Le Code de la voirie routière (art. L. 112-1) confirme une jurisprudence constante du Conseil d'État selon laquelle l'alignement ne s'applique qu'aux voies classées dans le domaine public (autoroutes, routes nationales et départementales, voies communautaires, voies communales). Il n'appartient pas aux autorités administratives d'intervenir dans les relations entre riverains d'une voie privée pour en définir les limites. Par ailleurs, l'alignement ne s'applique pas aux chemins ruraux qui font partie du domaine privé de la commune.
I. Procédure
Le plan d'alignement détermine après enquête publique la limite entre voie publique et propriétés riveraines. L'enquête publique est ouverte par l'autorité exécutive de la collectivité territoriale ou de l'établissement public de coopération intercommunale, propriétaire de la voie, et organisée, depuis la loi Grenelle 2 qui a réformé l'enquête publique, conformément aux dispositions du Code de l'expropriation pour cause d'utilité publique.
Un plan parcellaire comportant l'indication des limites existantes de la voie, des parcelles riveraines et des bâtiments existants, ainsi que des limites projetées de la voie, doit être joint au plan d'alignement.
S'agissant des voies communales, le conseil municipal est compétent pour l'établissement des plans d'alignement (art. L. 2541-12 du Code général des collectivités territoriales). Il lui appartient de délibérer, au vu des résultats de l'enquête publique, pour approuver le plan.
Les plans d'alignement sont opposables, à l'administration et aux riverains, à partir de leur publication. Une notification aux propriétaires concernés n'est pas nécessaire, compte tenu de la notification particulière qui leur a été faite lors de la phase de l'enquête publique.
Les plans d'alignement figurent en outre au nombre des servitudes d'utilité publique affectant l'utilisation du sol qui doivent apparaître en annexe au plan local d'urbanisme (Plu) pour être opposables (art. R. 126-1 du Code de l'urbanisme).
II. Effets
Sont concernées par les plans d'alignement les modifications des limites du domaine public (élargissements ou redressements) de faible importance, à l'exclusion de la création de voies nouvelles. De même, la procédure d'alignement ne peut s'appliquer à des modifications qui comportent une emprise importante sur les terrains privés bordant la voie publique.
Par ailleurs, le plan d'alignement ne peut avoir pour effet de frapper d'une servitude de reculement un immeuble classé parmi les monuments historiques (art. L. 112-6 du Code de la voirie routière).
Le plan d'alignement a pour principaux effets :
l'interdiction d'édifier une construction nouvelle sur la parcelle frappée d'alignement ;
l'interdiction d'effectuer des travaux confortatifs sur les constructions existantes (sauf s'il s'agit d'un immeuble classé parmi les monuments historiques) ;
en cas d'élargissement de l'emprise publique, le transfert de propriété des parcelles non bâties qui se trouvent placées en avant de l'alignement ;
1) En cas d'élargissement de l'emprise publique
La décision de l'autorité compétente approuvant le plan d'alignement entraîne le rattachement au domaine de la voirie publique des terrains inclus dans les limites qu'il fixe. La prise de possession par la collectivité publique diffère toutefois selon qu'il s'agit de terrains nus ou de terrains bâtis (ou clos de murs).
Pour les terrains nus : la publication du plan d'alignement entraîne le classement immédiat dans le domaine public de la collectivité propriétaire de la voie des parcelles non bâties. Toutefois, la prise de possession ne peut intervenir qu'après paiement ou consignation de l'indemnité due au propriétaire correspond à la valeur du terrain nu des parcelles comprises dans les limites déterminées par le plan d'alignement.
pour les terrains bâtis (ou clos de murs) : la publication du plan d'alignement grève les terrains d'une servitude de reculement. Le cas échéant, cette servitude doit être annexée au Plu. Cette servitude entraîne l'interdiction pour le propriétaire d'un terrain bâti de procéder, sur la partie frappée d'alignement, à l'édification de toute construction nouvelle, qu'il s'agisse de bâtiments neufs remplaçant des constructions existantes, de bâtiments complémentaires ou d'une surélévation. Elle entraîne par ailleurs l'interdiction de procéder, sur le bâtiment frappé d'alignement, à des travaux confortatifs tels que renforcement des murs, établissement de dispositifs de soutien, substitution d'aménagements neufs à des dispositions vétustes, application d'enduits destinés à maintenir les murs en parfait état, etc.
Le transfert de propriété n'intervient qu'au moment du constat de l'état de ruine du bâtiment et des clôtures ou de la démolition par le propriétaire.
2) En cas de rétrécissement de l'emprise
Le rétrécissement de la voie conduit à la création de délaissés. La collectivité a la faculté de les vendre (après leur déclassement) à un riverain qui bénéficie, le cas échéant, d'une priorité.
