Il y a quelques mois, ils ne savaient pas ce qu’étaient les lichens, depuis ils en sont devenus des observateurs avertis. Des citoyens prennent part depuis fin novembre dernier à un protocole de recherche sur ces organismes symbiotiques dans le cadre du premier projet du programme de sciences participatives PartiCitaE, hébergé par l’Observatoire des sciences de l’univers Ecce Terra.Au-delà de l'observationAu centre de ce projet inspiré de Vigie-Nature (observatoires participatifs du Muséum national d’histoire naturelle), Laure Turcati et Gilles Plattner ont souhaité « étendre les sciences participatives à d’autres aspects de l’environnement urbain comme l’air, l’eau, le bruit, mais également ouvrir la participation au-delà de l’observation ». Les volontaires interviendront donc à chaque étape du protocole scientifique, afin de « les rendre acteurs de la recherche, de la définition des sujets à la publication des résultats », explique Laure Turcati. Au lancement de PartiCitaE en avril 2016, l’équipe est allée à la rencontre des citoyens pour leur demander de cerner les questions auxquelles l’observatoire devrait répondre. Les 300 points de vue récoltés font état des préoccupations citoyennes quant à la pollution et à la nature, mais « beaucoup s’interrogent aussi sur l’aspect social des thématiques environnementales », remarque Gilles Plattner. Autant de suggestions dont l’équipe tient compte dans le choix des projets. Comme ce premier protocole pour étudier l’évolution de la qualité de l’air en corrélation avec la présence ou l’absence de lichens sur les arbres. La plus-value citoyenneDes réunions et excursions ont été organisées pour apprendre à distinguer les trois sortes de lichens et créer un outil de relève de données. En deux semaines, une vingtaine ont été envoyées à PartiCitaE, dont celles de deux classes de lycées : « Des élèves de Saint-Denis ont repéré des lichens fruticuleux dans un environnement urbain, ce qui est très rare », souligne Gilles Plattner, qui se réjouit d’avoir déjà des surprises. « Si erreurs il y a au début, elles sont statistiquement noyées dans la masse de données. Et avec le temps, les observateurs réguliers deviennent des experts capables de remarquer une situation anormale », précise-t-il. Encore en phase de test, « PartiCitaE veut, d’une part, vérifier que les lichens intéressent les volontaires et, d’autre part, que la méthode est assez fine pour détecter les différents types de pollution atmosphérique », explique Laure Turcati. Pour les chercheurs, le concours des citoyens est une véritable plus-value « qui permet d’acquérir une connaissance systémique et transdisciplinaire de l’environnement urbain tout en élargissant les champs spatio-temporels de recherche ».Dans environ trois ans, lors de l’étape d’analyse, PartiCitaE inclura également les volontaires. « L’observatoire travaille avec des étudiants en science de la communication et avec l’association l’École des données, pour animer des ateliers autour de la visualisation des données collectées », indique Laure Turcati. D’autres projets sont déjà envisagés pour mesurer la qualité de l’air en mouvement, observer l’eau de pluie, suivre la richesse végétale avec caméras infrarouges ou encore étudier l’influence de la perception de l’environnement sur les comportements. Éva Gomez