C’est au congrès de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) tenu à Marseille que Biotope a fait la rencontre de Nat’H. Deux entités animées par la préservation de la biodiversité qui annoncent désormais leur partenariat pour contribuer au développement d’une filière française destinée à la conception de gîtes et nichoirs. Biotope fait son entrée au capital de Nature Harmonie, alias Nat’H, à hauteur de 49 %, permettant à la jeune pousse mallemortaise de développer son activité à l’échelle nationale.
D’après les chiffres communiqués par l’UICN, 32 % des oiseaux nicheurs en France sont menacés de disparition. L’étalement urbain, la destruction des habitats naturels et l’utilisation de pesticides sont les principales causes de la diminution de la population d’oiseaux en France. Un déclin qui entraîne inévitablement la perte de nombreux services écosystémiques rendus par ces espèces. C’est là qu’intervient Nat’H, qui prend le bâti comme support de la biodiversité en proposant l’intégration de nichoirs pour de nombreuses espèces d’oiseaux et de petits mammifères : mésanges, hirondelles, moineaux, chouettes, chauves-souris, martinets et hérissons.
Nat’H a vu le jour en 2019 par Olivier Winock, ancien professionnel du BTP qui a su concilier le monde de la construction urbaine à celui de la protection des oiseaux et mammifères menacés de disparition. « Plus j’avançais dans le secteur du béton, plus je prenais conscience de l’ampleur que prenait le bétonnage en ville, pour moi je n’allais pas dans le bon sens. J’apportais des solutions pour construire, mais pas de solutions pour la biodiversité », commente le fondateur de Nat’H qui démarre cette aventure entrepreneuriale à Toulon. Marqué par une sensibilité écologique, et volontaire à la LPO, c’est naturellement qu’Olivier Winock a conçu ses premiers nichoirs pour protéger l’habitat des martinets présents dans un quartier en voie de démolition. « J’ai commencé à construire des nichoirs dans mon garage avec des moules en bois. Mes premiers nichoirs étaient livrés pour sauver ces martinets. A partir de ce moment, la LPO m’a recontacté pour commander une palette, donnant progressivement naissance à ce projet Nat’H », se remémore-t-il.
Des nids hirondelles de fenêtre avec planche à fientes. Crédit : Nat’H
Des nichoirs zéro émission
Un projet qui a mûri, donnant lieu à un startup française spécialisée dans la fabrication d’habitats de substitution conçus spécifiquement à la demande de chaque client, afin de s’assurer que le gîte ou le le nichoir soit adapté à l’espèce qu’il accueille. Pour leur conception, Olivier Winock utilise du béton de bois, « c’est une base de liant, un ciment bas carbone constitué de 60 % de matière recyclée issue de la laitance concassée, de la fibre végétale, du bois et autres éléments de la recette secrète. Cela nous permet d’avoir un produit zéro émission de Co2, avec une durée de vie de 30 ans, qui s’intègre parfaitement au bâti ».
Une fois que ces produits arrivent en fin de vie, Nat’H peut les reprendre, les concasser, et les remettre dans le béton pour donner vie à de nouveaux produits. Ceux-ci peuvent être intégrés dans de nouveaux bâtiments, dans les travaux de rénovation et d’isolation, et dans le milieu agricole.
Une filière française de nichoirs
Forte de son succès, Nat’H voit son chiffre d’affaires croître en trois ans, passant de 25 mille euros en 2019, à plus de 200 mille euros en 2022. Pour accélérer ce mouvement, Biotope entre au capital de Nat’H, à hauteur de 49 %. Une participation qui permet à la jeune pousse de rester indépendante, tout en bénéficiant d’un investissement de 500.000 euros pour soutenir son développement. Cet apport permettra à Nat’H d’industrialiser sa fabrication de nichoirs en béton de bois et d’ouvrir un atelier bois. « Nous allons procéder à l’achat d’une centrale à béton automatisée, puis dans notre nouvel atelier nous allons améliorer la confection des moules afin de passer à une échelle plus industrielle, et parvenir à une unité de production qui enchaîne du matin au soir la fabrication de nichoirs », précise le fondateur de Nat’H.
Côté Biotope, cette acquisition répond au manque d’une filière française spécialisée dans l’habitat de substitution. « Avant de rencontrer Nat’H, Biotope réfléchissait au développement d’une activité nichoirs. Dans les études d’impact et de compensation, ces propositions s’essoufflent rapidement parce que l’offre est très peu disponible en France. Pour nous, cette entrée au capital permet à Nat’H d’investir dans une nouvelle unité de fabrication, d’avoir accès à un plus grand marché national et européen, et d’associer nos compétences pour proposer des services complémentaires pour la protection de la faune », nous explique Frédéric Melki, président de Biotope. Outre Nat’H, le spécialiste de l’ingénierie écologique, qui a connu une croissance de 25 % en 2022, travaille désormais sur un développement de marchés thématiques, tels que les outils moléculaires et la biologie du sol.
Avec un capital renforcé, et une activité qui passe à la vitesse supérieure, Nat’H s’attend à atteindre 1 million de chiffre d’affaires d’ici 2025. Un objectif « qui devrait être atteint plus rapidement », conclut Olivier Winock.
