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TERRITOIRES

Europacity : du pain et des jeux

PUBLIÉ LE 7 OCTOBRE 2016
LA RÉDACTION
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Skier à deux pas de l’aéroport de Roissy, après avoir déambulé dans les allées du plus grand centre commercial de France et avant de voir, toujours sur place, un spectacle de cirque ou une exposition… Ce sera sans doute possible dans moins de dix ans. Alliages & Territoires prévoit en effet d’ouvrir en 2024 Europacity, la « nouvelle destination des loisirs du Grand Paris », comme aime à la présenter cette filiale d’Immochan. Le maître d’ouvrage espère y attirer annuellement 31 millions de curieux (deux fois plus qu’à Eurodisney !), dont 6 millions de touristes, invités à y vivre une « expérience à 360° », mêlant, « Sun-emotion », « Show-emotion » ou « Hype-emotion »... Comme au bon vieux temps de l’urbanisme fonctionnel, ce « centre commercial, ludique et culturel », qui se targue, comme tout aujourd’hui, d’être « écoresponsable », sera implanté sur les terres agricoles du triangle de Gonesse qui, soumises au plan d’exposition au bruit de Roissy, ne peuvent accueillir aucun logement. Opportunité économique rêvée pour ce territoire défavorisé ou cauchemar consumériste à l’empreinte environnementale et sociale démesurée, artificialisant les dernières terres fertiles aux portes de la capitale ?En tout cas, deux visions du monde a priori irréconciliables. D’un côté, une majorité d’élus nationaux et locaux subjugués par les 11?800 emplois promis ainsi que par l’arrivée d’une station de la future ligne 17 du métro du Grand Paris Express. De l’autre, des opposants qui contestent un chiffre surévalué, amalgamant emplois générés par le chantier et par la phase d’exploitation, et n’intégrant pas les potentielles destructions de postes dans les centres-ville et les déjà nombreux centres commerciaux alentours. « Il est surprenant qu’un groupe comme Auchan puisse présenter un projet tenant aussi peu compte des grands enjeux de la COP21. Alliages & Territoires avait pourtant l’occasion de concevoir un grand complexe zéro déchets et à énergie positive. L’idéal étant que celui-ci soit bâti sur les terres déjà artificialisées de la friche PSA d’Aulnay-sous-Bois, toute proche. Pour l’instant, ils n’ont fait que “verdir” un projet qui n’était pas du tout écologique au départ », estime le conseiller régional Modem d’Île-de-France Yann Wehrling, prenant à contre-pied le reste de la majorité régionale qui s’est déclarée favorable au projet tout en posant certaines conditions sur le front de l’emploi, de la formation, des déplacements...Opportunité de l’urbanisation du triangle de Gonesse, accessibilité du site, nombre d’emplois réellement créés, leur adéquation avec la formation des candidats locaux, accès des populations voisines aux loisirs proposés… Maintes questions ont été abordées au cours du débat public organisé sur le projet entre le 15 mars et le 13 juillet dernier. Un débat biaisé, car « saucissonné » et joué d’avance, dénoncent cependant les opposants. « De nombreuses concertations ont été organisées sur l’urbanisation du  triangle de Gonesse, la ligne 17 du métro, le barreau de Gonesse devant relier RER B et D ou sa préfiguration sous la forme d’un bus à haut niveau de service. Mais pour beaucoup de citoyens, il aurait été préférable de débattre de l’ensemble du projet en amont », rapportait ainsi début septembre Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public, lors de la restitution du débat sur le seul projet privé Europacity. Dans la synthèse de son avis sur le projet, l’Autorité environnementale considère d’ailleurs « que cette approche n’est pas de nature à garantir de façon optimale le respect du principe de participation du public, plusieurs consultations étant conduites en parallèle sur des projets intimement liés, sur la base d’informations incomplètes, laissant penser que leurs autorisations peuvent être prises indépendamment les unes des autres. »Le collectif pour le triangle de Gonesse dénonce en outre, « comme dans tous les grands projets inutiles et imposés », un « passage en force des pouvoirs publics et privés », qu’illustre par exemple l’annonce faite en septembre aux agriculteurs locaux du début imminent des travaux de la gare de la ligne 17... Une thèse que de nombreux éléments corroborent. Ici, un communiqué de presse commun de la CCI Paris-Ile-de-France et du maître d’ouvrage indiquant, sans utilisation du conditionnel, qu’EuropaCity « ouvrira en 2024 ». Là une page web titrée : « Un débat public pour coconstruire ensemble EuropaCity »… « Nous avons été obligés à plusieurs reprises de rappeler au cours des réunions que l’objectif du débat public n’était pas la coconstruction du projet, mais de poser la question de son opportunité », regrette ainsi Claude Brévan, présidente de la Commission particulière qui a mené les débats.  