Textes de référence
Code de la voirie routière
Article L. 112-1
L'alignement est la détermination par l'autorité administrative de la limite du domaine public routier au droit des propriétés riveraines. Il est fixé soit par un plan d'alignement, soit par un alignement individuel.
Le plan d'alignement, auquel est joint un plan parcellaire, détermine après enquête publique ouverte par l'autorité exécutive de la collectivité territoriale ou de l'établissement public de coopération intercommunale, propriétaire de la voie, et organisée conformément aux dispositions du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique la limite entre voie publique et propriétés riveraines.
L'alignement individuel est délivré au propriétaire conformément au plan d'alignement s'il en existe un. En l'absence d'un tel plan, il constate la limite de la voie publique au droit de la propriété riveraine.
Article L. 112-2
La publication d'un plan d'alignement attribue de plein droit à la collectivité propriétaire de la voie publique le sol des propriétés non bâties dans les limites qu'il détermine.
Le sol des propriétés bâties à la date de publication du plan d'alignement est attribué à la collectivité propriétaire de la voie dès la destruction du bâtiment.
Lors du transfert de propriété, l'indemnité est, à défaut d'accord amiable, fixée et payée comme en matière d'expropriation.
Article L. 112-3
L'alignement individuel est délivré par le représentant de l'Etat dans le département, le président du conseil général ou le maire, selon qu'il s'agit d'une route nationale, d'une route départementale ou d'une voie communale.
Dans les agglomérations, lorsque le maire n'est pas compétent pour délivrer l'alignement, il doit obligatoirement être consulté.
Article L. 112-4
L'alignement individuel ne peut être refusé au propriétaire qui en fait la demande.
Article L. 112-5
Aucune construction nouvelle ne peut, à quelque hauteur que ce soit, empiéter sur l'alignement, sous réserve des règles particulières relatives aux saillies.
Article L. 112-6
Aucun travail confortatif ne peut être entrepris sur un bâtiment frappé d'alignement, sauf s'il s'agit d'un immeuble classé parmi les monuments historiques.
Article L. 112-7
Lorsqu'une construction nouvelle est édifiée en bordure du domaine public routier, l'autorité chargée de la conservation de la voie dispose des pouvoirs de vérification qui lui sont attribués par l'article L. 460-1 du code de l'urbanisme.
Article L. 112-8
Les propriétaires riverains des voies du domaine public routier ont une priorité pour l'acquisition des parcelles situées au droit de leur propriété et déclassées par suite d'un changement de tracé de ces voies ou de l'ouverture d'une voie nouvelle. Le prix de cession est estimé, à défaut d'accord amiable, comme en matière d'expropriation.
Si, mis en demeure d'acquérir ces parcelles, ils ne se portent pas acquéreurs dans un délai d'un mois, il est procédé à l'aliénation de ces parcelles suivant les règles applicables au domaine concerné.
Lorsque les parcelles déclassées sont acquises par les propriétaires des terrains d'emprise de la voie nouvelle, elles peuvent être cédées par voie d'échange ou de compensation de prix.
Les mêmes dispositions s'appliquent aux délaissés résultant d'une modification de l'alignement.
Article R. 112-2
Le transfert de propriétés des terrains non bâtis et les limitations au droit de propriété des terrains bâtis résultant d'un plan d'alignement donnent lieu aux formalités de publicité foncière. Il en va de même du transfert de la propriété du sol prévue au deuxième alinéa de l'article L. 112-2.
Article R. 112-3
Des arrêtés portant règlement de voirie pris par le préfet, le président du conseil général ou le maire, selon qu'il s'agit d'une route nationale, d'une route départementale ou d'une voie communale, fixent les dimensions maximales des saillies autorisées.
Code général de la propriété des personnes publiques
Article L. 2111-14
Le domaine public routier comprend l'ensemble des biens appartenant à une personne publique mentionnée à l'article L. 1 et affectés aux besoins de la circulation terrestre, à l'exception des voies ferrées.
Code général des collectivités territoriales
Article L. 2541-12
Le conseil municipal délibère notamment sur les objets suivants : [...]
7° L'ouverture et la modification des voies communales et places publiques, ainsi que leurs plans d'alignement ; [...]
Article L. 2543-3
Sont inscrites au budget communal les dépenses nécessaires pour remplir les obligations imposées par la loi aux communes.
Sont obligatoires : [...]
8° Les frais d'établissement, dans les communes de plus de 2 000 habitants, du plan d'alignement ; [...]
Code l'urbanisme
Article R. 126-1
Doivent figurer en annexe au plan local d'urbanisme les servitudes d'utilité publique affectant l'utilisation du sol et appartenant aux catégories figurant sur la liste annexée au présent chapitre. [...]