, 15 ha sont une ancienne décharge, où quelque 6 mètres de déchets sont déposés directement sur la couche d'argile. L'idée est donc de creuser jusqu'à une profondeur de 12 mètres et de créer un nouveau casier - aux normes - afin de gagner quelques années d'exploitation sur l'exutoire des déchets ultimes. Aux commandes de l'opération, les sociétés Ikos Environnement et EBTP. D'autre part, caractériser ces déchets du passé, pour tenter de leur trouver un nouvel avenir.
La faisabilité pratique du déstockage et du tri mécanique a été démontrée, ce qui est une première bonne nouvelle. L'opération est quasiment inodore : une vaporisation d'huiles essentielles a suffi à neutraliser les quelques odeurs. De plus, aucune trace de pollution dans la barrière argileuse. Mais que faire des déchets exhumés ? Le Sdomode a cherché à identifier les fractions valorisables, selon la méthode Modecom de l'Ademe. Ainsi, en 2008, sept puits ont été forés, sur l'ensemble du site, pour identifier la composition des poubelles du passé.
Les analyses montrent une composition homogène sur l'ensemble du gisement, constitué à 44 % de fines, à 41 % de plastiques lourds et de résidus (textiles, cuir, petits encombrants, bois, etc.), à 9,5 % de plastiques légers, à 3 % de verre et à 2,6 % de métaux - une faible fraction qui a surpris l'équipe du syndicat. La fraction fine issue de l'excavation est donc en cours de valorisation sous forme de déchets inertes sur le site.
Quant à la fraction moyenne (plastiques, métaux, verre et autres résidus), la possibilité d'une valorisation sous forme de combustible secondaire de récupération, envisagée initialement, est réduite. En effet, seuls 23 % de cette fraction est séparable par soufflage, le pouvoir calorifique inférieur n'étant pas suffisant pour une utilisation en fours de cimenterie ou de chaux, notamment du fait de l'humidité. L'énergie nécessaire pour sécher cette matière première n'a cependant pas été estimée. Mais, autre obstacle d'importance : une teneur en chlore deux fois supérieure aux exigences, qui implique de trier les plastiques contenant cet élément. Aussi, pour l'instant, cette fraction est enfouie sur le site, mais les réflexions se poursuivent pour l'optimiser.