Et même s’il promet une évolution du projet « en termes d’offre commerciale, d’insertion dans son environnement et son territoire ou de modalité d’association de toutes les parties prenantes », on mesure également le peu de cas accordé par Alliages & Territoires au débat citoyen quand son directeur général, Christophe Dalstein, annonce sa poursuite, à peine achevée la présentation des conclusions du débat public. « Une réaction aussi rapide est très inhabituelle. Ce qui nous aurait intéressés, c’est qu’il nous en dise plus sur les modifications qui seront apportées au projet. Je suppose que des garanties devaient être données aux investisseurs », commente Claude Brévan. Sûrement une simple coïncidence, la veille Le Figaro annonçait que le géant chinois de l’immobilier et du divertissement Dalian Wanda prenait, après un premier accord de partenariat signé en février, « une participation de 49,9 % » dans le projet Europacity. « Ce n’est pas l’intérêt économique francilien qui est en jeu ici. Mais celui d’Auchan qui, en contrepartie, pourra pénétrer davantage le marché chinois », déplore Bernard Loup, coprésident du Collectif pour le triangle de Gonesse qui rejette le projet et, plus globalement, l’urbanisation de la zone. Le Collectif, qui fédère 17 associations, poursuit son bras de fer contre le maître d’ouvrage et promet d’activer tous les recours possibles, mais les forces en présence sont légèrement déséquilibrées…Car, même si la ministre du Logement a commandé au Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) une étude qui devait lui être remise fin octobre-début novembre sur « l’aménagement de la zone du Grand Bourget », l’État soutient le projet depuis le début. De l’ancien ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius, par voie de presse, au Premier ministre, à l’occasion d’un comité interministériel consacré au Grand Paris en octobre 2014, et jusqu’au président de la République, qui recevait en personne, en février 2016, Vianney Mulliez, le président d’Auchan Holding, et Wang Jianlin, celui de... Dalian Wanda.Selon plusieurs sources, Auchan se serait en outre engagé à financer en partie la future station de métro de la ligne 17 qui desservira principalement le mégacomplexe commercial. L’État et la Région souhaitent depuis une vingtaine d’années urbaniser ce triangle de culture intensive pour développer l’attractivité économique de la zone et même, grâce à ses deux dessertes aéroportuaires, du pays.Le schéma directeur de la région (Sdrif), revu en 2013, donne, sous certaines conditions, la possibilité d’urbaniser le triangle, imposant la conservation d’au moins 400 hectares de terres agricoles. Ce n’est pas une obligation, et l’interprétation du schéma est soumise à discussion, mais « les pouvoirs publics ont pris la décision, assumée, de concentrer le développement économique sur ce secteur très enclavé et bien desservi, afin de freiner la multiplication anarchique de petites zones d’activité plus au nord », justifie Damien Robert, directeur général de l’EPA Plaine de France. L’aménageur public souhaite développer un quartier d’affaires jouxtant Europacity dans la ZAC de 300 hectares, dont l’arrêté préfectoral de création devait être publié fin septembre. Europacity figurait d’ailleurs déjà dans le dossier de création de la ZAC du Triangle de Gonesse, approuvé le 28 juin 2016 par le conseil d’administration de l’EPA. « L’établissement n’a pas d’autres locomotives pour légitimer la création de la ZAC. Et n’en a pas cherché d’autres », accuse Bernard Loup.Le projet d’Immochan est donc sur des rails que rien ne semble pouvoir dévier. Alliages & Territoires, qui a déjà englouti 30 millions d’euros d’études dans le projet, doit en présenter une version remaniée avant le 12 décembre. « Que ce soit pour l’autosuffisance énergétique du complexe, a priori difficile à atteindre, la gestion des déchets pour laquelle une ouverture à d’autres acteurs du territoire est nécessaire, de l’eau, des déplacements, etc., il reste encore énormément de travail et beaucoup de choses à concrétiser », observe cependant Claude Brévan. « La réussite de ce projet dépendra de la capacité du maître d’ouvrage à intégrer les éléments clés du débat public. Et de l’instauration d’un meilleur climat de confiance impliquant la prise d’engagements précis », ajoute Christian Leyrit. Au risque de voir la ZAC se transformer en une nouvelle ZAD…  Fabian Tubiana
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