Grégoire Koudrine, directeur de la Supply Chain de Manutan. Crédits : Manutan
A l’heure où la RSE et les enjeux environnementaux sont au cœur des préoccupations des entreprises, la supply chain durable est devenue à la fois un impératif, un enjeu commercial mais aussi un défi au quotidien. Grégoire Koudrine, directeur de la Supply Chain de Manutan, s’exprime sur la mise en place d’une chaîne logistique durable.
De l’approvisionnement à l’emballage, de l’organisation des entrepôts à l’optimisation des transports en passant par les bâtiments logistiques, des solutions existent pour réduire son empreinte carbone tout en améliorant l’expérience client.
La mise en œuvre de cette supply chain durable exige un fort degré d’engagement de toute l’entreprise dans une démarche RSE, cela implique de revoir chaque étape avec un double objectif : réduire au maximum l’impact environnemental et assurer la performance. Seule une approche globale permettra d’obtenir un résultat pérenne.
Déployer une politique d’achats responsables !
Parce qu’elle concerne en premier lieu les flux d’approvisionnements, la chaîne logistique est étroitement liée à la fonction achat. La politique d’achats dit « responsables » de l’entreprise est donc au cœur de sa stratégie RSE et contribue à réduire son impact environnemental.
Elle repose sur le choix des fournisseurs qui ne doivent plus être uniquement sélectionnés sur des critères économiques mais aussi sur des critères environnementaux rigoureux. C’est déjà le cas sur le marché public et ce de façon obligatoire !
Cet achat favorise par ailleurs l’émergence de l’économie circulaire, basée sur l’éco-conception et le recyclage des produits. Il privilégie bien souvent les circuits courts et les fournisseurs locaux, permettant ainsi de réduire les kms parcourus et donc les émissions de carbone.
Investir dans des bâtiments logistiques « haute qualité environnementale »
Parce qu’il est le maillon central de la chaîne logistique, l’entrepôt doit répondre à des exigences environnementales fortes, notamment celle d’être un bâtiment durable construit avec la certification NF HQE (haute qualité environnementale), impliquant un respect strict de la législation et des obligations en termes d’écologie. Le dispositif législatif vise ainsi « à limiter à court et à long terme les impacts environnementaux d’une opération de construction ou de réhabilitation, tout en assurant aux occupants des conditions de vie saines et confortables ».
C’est une vue à 360 degrés du parc immobilier qu’il est nécessaire d’avoir. De la réutilisation des eaux pluviales aux éclairages LED tenant compte de la luminosité environnante ; du chauffage en géothermie aux multiplications de puits de lumière en toiture, il y a de multiples façons de rendre très concrète cette ambition environnementale. Des matériaux de qualité et des technologies performantes (et désormais abordables) permettent aux entreprises d’entrer dans cette démarche, à leur rythme, en fonction de leurs moyens.
De la réception à la préparation des colis : les bonnes pratiques pour limiter déchets et emballages !
Là encore, il s’agit d’analyser l’ensemble des process allant de l’entrée en stock à l’expédition des commandes et d’identifier à chaque étape les sources de gaspillage et de non-valeur ajoutée pour les clients. Avoir le bon niveau de stock ou bien même réduire les taux d’erreurs de préparation de commandes sont non seulement favorables à la bonne marche économique de l’entreprise mais sont autant d’efforts qui contribueront à réduire la production de déchets et la consommation énergétique.
Par ailleurs, la capacité des équipes logistiques à profiter des innovations technologiques pour optimiser le remplissage des colis expédiés aux clients est essentielle. Il est maintenant possible d’adapter avec beaucoup de précision le carton d’emballage aux produits livrés. Plus de colis vide expédié, plus d’emballage superflu, plus de plastique éparpillé pour essayer de caler les produits : tout le monde sort gagnant et l’expérience client s’en trouve améliorée.
La question de l’impact du transport est devenue incontournable !
Dès lors qu’on évoque le transport en camions à moteurs thermiques, il est complexe de percevoir l’aspect « green ». Et pourtant, de nombreuses actions sont menées par tout « l’écosystème transport » pour réduire son empreinte carbone.
D’abord, il s’agit de la mesurer… et ce n’est pas toujours simple. Que la fonction transport soit en propre ou sous-traitée, cette mesure est bien souvent différente d’un acteur à l’autre. Il faut donc se faire sa propre religion sur ce sujet et faire en sorte qu’elle soit utilisable en interne comme en externe pour un faire un véritable levier d’amélioration de performance. Ensuite, il faut réduire cette empreinte carbone liée au transport en revenant à ce qui peut paraître une évidence : plus les camions sont pleins, moins l’empreinte carbone est importante. Remplir au maximum les remorques quels qu’en soit les moyens devient un enjeu à part entière. Charger en vrac ou au moyen de doubles planchers s’apparente ainsi à une bonne pratique du marché. Encore faut-il s’en donner les moyens en investissant sur les équipements nécessaires pour en faciliter les opérations de chargement et de déchargement.
De même, proposer des solutions de livraisons qui ont pu paraître à une époque « d’un autre temps » mais qui apparaissent aujourd’hui innovantes devient un enjeu essentiel. Ne livrer qu’une seule fois par semaine des clients habituellement livrés tous les jours ou bien livrer en un petit peu plus de temps que d’habitude mais de façon plus économe en énergie (livraison en gaz naturel, en électrique etc.) devient un élément important de réflexion comme de différenciation. Le marché y est prêt et les technologies progressent à grand pas !
Evidemment, la construction d’une supply chain durable ne peut se faire qu’en cohérence avec la politique RSE de son entreprise. Cette supply chain durable vient nourrir une vue plus holistique définie à l’échelle de l’entreprise dans son ensemble. Cela n’empêche pas de devoir être réaliste et donc pragmatique, les obstacles étant nombreux. La politique des « petits-pas » et du « test & learn » est bien souvent une méthode efficace. Une chose est sûre : elle doit être au service d’une meilleure expérience client et c’est désormais possible !