A l’échelle mondiale, 35 % des zones humides ont disparu entre 1970 et 2015, un rythme trois fois supérieur à celui des forêts. La France fête le 49e anniversaire de la Convention Ramsar, premier traité international sur la conservation des ressources naturelles, avec l’inscription au réseau mondial d’un 50ème site national. Et sans politique volontariste de reconquête des milieux, en dehors des acquisitions de sites confiées au Conservatoire du littoral il y a quarante-cinq ans.
« Plus un mètre carré de zone humide ne doit être détruit, exhorte Frédérique Tuffnel, députée (Charente-Maritime, ex-LREM). Face aux impacts du dérèglement climatique comme le risque d’inondation, qui concerne 16.000 communes, 300 agglomérations, 17 millions d’habitants et 9 millions d’emplois, les solutions fondées sur la nature seront à moindre coût. » Un an après la parution du rapport parlementaire « Terres d’eau, terres d’avenir », les propositions avancées avec le sénateur Jérôme Bignon (Somme, LIRT) restent à concrétiser – en particulier celles portant sur la fiscalité.
Un plaidoyer au long cours
Frédérique Tuffnel rappelle qu’un programme national de restauration de 100.000 ha de zones humides d’ici 2030 est suggéré au gouvernement et continue à plaider pour que les régions portent des appels à partenariats locaux, associés à des paiements pour services environnementaux (PSE) dans le cadre de la réforme de la politique agricole commune. « Au ministère de l’Agriculture, on nous oppose qu’il existe déjà les mesures agri-environnementales et nous peinons à faire comprendre qu’elles ne visent pas les mêmes objectifs que les PSE », rapporte Jérôme Bignon. Le plan pour la biodiversité de juillet 2018 annonçait le financement, d’ici 2021, de 150 millions d’euros de PSE par les agences de l’eau, qui rémunéreront les actions de protection de la biodiversité engagées par les agriculteurs. Les agences Seine-Normandie et Rhône-Méditerranée et Corse ont lancé, fin 2019, des appels à manifestations d’intérêt.
Une protection à petits pas
Sur 3 % des terres émergées, les tourbières stockent 30 % du carbone terrestre, plus du double de ce que captent les forêts. Bastien Coïc, de l’association Ramsar France, rappelle qu’à l’échelle nationale, ce stock reste mal connu. « Un état des lieux aiderait à cibler les sites à préserver en priorité ». Le rapport parlementaire de 2019 invitait l’IGN à fournir un appui méthodologique aux acteurs territoriaux pour dresser des inventaires cartographiques des zones humides.
« En France, une dizaine de tourbières sont encore en exploitation et libèrent du carbone dans l’atmosphère », signale Frédérique Tuffnel. Par ailleurs, le drainage des tourbières génère environ 2,7 millions de tonnes d’équivalent CO2 par an (autant que 30.000 tours du globe en avion), évalue l’Office français de la biodiversité. A l’échelle planétaire, les tourbières drainées émettent 2 à 3 Gt éq-CO2, soit dix fois les rejets annuels de la France métropolitaine.
Les vallées de la Scarpe et de l’Escaut (Hauts-de-France, 27 000 ha) constituent depuis peu le 50ème site français intégré au réseau international Ramsar (2.386 sites couvrant près de 254 millions d’ha, soit quatre fois la France). Et une dizaine de sites envisagent la labellisation. Les zones humides constituent une petite moitié des 200.000 ha acquis par le Conservatoire du littoral depuis 1975.
Tout au long de février, quelque 800 animations se tiendront autour des zones humides françaises (marais, prairies humides, tourbières, lagunes, mangroves …).
PNR Scarpe et Escaut / Flickr / Pierre André LECLERCQ / DR