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BIODIVERSITÉ

Comment les entreprises décodent la biodiversité

PUBLIÉ LE 1er JUILLET 2011
LA RÉDACTION
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Le magazine pour les acteurs et décideurs du développement durable et des métiers de l’environnement.
1-ÉVALUER SES LIENS AVEC LA BIODIVERSITÉ Des outils aident les entreprises à dresser un état zéro de leurs rapports à la biodiversité. Et leur donnent les clés d'une simple sensibilisation, jusqu'à une réelle mise en perspective de leur système de management environnemental. Pionnière sur le sujet, l'association Orée a lancé, dès 2006, avec l'Institut français de la biodiversité, son indicateur d'interdépendance de l'entreprise à la biodiversité sur la base de cinq critères (liens avec le monde vivant, marchés, impacts, compensation et stratégies internes). Testé à l'époque par une vingtaine d'entreprises pilotes, l'IIEB a ouvert la voie à une nouvelle approche de la biodiversité. « Il a surtout eu le mérite de situer les entreprises sur des terres quasi inconnues », juge Gaël Gonzales, chargé de mission biodiversité chez Orée. 2010, Année officielle de la biodiversité, a été marquée par l'apparition de nouveaux outils. Le plus officiel, l'EBEvie du ministère de l'Écologie, est un outil web élaboré avec Orée, l'institut Inspire et la société Dervenn. Les chefs d'entreprise peuvent s'y auto-évaluer en une heure et repartir avec des préconisations générales à intégrer dans leur politique environnementale (sécuriser son approvisionnement, le diversifier, travailler en collaboration avec les collectivités et associations...). « Nous nous adressons essentiellement aux PME et TPE pour aider des non-spécialistes à s'approprier un sujet complexe. C'est un préalable à des méthodologies plus élaborées », souligne Hélène Begon, du Commissariat général au développement durable. Depuis sa mise en ligne à l'automne dernier, près de 450 entreprises se sont déjà connectées et le ministère compte généraliser sa pratique d'ici à deux ans en partenariat avec l'Association des chambres françaises de commerce et d'industrie ( ACFCI). Plus complexe, l'ESR (évaluation des services rendus par les écosystèmes aux entreprises) est issue des travaux conjoints du WBSCD (World Business Council for Sustainable Development) et du WRI (World Resources Institute). Relayée en France par l'Association des entreprises pour l'environnement ( EPE) et l'institut Inspire, cette méthode aborde la biodiversité sous le prisme des services écosystémiques (ressources, régulation des milieux...). « C'est une démarche utilitariste qui parle le langage des entreprises. Elle liste, service par service, leurs dépendances et impacts et fournit un cadre d'organisation pour agir », explique Emmanuel Delannoy, fondateur du « think tank » Inspire qui explore les rapports entre économie et biodiversité et propose, depuis mars 2010, des formations de deux jours à cet outil libre de droits. Y sont déjà passés une dizaine de grandes entreprises (Cemex, EDF, La Poste ou Yves Rocher...) et autant de consultants. « Dans ses dernières phases, identification des risques et opportunités et évaluation des stratégies, le maniement de l'outil nécessite une expertise importante. Le faire en interne ou se faire assister, tout dépend ensuite du niveau de compétence de l'entreprise. Mais elle aura de toute façon intérêt à consulter des parties prenantes pour compiler de la connaissance », poursuit le directeur d'Inspire. La méthode s'articule bien avec les systèmes de management environnementaux en place dans les entreprises, en alimentant leurs plans d'action et en pointant de nouvelles améliorations. Cemex l'a expérimenté depuis un an sur sa carrière de Sandillon, dans la vallée de la Loire. Le groupe a, dans un premier temps, conçu un logiciel pour exploiter l'outil, puis listé sur son site les items propres à la biodiversité. « À Sandillon, l'ESR a permis d'identifier des risques que nous n'avions pas précisément pris en compte vis-à-vis de certaines espèces, comme les odonates (les libellules, ndlr). Ce qui nous a conduits à mettre en oeuvre des mesures de préservation des haies, leur habitat naturel », précise Christian Béranger, directeur développement durable chez Cemex. La deuxième étape, sa généralisation à l'ensemble des