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Tribune | « Indice de durabilité : une opportunité pour les fabricants de produits électroménagers et high-tech d'intégrer le développement durable dans leur ADN »
PUBLIÉ LE 2 MAI 2024
PAR JULIEN NIVELET, COUNTRY MANAGER FRANCE, DUUX BV
Le gouvernement continue de dérouler les étapes de la Loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC), avec l’entrée en vigueur d’un indice de durabilité prévue pour fin 2024. Si celui-ci ne concernerait, dans un premier temps, que les téléviseurs puis les lave-linge, il devrait s’appliquer à l’ensemble des produits électroménagers et high-tech dans un futur proche, explique dans cette tribune Julien Nivelet, country manager France au sein Duux BV, entreprise spécialisée dans le traitement de l’air.
Cet indice a pour objectif de remplacer celui de réparabilité, mis en place depuis 2021, qui vise à informer le consommateur sur le caractère plus ou moins réparable de ses achats. Fonctionnant de manière similaire, l’indice de durabilité comprendra désormais deux nouveaux critères, à savoir la fiabilité du produit et son évolutivité. Une note sur 10 sera attribuée, basée sur le taux de disponibilité des pièces détachées, leur prix, la documentation disponible pour réparer l’appareil, leur résistance face à l’usure, leur robustesse et leur facilité d’entretien.
L’objectif du gouvernement est clair : les fabricants doivent désormais privilégier la longévité de leurs produits. Au-delà d’une simple information à destination des consommateurs, un passage à l’acte doit s’opérer, mais cette transformation pourrait être difficile à amorcer, l’obsolescence programmée ayant été longtemps monnaie courante pour le secteur.
Une réparabilité essentielle, mais pas toujours possible
S’inscrivant dans une prise de conscience plus large sur le développement durable et l’environnement, la réparabilité a fait son chemin, ces dernières années. Selon le sixième baromètre du SAV Fnac-Darty, les clients remplacent moins leurs produits en cas de panne, privilégiant la réparation, à condition que celle-ci ne soit pas financièrement rédhibitoire .
Face à ce constat, de nombreux retailers ont mis en œuvre des services d’abonnement pour faciliter la réparation, à l’image de Darty Max, Boulanger Infinity ou encore Leroy Merlin Home Index – et d’autres devront très bientôt voir le jour. Des services gérés par des tiers, comme Murphy, ont également été créé et tous semblent fortement plébiscités par les consommateurs. Le recours aux SAV des retailers et autres services de réparation constitue une première étape pour les fabricants cherchant à augmenter la réparabilité de leurs produits pour aller dans le sens de cette future réglementation.
Toutefois, certains prérequis doivent être mis en œuvre pour permettre une réparation facile des produits par des tiers, et ces derniers ont d’ailleurs été pris en compte lorsque le gouvernement a pensé l’indice de durabilité. Les pièces de rechange doivent avant tout être à un coût rentable. Dans une interview accordée au Figaro en octobre 2023, Régis Koenig, directeur réparation et durabilité chez Fnac Darty, déplorait des pièces « trop chères par rapport au prix du produit réparé, ce qui dissuade les clients ».
Leur accessibilité ou livraison rapide par le fabricant sont également des critères importants, attendre 7 semaines pour remplacer la pièce défectueuse d’une machine à laver pourrait en décourager plus d’un, alors que la livraison d’une machine neuve peut avoir lieu en moins d’une semaine. Enfin, la formation des équipes des SAV et autres services de réparation est cruciale pour garantir la bonne réparation des produits. Un modèle gagnant pour tous, qu’ils s’agissent des consommateurs, des retailers ou des fabricants.
Penser la durabilité dès la conception
Selon une étude du Gifam, le Groupement des marques d’appareils pour la maison, 74 % des Français accepteraient de dépenser davantage pour acquérir un appareil de petit électroménager (aspirateur, sèche-cheveux, mixeur…) avec une plus grande durée de vie. Un taux qui monte à 83 % pour le gros électroménager (lave-linge, four, sèche-linge…).
Entre réglementation et attente des consommateurs, les fabricants peuvent aller plus loin et intégrer véritablement la durabilité dans leur ADN. Une première solution serait d’étendre la réparabilité à certaines catégories de produit dès leur conception en y intégrant des composants modulaires. Les consommateurs pourraient alors se procurer les pièces de rechange en magasin ou sur le site du fabricant et ainsi réparer eux-mêmes leurs produits high-tech à condition que le fabricant fournisse également un manuel papier ou vidéo. Certaines marques proposent déjà cela en permettant aux clients d’échanger avec leur SAV via leur application. En cas de panne, ce dernier peut alors facilement commander pour le client la pièce de rechange dont il a besoin et prodiguer de précieux conseils.
Une autre façon de prolonger la durée de vie des produits serait de mettre en place des programmes de réparations internes. Ce serait alors au fabricant d’intervenir dans la réparation du produit. Mais cela nécessite une couverture géographique très granulaire ; contraintes infranchissables pour certaines marques.
Si la réparabilité et la fiabilité des produits électroménagers et high-tech sont primordiales, ce ne sont pas les seuls chantiers en matière de développement durable auxquels les fabricants doivent s’attaquer. Choix des matériaux, consommation énergétique, packaging ou encore recyclage ; autant de sujets qui importent aux consommateurs. En portant une réelle attention à cet ensemble de critères, les fabricants renforceront leur image de marque. Il ne s’agit pas uniquement de se conformer à une réglementation, mais bien d’impulser un changement profond et définitif sur les pratiques du secteur.