carrières, est prévue progressivement à partir de l'été grâce à la publication d'un guide méthodologique interne. « À terme, toutes nos carrières certifiées Iso 14001 intégreront dans leurs plans d'action une cible biodiversité inspirée des résultats de l'ESR. On aura donc au sein du groupe un système de management environnemental totalement intégré, repris ensuite sous un chapeau global Iso 26 000 », souligne le responsable. Dernier étage de la fusée, le bilan biodiversité qu'Orée devrait livrer sous forme de guide en 2012, une version dynamique de l'ESR. « L'idée, c'est de fournir un outil de suivi opérationnel muni d'une batterie d'indicateurs : pression, état écologique et réponse de l'entreprise. Nous avons lancé, depuis un an, des tests avec plusieurs groupes (Veolia, LVMH, Séché, Maisons du Monde) pour élaborer des indicateurs adaptés à différents périmètres (sites, produits...) », précise Gaël Gonzales. Après un petit tour par l'EBEvie et un bilan carbone réalisé en 2010, Fabienne Morgault, responsable développement durable chez Maisons du Monde, avait envie d'expérimenter avec Orée ce bilan biodiversité pour enrichir sa démarche d'écoconception. « Nous en sommes à la collecte des données pour construire, filière par filière (bois, coton et cuir), les indicateurs de la biodiversité les plus pertinents autour de nos produits. Le plus dur sera de tenir compte des impacts de nos fournisseurs chinois. » En plein foisonnement d'idées au sein des groupes de travail associatifs et professionnels, la démarche n'en a pas moins dépassé le cercle des initiés. En mai 2010, la société de conseil en biodiversité Gondwana a lancé son audit biodiversité, un tableau de bord qu'elle élabore avec l'entreprise sur la base d'un questionnaire détaillé de sa vulnérabilité, de ses perturbations et de ses dépendances à la biodiversité. L'outil s'adresse surtout à des gros clients (Michelin, Thalès...) avec une approche plutôt axée sur la protection des espèces. Pour Sanef, Gondwana a sélectionné, fin 2010, sur ses dépendances vertes une trentaine de sites sur lesquels la faune et la flore représentent un enjeu fort (amélioration de l'efficacité d'un passage pour grands animaux, étude sur les insectes...) et sur lesquels elle pourra élaborer un plan d'action après des études complémentaires menées par des bureaux d'études. Spécialisée en génie écologique, la société Dervenn propose, depuis 2011, une activité de conseil stratégique aux entreprises incluant des modules de formation et un diagnostic inspiré de l'ESR. Parmi ses premiers clients figure Aéroports de Paris. « Nous cherchions un regard extérieur très proche du terrain pour juger nos actions de protection de milieu naturel du point de vue de la biodiversité, nous aider à les étendre et à formaliser une stratégie. Grâce à cet accompagnement, nous allons par exemple pouvoir élargir nos choix d'essences végétales en conciliant biodiversité et sécurité aéronautique », souligne Céline Ciman, du pôle management environnemental chez ADP. 2-FAIRE VIVRE SA POLITIQUE Dans l'organisation interne de l'entreprise, la stratégie biodiversité a vocation à être déclinée de manière transversale, comme celle de développement durable. D'une vision patrimoniale, la biodiversité tend à devenir un concept stratégique pour les entreprises. Les grands groupes qui s'en sont déjà emparés sont, sans surprise, ceux qui en dépendent le plus et dont les activités sont très réglementées : industrie cosmétique, carriers, gestionnaires d'infrastructures linéaires, traiteurs d'eau, de déchets. La biodiversité est dès lors considérée comme un frein stratégique potentiel sur lequel mieux vaut agir de manière proactive. Et pourquoi pas transformer une contrainte potentielle en nouvelle opportunité économique ? Depuis deux ans, Suez Environnement a élargi son offre globale aux collectivités du contrat de performance environnementale Edelway. Le groupe soumet sa rémunération au respect de trois clauses : protection des ressources naturelles, préservation de la biodiversité et réduction des gaz à effet de serre. Une dizaine de collectivités ont déjà signé. Mais la valorisation économique des services écosystémiques n'en est qu'à ses balbutiements. « C'est dix fois plus simple pour une entreprise de travailler sur le carbone car on dispose d'une métrique unique, souligne Mathieu Tolian, à la direction responsabilité sociale et environnementale de Veolia Eau. On peut plus facilement raisonner en flux monétaire et intégrer son impact sur le climat dans sa comptabilité. La biodiversité doit suivre le même chemin. » Pour tenter de diffuser ce concept, l'association EPE travaille à la traduction d'un nouveau guide du WBSCD-WRI, le Corporate ecosysteme valuation, pour la rentrée 2011. Orée se penche, de son côté, sur l'élaboration d'un bilan comptable qui intègre le capital naturel au même titre que le capital financier. Mais, depuis deux à trois ans, la biodiversité a déjà des traductions concrètes dans les systèmes de management environnemental. Depuis 2008, Suez a mis en oeuvre près de 200 plans d'action adaptés à la sensibilité des sites. Le groupe intègre des critères sur la biodiversité dans ses audits environnementaux internes, comme dans ses procédures d'investissement. Sa filiale déchets Sita a développé, en 2008, avec le Muséum national d'histoire naturelle, un indicateur de qualité écologique pour réaliser un diagnostic standardisé de la faune et de la flore sur ses installations de stockage et bâtir des plans de gestion adaptés aux enjeux locaux. En Ile-de-France, cette démarche a été systématisée à ses dix-huit sites et les pratiques de gestion et d'aménagement des espaces verts ont déjà évolué : fauche tardive, maintien des liaisons internes aux sites, lutte contre les espèces invasives, création de milieux variés. Cemex a lui aussi créé son propre système d'observation standardisé, Roselière, qui analyse onze taxons1 et suit la richesse des carrières sur la durée. Pour piloter l'outil et alimenter la certification Iso 14001 des sites, un chargé de mission biodiversité a été embauché à plein-temps depuis deux ans. Chez RTE, un réseau régional des sept pilotes environnement travaille avec un réseau d'experts en biodiversité. Formé de vingt collaborateurs, il anime une veille sur les grands enjeux régionaux, comme les trames vertes et bleues, et fait vivre la concertation locale autour des projets d'aménagement favorables à la biodiversité sur les emprises de ses lignes électriques. « Nous associons systématiquement les acteurs locaux. Nous sollicitons également l'appui de scientifiques pour mieux cerner les impacts des couloirs de lignes sur les milieux », souligne Jean-François Lesigne, responsable du management environnemental chez RTE. Car l'acceptation sociale est au coeur des stratégies. Sur l'extension de l'A89, ASF a ouvert le dialogue avec les acteurs de cinq départements. Weleda s'est engagé, dès 2007, avec le parc naturel régional du ballon des Vosges dans une convention sur la cueillette responsable de l'arnica et a organisé, en 2009, sa première journée d'échanges avec les parties prenantes. « Pour ouvrir l'entreprise sur son territoire et développer des approches communes sur la biodiversité », précise Gilles Lemate, son responsable environnement. Impliqué depuis 1996 dans la biodiversité avec l'embauche d'un écologue, Séché Environnement a intégré dans son système de management un indicateur photographique de suivi des paysages, qui lui sert d'outil de médiation avec les riverains sur les aménagements futurs de ses sites. « Les photos sont prises par nos collaborateurs. Ce qui, en prime, les sensibilise », précise Daniel Baumgarten, son directeur développement durable. « Intégrer la biodiversité dans la culture d'entreprise, c'est la clé de voûte de notre stratégie », confirme Étienne Ruth, responsable développement durable chez Nature et découvertes qui cite les nichoirs, ruches et hôtels à insectes installés sur ses sites ou l'opération Coquelicots lancée pour sensibiliser ses salariés. 3-MISER SUR LES PARTENARIATS Puissant vecteur d'image pour les entreprises, la collaboration avec les parties prenantes associatives évolue désormais vers un échange de compétences « gagnant-gagnant ». La préservation de la biodiversité représente aujourd'hui 10 % des projets d'intérêt général soutenus par le mécénat environnemental. Et pour Bénédicte Menanteau, responsable d'Admical, le carrefour du mécénat d'entreprises, « on a dépassé le cadre du simple mécénat financier au profit d'une expertise partagée ». Les fondations d'entreprise sont ainsi devenues des lieux d'échange avec les partenaires associatifs et scientifiques. Énergie pour agir, la fondation GDF Suez, soutient le développement des sciences participatives que conduit le Muséum national d'histoire naturelle. « Le programme Vigie nature nous permet de nous positionner sur des sujets proches du groupe, comme la préservation de la biodiversité en ville, et de nous investir concrètement », estime Valérie Vigouroux, déléguée générale adjointe de la fondation qui compte profiter du dernier observatoire du muséum, Sauvages dans ma rue, pour créer des petits groupes d'observateurs parmi ses 3 000 salariés travaillant sur le site de la Défense. Du côté des associations, on retrouve cette tendance au développement de partenariats « gagnant-gagnant ». « Les entreprises sont demandeuses », analyse Arnaud Greth, président de Noé Conservation, qui tire en moyenne la moitié de ses recettes annuelles du mécénat, soit 500 000 euros par an. L'UICN travaille depuis cinq ans avec les entreprises. Elle conduit actuellement cinq partenariats (EDF, GSM, GDF Suez, Lafarge, Veolia) récoltant chacun entre 50 000 et 100 000 euros par an. « Les entreprises soutiennent nos projets courants et, en retour, nous les aidons à intégrer la biodiversité en menant avec elles des études ou des programmes d'action et de sensibilisation », observe Marie Aurenche, chargée de mission entreprises et biodiversité au comité français de l'UICN, qui leur destine également depuis 2010 un outil de formation. Ces partenariats ne mettent pas à l'abri d'un faux pas. Pour le WWF, une des rares ONG à avoir inscrit dans la liste noire de ses mécènes les industriels du nucléaire et du pétrole, c'est Ikea qui s'est fait aligner par la justice pour destruction d'une espèce protégée sur son site de Fos-sur-Mer (13). Les associations profitent de ces partenariats pour valoriser leurs antennes locales et l'expérience de terrain de leurs réseaux. La LPO est l'un des seize partenaires de Cemex chargés du suivi naturaliste des sites (Roselière) dans le cadre d'un comité des associations partenaires créé en 1995. « Nous animons également pour le groupe des réunions d'échanges sur des enjeux nationaux et nous avons participé à leur expérimentation de l'ESR », précise Thierry Duterte, chargé des partenariats à la LPO. Avec Danone, elle a décliné une approche complète sur les zones humides : célébration d'une journée mondiale, création d'un forum des gestionnaires de sites Ramsar en France ou programme de sauvegarde du milan royal associant les salariés de Volvic. Un mécénat de compétence récompensé en avril dernier par les premiers trophées du mécénat organisés par le ministère de l'Écologie. « Nous privilégions une approche différenciée avec chaque partenaire en nous interdisant de collaborer à des actions prospectives, comme l'obtention de permis d'exploitation » souligne le responsable de la LPO. Une démarche que rejoint FNE. L'association a inauguré en 2009 ses premières conventions-cadres sur la biodiversité avec RFF et GDF Suez. Elles conjuguent travail de réflexion commune et projets concrets : sous la forme d'un guide interne pour intégrer la biodiversité dans les nouveaux projets de lignes chez RFF ou via des projets de sensibilisation à la protection des bassins versants pour Lyonnaise des eaux. « Ce qui compte, c'est de coconstruire et d'engager les entreprises », résume Christian Hosy, responsable du réseau biodiversité chez FNE. En Alsace, Weleda démarre un programme de renaturation de son site avec l'association locale de la petite Camargue alsacienne, membre du réseau régional d'éducation à la nature et à l'environnement en Alsace ( Ariena). Sur les 15 000 euros du partenariat, une partie soutiendra un programme local de réintroduction du saumon dans le Rhin. Le reste permettra à l'association de mener, sur deux ans, des inventaires naturalistes et un programme de sensibilisation des 340 salariés du site autour d'animations : plantation d'un jardin naturel, ateliers de compostage et aménagement sur le site d'une mosaïque de milieux naturels. Pour l'Ariena, qui a déjà développé ce type de programmes avec les groupes Ricoh et Sharp, le fil rouge, c'est toucher l'individu derrière le collaborateur. « Et pour l'entreprise, l'aspect fédérateur du mécénat est essentiel », insiste Philippe Ludwig, responsable des partenariats entreprises du réseau.
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